Premier téléphone de Motorola à avoir été conçu sous la tutelle de Google, le Moto X était très ambitieux à sa sortie aux États-Unis. Assemblé sur le sol américain et hautement personnalisable, il se distinguait intelligemment de la concurrence en évitant la course aux pixels ou au nombre de cœurs et de GHz.
Six mois plus tard, sa traversée de l'Atlantique lui fait perdre ces deux arguments commerciaux. Le Moto X hexagonal est fabriqué en Chine et disponible uniquement en noir ou en blanc. Malgré tout, le rejeton du couple Motorola Google a encore des fonctions qui lui sont propres et qui le rendent un peu plus intelligent que la moyenne. Vendu autour de 370 €, soit quasiment le même prix que son cousin le Nexus 5, le Moto X vaut-il le coup ? La réponse dans notre test.
Pas de personnalisation, mais une fabrication de qualité
Commençons par ce qui fâche. Marketé aux États-Unis comme un smartphone « conçu par l’utilisateur » (« designed by you », peut-on lire sur sa première publicité), le Moto X a perdu toutes ses options de personnalisation en arrivant en France.
Outre-Atlantique, les acquéreurs de l’appareil peuvent modifier son aspect dans les moindres détails grâce au site Moto Maker. On commence par choisir la couleur de la coque en plastique du dos parmi une large sélection, à moins que l’on préfère toucher du bois (+ 25 $). La face avant est ensuite modifiable indépendamment en noir ou en blanc. Puis on se décide sur la couleur des boutons et du cercle entourant l’appareil photo. Comme tous les artistes, on termine enfin sa création en la signant... Mais ce n’est pas tout ! Outre le design du smartphone, les clients américains peuvent choisir dès cette étape leur fond d’écran et ajouter leur compte Google afin d’obtenir un appareil prêt à l’emploi dès la sortie de sa boîte — il faut juste entrer son mot de passe Google pour retrouver toutes ses données.
Tout ça, il faut l’oublier en dehors des États-Unis, du moins pour le moment. « Au deuxième trimestre, peut-être plus tard cette année, nous nous attendons à proposer les options de personnalisation à des consommateurs en Europe », a indiqué le mois dernier Dennis Woodside, le patron de Motorola... qui part chez Dropbox. Depuis, Motorola est aussi passé dans les mains de Lenovo. Le CEO chinois a indiqué que la personnalisation était un « bon modèle » et qu’il allait « peut-être le reproduire sur d’autres marchés ». Il y a donc une chance de voir arriver Moto Maker en France, mais il faudra certainement se montrer patient.
Cette absence ne doit pas masquer la réussite du Moto X en matière de conception et de fabrication. Le smartphone fait les mêmes dimensions que son petit frère le Moto G (129 x 65 mm), mais accueille un écran plus grand de 4,7" et est plus léger avec 130 g sur la balance. Écrans éteints, les deux appareils se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Seul un œil avisé distinguera que la caméra n’est pas placée au même endroit et que le haut-parleur est moins grossier sur le Moto X.
C’est une fois les écrans allumés et surtout les téléphones en mains que l’on mesure la supériorité du Moto X. Outre son écran plus grand, l’appareil apparait comme plus solide et mieux fini. Les boutons de volume et de verrouillage en aluminium anodisé sont bien ajustés, ce qui n’est pas le cas sur le modèle d’entrée de gamme. Le plastique au toucher doux, limite comme de la gomme, et la forme légèrement bombée du dos assurent une prise en main efficace et très agréable. La préhension ne pose pas de problème même pour les petites mains, contrairement au Nexus 5, plus long et plus large en raison de son écran 5".
De bonnes performances
La fiche technique du Moto X n’est pas vraiment impressionnante en ces temps où les smartphones Android haut de gamme disposent de processeurs dépassant les 2 GHz et d’écran Full HD. Son écran AMOLED n’est « que » 720p, mais il est tout à fait satisfaisant. Avec sa résolution de 312 ppp, les pixels ne sont pas distinguables individuellement. La colorimétrie n’est pas aussi précise que celle du Nexus 5 — elle dérive un peu vers le bleu —, mais elle n’en demeure pas moins convenable. Un peu plus gênant, l’amplitude de la luminosité. On aurait aimé pouvoir baisser et augmenter plus fortement la luminosité. Bien qu’il soit perfectible, l’écran remplit quand même bien son rôle.
Le CPU et le GPU sont dans la même veine que l’affichage : ils ne sont pas à la pointe, mais cela ne les empêche pas d’assurer de bonnes performances. Le processeur central est un Qualcomm Snapdragon S4Pro dual core Krait à 1.7GHz. Quant au processeur graphique, il s’agit d’un Adreno 320 quad core. Ces composants sont capables de rivaliser avec certains processeurs plus haut de gamme dans certains tests. GeekBench place le Moto X au même niveau que le Galaxy S4 (CPU quad core) et devant le HTC One sur le benchmark impliquant un seul cœur. Dans le test multi-core, le smartphone de Motorola se fait distancer par la concurrence, mais ce n’est pas gênant pour autant. En utilisation normale, la navigation dans Android est toujours fluide et rapide. Même dans les jeux gourmands, aucune saccade n’apparait.
Le CPU et le GPU font partie d’un ensemble intéressant nommé X8 Mobile Computing System. Ce système sur puce (SoC) est l’équivalent du couple A7+M7 d’Apple. Son nom vient de son nombre de cœurs : il y a donc deux cœurs pour le CPU, quatre cœurs pour le GPU, et deux autres basse consommation qui sont exclusivement dédiées à rendre le téléphone plus « intelligent ». Un cœur a les mêmes fonctions que le M7 d’Apple : il communique directement avec les différents capteurs (accéléromètre, gyroscope et capteur de luminosité ambiante). Le dernier cœur se consacre à la fonction de reconnaissance vocale. Nous reviendrons sur ces spécificités en détail plus tard, mais on peut d’ores et déjà donner un exemple de ce à quoi sert le cœur basse consommation lié aux capteurs.
Motorola a mis au point une technique pour lancer l’appareil photo rapidement et sans avoir à naviguer dans les menus où à allumer l’écran. Il faut donner deux petits coups de poignet et le Moto X est prêt à prendre des photos — une vibration signale que l’appareil photo démarre.
La qualité des photos prises est bonne sans être excellente. Le capteur CMOS 10 millions de pixels s’en tire très bien quand les conditions lumineuses sont favorables, et un peu moins bien dans les scènes sombres avec pas mal de bruit notamment. Rien à signaler concernant l’enregistrement de vidéos en 1080p (30 FPS) qui fonctionne comme on s’y attend. Le Moto X fait en définitive office d’appareil photo correct.
Motorola annonce une autonomie « jusqu’à 24 heures en usage varié ». Dans les faits, la batterie de 2200 mAh offre bien une journée d’autonomie sans avoir à se soucier de son usage — sauf à passer beaucoup de temps sur un jeu évidemment. Ce n’est pas énorme en soi et les phablettes font bien mieux, mais c’est supérieur au Nexus 5 d’après notre expérience.
Enfin, le Moto X est doté d’une puce sans fil prenant en charge le Wi-Fi 802.11ac double bande (2,4 et 5 GHz). Sur le papier, cette puce permet d’avoir des débits largement supérieurs aux terminaux 802.11n, à condition bien entendu de disposer d’un routeur compatible. Dans nos benchmarks réalisés avec une AirPort Time Capsule et une connexion en fibre optique (à quelques mètres de la borne et dans un environnement surchargé d’ondes sans fil), le Moto X a plafonné autour de 50 Mbit/s alors que l’iPhone 5s est monté jusqu’à 80 Mbit/s.
Il arrive par ailleurs fréquemment que la connexion Wi-Fi fasse carrément du sur place et que le téléchargement d’une application ou d’une page web se stoppe. Il faut alors couper le Wi-Fi puis le réactiver. Ce problème n’arrive pas seulement en 802.11ac, nous l’avons aussi rencontré avec un routeur 802.11n. Ça ne semble pas être un problème isolé au vu des nombreux témoignages similaires que l’on trouve sur divers sites et forums. Pas de problème en revanche pour la connexion 4G LTE. Sur le réseau de Free Mobile à Lyon, le maximum que nous avons atteint est 50 Mbit/s.
Un Android augmenté
Développé sous le giron de Google, c’est tout naturellement que le Moto X utilise Android sans surcouche. C’est la toute dernière version du système qui est installée (Android 4.4.2), un bon point.
Cela n’a pas empêché Motorola d’intégrer plusieurs de ses applications et services, et c’est tant mieux. La première app à laquelle on est confronté est Motorola Migrate, un outil qui facilite le passage d’un ancien smartphone Android ou d’un iPhone au Moto X. En saisissant son identifiant et son mot de passe iCloud, Migrate déplace les contacts et les calendriers du service d’Apple vers le nuage de Google. Pratique pour simplifier la transition.
Motorola Assist ajoute pour sa part la fonction « ne pas déranger » qu’il manque à Android. On définit la période du jour ou de la nuit durant laquelle on veut ne pas être dérangé et Assist désactive la sonnerie du téléphone dans cette tranche horaire. Une fonction permet aussi au téléphone de lire les SMS/MMS quand on est en voiture et de lancer automatiquement la lecture de musique via Bluetooth ou la prise casque après le démarrage du véhicule.
Motorola intègre aussi à son smartphone Moto Care, un équivalent de Localiser mon iPhone... qui ne fonctionne pas mieux que lors de notre précédent test avec le Moto G il y a deux mois. On est censé pouvoir localiser, faire sonner, verrouiller ou bien encore effacer les données du Moto X à distance via un site web, mais cela ne fonctionne tout simplement pas. Heureusement, il y a le Gestionnaire d’appareils Android de Google qui marche, lui.
Enfin, Motorola Connect permet de suivre ses appels et ses SMS/MMS directement depuis son ordinateur. Il suffit d’activer la fonction dans les réglages du smartphone, d’installer une extension Chrome sur Mac ou PC et d’entrer ses données de connexion. Une fenêtre détachable de Chrome affiche tous les messages mobiles reçus et envoyés ainsi que le journal des appels. On peut non seulement consulter les SMS/MMS, mais aussi y répondre. Les messages et appels reçus sont signalés sur l’ordinateur par une notification.
Écran actif et fonction vocale
Outre ces logiciels utiles, ce qui démarque vraiment le Moto X de la concurrence c’est son système de notifications « écran actif » et sa fonction vocale qui permet d’activer l’assistant Google Now sans avoir besoin de toucher le moindre bouton.
Quand son écran est éteint, le Moto X n’utilise pas de LED comme les Nexus pour signaler les nouveaux messages ou autres événements. Les notifications s’affichent sur son écran, mais dans un mode spécial qui consomme très peu d’énergie. Dans le cas d’un nouveau mail, une icône simplifiée de Gmail entourée d’un cercle s’illumine pendant une poignée de secondes en dessous de l’horaire. En appuyant sur cette icône, on a un aperçu de la notification. Si on veut ouvrir mail, on glisse son doigt vers le haut de l’écran et on atterrit directement dans l’application Gmail. Si on veut simplement déverrouiller le téléphone sans accéder au mail, on glisse son doigt vers le bas. Dernier geste disponible : un glissement latéral pour effacer le contenu de l’écran actif.
Grâce à la technologie AMOLED de l’écran, seuls les pixels qui sont affichés consomment de l’énergie. Ce ne sont donc que quelques pixels qui se réveillent à chaque nouvelle notification et pas la totalité de l’écran, d’où l’impact très faible sur l’autonomie. Cette fonction est non seulement très futée, car elle offre plus d’informations que la LED des Nexus, mais aussi car elle s’active quand on prend en main l’appareil.
Exemple concret : quand on sort le Moto X de sa poche, l’écran actif s’affiche automatiquement. On voit donc l’heure qu’il est et les notifications reçues sans avoir eu à appuyer sur le bouton de verrouillage et en préservant l’autonomie. Cela est rendu possible par le cœur du X8 Mobile Computing System qui communique avec les capteurs (accéléromètre, capteur de luminosité...) du téléphone. Le système est suffisamment intelligent pour ne pas s’activer à chaque fois que le téléphone est bougé. Motorola précise bien que l’écran actif ne s’active pas quand le Moto X est dans une poche ou un sac, quand l’écran est tourné vers le bas ou au cours d’un appel.
Dans les réglages de la fonction, on peut choisir quelles applications peuvent en tirer partie, masquer les détails des notifications et régler un mode nuit. L’écran actif devient vite indispensable par son mode de fonctionnement (on saisit le smartphone ou on le bouge juste un petit peu quand il est posé sur une table) et par la nature des informations qu’il délivre (on sait si on a reçu un email, un SMS, un appel ou toute autre chose).
L’autre fonction distinctive du Moto X, c’est l’assistant Google Now qui peut être activé en prononçant simplement « OK Google Now », sans avoir besoin de toucher le téléphone. Un cœur basse consommation est uniquement consacré à écouter ce qui se passe et reconnaître quand la phrase est prononcée.
Pour que la reconnaissance fonctionne bien, il faut que plusieurs conditions soient réunies : la phrase doit être dictée de façon normale, l’environnement ne doit pas être trop bruyant et le téléphone ne pas être trop éloigné. Si toutes ces conditions sont respectées, alors la reconnaissance marche bien. L’assistant Google Now se met en route et attend les ordres ou les questions de l’utilisateur. À l’instar de Siri, il peut indiquer la météo, calculer un itinéraire, répondre à des questions, ajouter un rappel, etc. Il prend aussi des initiatives de son propre chef en affichant le résultat du dernier match de son équipe favorite, le temps de trajet quand on part du travail...
Malheureusement, il n’est pas toujours aussi simple de convoquer Google Now. Il faut souvent s’y reprendre à plusieurs à reprise quand plusieurs personnes parlent à côté du téléphone. On est aussi censé pouvoir retrouver son téléphone en lui demandant où il se trouve, mais dans la pratique il y a peu de chance que cela fonctionne s’il se trouve à plus de trois mètres. La phrase « OK Google Now » est par ailleurs un peu longue à prononcer. Un simple « OK Google » comme sur Chrome aurait été plus appréciable.
Le fabricant précise qu’il ne conserve pas d’enregistrement des commandes vocales une fois qu’elles ont été traitées. Si toutefois vous ne faites pas confiance dans Motorola, vous pouvez désactiver la fonction.
Pour conclure
Le Moto X est un smartphone vraiment malin. Plutôt que de l’équiper d’un processeur quad core 2 GHz et d’un écran Full HD, Motorola a fait le choix judicieux d’ajouter des fonctions vraiment pratiques au quotidien. Le système de notifications basse consommation est une franche réussite qui mérite à lui seul que l’on s’intéresse au Moto X. La fonction vocale est aussi une bonne idée, mais elle nécessite d’être perfectionnée. Quant aux services de Motorola, ils comblent à point nommé les rares carences d’Android.
Le Nexus 5 a beau proposer des prestations techniques supérieures, c’est le Moto X qui est le plus agréable à utiliser au quotidien grâce à ses fonctions intelligentes et pertinentes. Seule ombre au tableau, le problème de Wi-Fi sur notre exemplaire qui gâche l’expérience. Il y a aussi l’absence de Moto Maker pour faire du Moto X un téléphone unique, mais, qui sait, le service arrivera peut-être un jour. OK Lenovo ?