App Store : Bruxelles juge qu'Apple enfreint des règles du DMA

Florian Innocente |

La Commission européenne a communiqué à Apple ses griefs à l'encontre de son application de certaines règles du DMA et annoncé l'ouverture d'une enquête supplémentaire.

Un peu moins de 5 mois après l'entrée en vigueur du Règlement des marchés numériques (DMA), la Commission européenne dresse un premier bilan de son application par Apple. La Pomme a dû sensiblement modifier le fonctionnement de son App Store en Europe — des concessions ont été faites après coup — mais les services de Bruxelles ont relevé plusieurs points qu'elle juge en infraction avec l'un des articles (5(4)) du DMA. Ces observations ne sont aucunement liées à l'actualité autour d'Apple Intelligence.

Pour le régulateur, les développeurs en Europe qui distribuent leurs logiciels depuis l'App Store devraient être autorisés à informer leurs clients de l'existence d'options d'achat alternatives, et ce, sans frais à payer à Apple. Cette dernière a créé trois nouvelles conditions pour les développeurs qui veulent distribuer leurs apps sur l'App Store et/ou depuis une autre plateforme.

Bruxelles remarque qu'aucune d'elles ne permet aux développeurs de rediriger, sans frais, leurs clients en dehors de l'App Store : « Par exemple, les développeurs ne peuvent pas fournir d'informations sur les prix dans l'application ni communiquer de toute autre manière avec leurs clients pour promouvoir les offres disponibles sur des canaux de distribution alternatifs ».

Ensuite, la seule véritable manière dont ils disposent pour emmener leurs clients ailleurs consiste en un lien externe qui ouvre une page web vers leur site et leurs offres : « Le processus est soumis à plusieurs restrictions imposées par Apple qui empêchent les développeurs d'applications de communiquer, de promouvoir des offres et de conclure des contrats via le canal de distribution de leur choix ».

Enfin Apple perçoit une commission lorsqu'elle envoie un client vers le site externe du développeur où sera conclue la transaction : « Apple facture aux développeurs des frais pour chaque achat de biens ou de services numériques effectué par un utilisateur dans les sept jours qui ont suivi (l'utilisation d') un lien depuis l'application ».

Ce point fait l'objet d'un contentieux entre Spotify et Apple. Les conditions d'Apple disposent que pour toute vente d'un bien numérique réalisée dans les 7 jours qui suivent l'appui sur le bouton "Continuer" (avec lequel on confirme qu'on accepte de sortir de l'App Store pour effectuer une transaction), une commission de 27 % est attendue (12 % en cas de renouvellement de l'abonnement ou pour les PME). Apple estime qu'elle a contribué à cette vente via son App Store et qu'elle doit donc en tirer un revenu. Ce n'est pas tant le principe qui gêne Bruxelles — elle lui reconnaît le droit de prélever une commission — que son montant qui va « Au delà de ce qui est strictement nécessaire » et par là même est de nature à décourager les développeurs.

Apple peut maintenant étudier les remarques de la Commission. Si les réponses apportées ne sont pas jugées satisfaisantes, la Commission pourra prononcer officiellement — d'ici au 25 mars prochain, soit 12 mois après l'entrée en vigueur du DMA — qu'Apple en enfreint certaines règles.

Nouvelle enquête

Parallèlement, la Commission a ouvert une autre enquête en conformité avec l'article 6, paragraphe 4 du DMA, sur les deux choix offerts aux développeurs en Europe : soit de rester sur le contrat de distribution par l'App Store qui prévalait jusque-là, soit de signer le nouveau qui induit d'autres conditions.

Trois d'entre elles vont être étudiées pour en vérifier la nécessité et la proportionnalité : la Core Technologie Fee avec sa taxe de 0,5 € ; le parcours imposé aux utilisateurs qui souhaitent télécharger et installer des apps ou boutiques d'apps alternatives ; les conditions d'admissibilité des développeurs pour offrir ces magasins alternatifs ou permettre un téléchargement depuis leur site web. Actuellement, Apple impose qu'ils soient des membres dits de "good standing" (ou "en règle") ce qui signifie qu'ils doivent répondre à ce statut depuis deux années consécutives sur l'App Store. Et qu'ils aient eu une app qui a enregistré au moins 1 million d'installations sur iOS et iPadOS en l'espace d'un an, en Europe, lors de l'année calendaire précédente.

DMA : Apple fait de nouvelles concessions à Bruxelles sur la distribution des apps

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Apple a déclaré à Reuters : « Nous sommes convaincus que notre plan est conforme à la loi et estimons que plus de 99 % des développeurs paieraient des frais identiques ou inférieurs à Apple selon les nouvelles conditions commerciales que nous avons créées ».

Enfin, la Commission continue à surveiller les procédures mises en place par Apple pour examiner et valider les apps et boutiques d'apps alternatives proposées en téléchargement pour sa plateforme.

En cas d'infraction, la Commission peut imposer des amendes allant jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires mondial total (il s'est établi à 383 milliards de dollars pour l'exercice 2023) et 20 % en cas d'infractions répétées.

avatar Adiibou | 

Ils auraient mieux fait de limiter les frais empochés par les stores plutôt que de forcer cette ouverture

avatar debione | 

@Adiibou:

Sauf que ça c'est contraire aux règles de libre concurrence.

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