Il devient bien difficile de se différencier sur le marché des traqueurs d’activité — c’est pourtant ce qu’a fait Withings avec l’Activité, qui prend la forme d’une montre Swiss Made. Son prix de 390 € la réserve toutefois à un certain public, d’autant plus limité que l’Activité n’est disponible qu’au compte-gouttes. Qu’à cela ne tienne : Withings propose aussi une Activité Pop, Made in China certes, mais vendue à la Fnac pour « seulement » 149,95 €. Coup de cœur, ou gadget ? La réponse dans notre test.
Une jolie montre…
Withings n’est pas une société d’horlogerie, mais l’Activité Pop bénéficie du savoir-faire suisse acquis lors de la conception de l’Activité. Leur air de famille est indéniable et assumé : l’Activité est la grande sœur chic et élégante, quand la Pop est la petite sœur fun et délurée. Toutes deux masquent leur électronique sous des atours épurés qui ne sont pas sans rappeler certains modèles à petite seconde.
Si l’Activité est si chère, c'est que son cadran a été conçu dans le haut lieu de l’horlogerie qu’est Le Locle, et qu’elle est composée de matériaux de première qualité. Le boîtier est fait d’acier 316L, la glace de saphir synthétique, et le bracelet en cuir provient d’un atelier français qui fournit Hermès. Condition sine qua non pour obtenir l’estampille Swiss Made, plus de la moitié de la valeur des composants du mouvement revient à la Suisse.
Avec son bracelet en silicone, sa glace en verre minéral, et sa confection chinoise, l’Activité Pop est assurément plus modeste. Si elle offre les mêmes fonctions que sa grande sœur, son niveau de finition est bien moins élevé : le cadran perd toute dimensionnalité, les aiguilles perdent leur aspect métallique, le boîtier perd sa finition miroir… et le prix perd 240 €. Les mesures d’économies sont par endroit trop visibles, notamment entre les cornes ou sur le fond, où le revêtement n’est pas appliqué de manière régulière.
Le bracelet fourni est passable, mais la texture de sa face intérieure collecte les résidus de transpiration. Les pompes flash permettent toutefois de le retirer rapidement, et de le remplacer par n’importe quel bracelet de 18 mm. Le modèle bleu est peut-être un peu plus difficile à accorder que les modèles noir et sable, mais le profil épuré de la Pop sait s’adapter à différents types de bracelets.
Les amateurs de gros boîtiers trouveront la Pop un peu petite — son diamètre de 36,3 mm m’a toutefois convenu alors que je ne possède pas une montre de moins de 40 mm, tout comme il a convenu à Madame qui porte un modèle de 31 mm. Tout juste regrettera-t-on que la montre soit un peu haute, ce qui l’empêche de passer discrètement sous la manchette d’une chemise.
Mais c’est ce qu’il faut pour caser un « mouvement connecté », doté d’une puce Bluetooth LE et d’un accéléromètre. Une simple pile bouton CR2025 est censée lui offrir huit mois d’autonomie. Disons « plusieurs mois », ce qui est déjà très bien, en tout cas assez pour que Withings ne prenne pas la peine de glisser une pile de rechange dans l’emballage (1,49 € les deux).
…connectée…
Qui dit connexion dit smartphone, en l’occurrence un iPhone (4S ou plus récent) équipé de l’application Withings, en attendant une prochaine compatibilité avec Android. L’appariage demande d’utiliser l’outil fourni pour appuyer sur le bouton de remise à zéro, une procédure qu’il m’a fallu répéter à plusieurs reprises avant d’enfin y arriver.
La montre connectée, il faut… régler l’heure ! Le mouvement mi-mécanique mi-électronique conçu par Withings ne possédant pas de couronne, il faut « caler » les aiguilles depuis l’iPhone. L’heure est ensuite ajustée automatiquement, changement de fuseau horaire ou de saison y compris. La procédure est amusante, quoique passablement futile — si ce n’est gênante : la Pop est inutilisable sans connexion.
La montre est incapable de synchroniser ses données en arrière-plan : Withings promet que cette fonction sera disponible ultérieurement, mais il faut pour le moment penser à lancer l’application au moins une fois toutes les 38 heures. La connexion est censée être automatique, mais il faut souvent désactiver puis réactiver le Bluetooth pour que la montre « accroche » et que les données soient (lentement) transférées.
Pire : à deux reprises en huit jours, la Pop a tout bonnement cessé de synchroniser ses données. Seule solution dans ce cas, supprimer la montre de l’application, restaurer ses paramètres d’usine en appuyant cinq fois sur le bouton de remise à zéro, et la rallumer en appuyant une sixième fois. Évidemment, les données sont supprimées au passage, ce qui ne fait qu’ajouter de la frustration à l’agacement.
…ne fait pas un super traqueur…
Que la Pop ahane sur ce plan est d’autant plus frustrant que son cadran secondaire procure par ailleurs un retour instantané sur le suivi d’activité. La progression de cette petite aiguille au fil de la journée est particulièrement plaisante… mais elle le serait encore plus si Withings permettait de changer le nombre de pas visé. L’objectif imposé, 10 000, n’a d’autre avantage que d’être immédiatement divisible par 100 — il ne correspond pas vraiment aux recommandations de l’OMS, et risque de décourager plus que d’inciter.
Si la Pop suit correctement l’activité — encore heureux ! —, son suivi du sommeil est moins satisfaisant. Aucun traqueur ne détecte parfaitement l’endormissement : comme eux, la montre de Withings détecte plutôt le coucher. De plus en plus de traqueurs détectent automatiquement le réveil : la montre de Withings aussi, mais seulement si vous vous dirigez d’un pas énergique vers la cafetière.
C’est peut-être pour cela que le vibreur de la Pop est aussi sec : il vous réveillera du premier coup ! Comme il fait du bruit pendant une bonne dizaine de secondes que l’on ne peut interrompre, il risque de réveiller votre partenaire. Son déclenchement doit être programmé dans l’application ; Withings ne permet malheureusement pas de prévoir plusieurs horaires, un pour la semaine et un pour le week-end par exemple.
Un double tap sur la glace permet de vérifier l’heure à laquelle ce réveil est programmé. L’idée, qui exploite l’accéléromètre de la Pop, est maline… mais il faut souvent s’y reprendre à plusieurs fois. Reste qu’on n’arrive pas à se lasser de la dance des aiguilles, dont l’aller-retour rappelle les affichages rétrogrades, un charme à peine troublé par le ferraillement du mouvement chinois.
…surtout quand elle casse
S’il avait été publié il y a quelques semaines, ce test se serait arrêté ici. Avant de conclure, j’aurais sans doute évoqué la prochaine arrivée du Swatch Group sur ce créneau. Les Suisses feront-ils le choix d’un mouvement hybride comme Withings, ou d’un « bête » mouvement associé à de l’électronique comme Névo ? Prendront-ils le marché par le bas avec un pendant connecté à la Sistem51 mécanique, ou attaqueront-ils un cran au-dessus avec une nouvelle gamme T-Touch ? Qu’est-ce que cela implique pour le futur de la gamme Activité ?
Mais il faut aujourd’hui mentionner un aspect bien plus prosaïque, celui de la fiabilité de cette montre — la petite Activité fait littéralement « pop ». La communication de Withings assure qu’il est « rare » que la glace de la Pop ne casse : « ces occurrences, très rares par rapport aux nombres de produits vendus, se rencontrent uniquement sur les premières montres produites ». Pourtant, les clients se plaignent encore, et encore, et encore, et encore, et encore.
D’après ce que nos sources dans la distribution nous disent des niveaux de vente de la Pop, et du nombre de problèmes que nous avons pu recenser sur les réseaux sociaux et parmi nos collègues journalistes, il semble bien que ces occurrences ne soient pas si « rares » que ça. La similarité des clichés pointe au contraire le défaut structurel — le verre minéral se raye moins facilement que le bon vieux plexi, mais il est assez fragile.
L’assistance client de Withings prend en charge les montres cassées sans broncher, et il se murmure que le problème sera bientôt résolu. En attendant toutefois, il est difficile de porter une Pop sans jamais y penser — elle peut se casser spontanément pendant le sommeil, sous la douche, à la piscine, ou simplement posée sur un bureau ! La montre connectée de Withings est plutôt mignonne et son concept assurément intéressant, mais il est impossible de recommander son achat pour le moment.