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Test : six mois avec le Kindle d'Amazon

jcvignes

vendredi 16 octobre 2009 à 15:01 • 14

Matériel

Apple et iTunes ont montré la voie de la dématérialisation : finis les CDs qui prennent la poussière, résolu le choix douloureux du DVD à emporter avec soi en vacances (le DivX n’a pas joué le moindre des rôles sur ce point…), terminée la queue dans les rayons pour entendre la musique de son choix ! Pourtant, si les films, séries et autres chansons se prêtent parfaitement à l’exercice, le principe du « livre électronique » s’est beaucoup cherché.

Alors que le Kindle d’Amazon est vendu depuis le 19 octobre aux clients en Europe et notamment en France (lire Amazon lance le Kindle en Europe) l’occasion est rêvée de s’attarder sur cet appareil qui est certainement l’exemple le plus abouti de cette dématérialisation du livre. Nous allons relater ici les six mois passés en sa compagnie, en tant qu'utilisateur français mais lecteur anglophone.

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Le concept du livre électronique n’a rien de nouveau : le fameux projet Gutenberg de numérisation de livres a débuté en 1971 tandis que les tout premiers appareils dédiés à la lecture d’ouvrages numérisés ont été lancés en même temps que le tout premier iMac ! Pourtant, ces initiatives n’ont jamais connu de réel succès auprès du grand public : la réticence des éditeurs à numériser leurs œuvres à succès n’incite pas les lecteurs à s’en procurer et les rares qui le font sont rebutés par l’interface et la lenteur de l’affichage. C’est dire si le Kindle d’Amazon était attendu : lecteur assidu et utilisateur d’iPod de la première heure, nous en avons utilisé un depuis six mois.

L’iPod des livres

La ressemblance entre le Kindle et l’iPod ne se limite pas à la livrée blanche qui pare les deux objets. Comme le produit d’Apple, le Kindle tente de faire rentrer dans un objet électronique un plaisir millénaire, le texte remplaçant ici la musique. Tout comme Apple, Amazon a su développer un véritable écosystème autour de son produit : de nombreuses housses et accessoires développés par des tiers rejoignent les deux modèles de Kindle sur Amazon.com (le Kindle DX, plus proche d’un format de quotidien pourrait être vendu en Europe en 2010).

Les deux produits sont par ailleurs aussi inutiles l’un que l’autre si on ne leur ajoute pas de contenu acheté séparément. Là où Apple a convaincu une à une les « majors » de diffuser leurs titres sur son iTunes Store, Amazon a pour lui d’être le plus grand libraire en ligne au monde et de disposer d’une force de frappe suffisante pour numériser elle-même les titres phares des plus grands éditeurs.

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Écouter de la musique sur un iPod c’est oublier dès les premières notes l’attirail électronique et le système d’exploitation qui le fait fonctionner. Dans un produit comme le Kindle cette gageure est plus importante encore : c’est l’histoire qui doit s’imposer, comme elle le fait avec l’amas de papier et d’encre qui compose habituellement nos « bouquins ».

À l’usage cela fonctionne : pris dans un roman on trouve sans effort le bouton pour passer d’une page à l’autre (il y en a même un pour les gauchers !) et surtout sans y penser. La technologie e-ink (voir notamment Kindle : l'iPod du livre ?) y est pour beaucoup : les caractères se détachent nettement et se lisent sans fatigue. En outre, le fait de pouvoir changer leur taille à la volée fera le bonheur des myopes.

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De la taille d’un livre de poche, l’écran n’est pas rétroéclairé, mais on n’attend pas cela d’un livre : ce qu’on lui demande en revanche c’est de ne pas avoir de fil à la patte – les utilisateurs d’iPhone connaissent ce problème mieux que personne – et la faible consommation de l’écran permet de lire pendant des semaines sans penser à le recharger. Précision pour les insomniaques ou ceux qui aiment lire au lit, l'absence de rétro-éclairage rend évidemment impossible toute lecture en l'absence d'une lumière à proximité. Mais avec une lampe de chevet à proximité on lit son Kindle tout à fait bien.

Lire, c’est justement toute la promesse du Kindle. Pour qui voyage souvent, emporter plusieurs livres de 500 pages dans un objet de quelques grammes est un vrai plaisir. Beaucoup diront sans doute qu’on perd la joie de tenir un livre entre ses mains, mais c’est pour nous une occasion de ne pas encombrer nos bibliothèques avec des livres de poche et de garder des rayonnages disponibles pour des ouvrages qui en valent vraiment la peine : le Kindle est un outil pour lire vite et bien, pas pour conserver, comme certains l’ont toutefois appris à leur dépens (voir l'article Kindle : Amazon efface des livres à distance). Par ailleurs, à 9,99$ le livre, le Kindle permet aux lecteurs anglophones de faire de substantielles économies par rapport à l’offre des librairies étrangères. D’autant que ces contenus sont parfois difficiles à trouver en France.

Nous sommes d’ailleurs moins convaincus par les capacités « électroniques » du Kindle : la possibilité de rechercher la définition de mots du texte est intéressante, mais vient plutôt « parasiter » la lecture. En effet, devoir surligner le mot avec le petit joystick est assez peu intuitif et vous éloigne trop du livre lui-même pour vous ramener vers une expérience technologique somme toute assez peu satisfaisante tant l’interface – en noir et blanc et sans icônes – est triste et desservie par le joystick trop petit et rigide. C’est ce dernier qui vous permettra d’utiliser le "menu" qui bénéficie d’un bouton dédié et vous permet de naviguer dans le livre : table des matières, chercher un mot, créer un marque-page…

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Tout est prévu pour adapter vos réflexes de lecteur à ce nouvel objet, et cela fonctionne assez bien. En revanche, le fameux Text-to-Speech qui a fait couler beaucoup d’encre ne séduira que les possesseurs d’une excellente oreille anglophone. De même, la prise de notes en marge sera sans doute utile à certains, mais ne suffit pas à justifier la présence du clavier (QWERTY bien sûr) qui prend beaucoup de place et n’est pas très facile à manier en raison de ses touches minuscules et assez dures. Soyons juste, celui-ci n’est vraiment utile que pour utiliser le navigateur web intégré, malheureusement inutilisables en France…

Pas de mystère sur les chances de lire des ouvrages dans sa langue maternelle : à service américain, lectures américaines. Amazon annonce fièrement 350 000 titres dans sa boutique. Nous ne les avons pas comptés, mais il est vrai que, pour qui lit l’anglais, le choix est impressionnant. La plupart des auteurs américains classiques et contemporains sont là, de Jane Austen à Paulo Coelho en passant par Dan Brown ou Harlan Coben. On peut trouver des œuvres d’Hugo ou de Zola voire même d’Amélie Nothomb, mais ce sont bien évidemment des traductions.

Du côté des magazines, à côté de Time et Newsweek, on trouve tout de même Le Monde et Les Échos à des tarifs mensuels intéressants (autour de 20 $) même s’ils sont bien sûr en noir et blanc. On ne peut qu’espérer que la disponibilité prochaine du Kindle en Europe soit l’occasion pour les éditeurs d’autoriser la numérisation de certains ouvrages, suivant en cela l’exemple du partenariat de la FNAC et de Sony (Le livre électronique de Sony bientôt compatible Mac).

My Support is rich !

Tellement léger et pratique, on a envie de l’emporter partout avec soi. C’est pourtant lors d’un vol long-courrier que nous avons vécu un drame : l’écran de notre Kindle a subi un choc léger le rendant inapte à la lecture. Impossible de le réparer en France ! Seule solution : le remettre à Amazon qui, généreusement, vous propose de racheter un Kindle « refurb » pour 50$ de moins que le neuf. Encore faut-il expédier le Kindle aux USA par vos propres moyens puisqu’Amazon refuse d’en prendre livraison ailleurs que dans les 50 États… Et ne pourra vous le renvoyer que là-bas, à vous de le faire réexpédier – à vos frais – en Europe. C’est à nos yeux le seul vrai point noir du Kindle, même si c’est en pleine connaissance de cause que nous avions commandé le nôtre lors d’un passage New York.

Toutes choses qui pourraient cependant s’améliorer avec cette distribution officielle du Kindle hors de ses frontières d’origine. On peut donc s’attendre à ce que le support technique se fasse enfin au niveau local. En revanche, si Amazon insiste sur la possibilité de télécharger un livre en quelques secondes et à tout moment moyennant une couverture 3G, c’est impossible sur la version que nous possédions, pas plus que de surfer, puisqu’elle est tributaire du réseau cellulaire Sprint qui est inaccessible ailleurs que dans les grandes villes américaines.

La présence d’un réseau radio n’est cependant pas indispensable : connecté au Mac par son câble le Kindle est vu comme une clé USB : il suffit d’aller sur le site d’Amazon.com – comme pour iTunes, il convient de s’inventer une adresse postale américaine qui ne sert à rien puisque tout se passe en ligne – et de payer les 9,99$ que coûte un livre avec sa carte Visa pour ensuite télécharger l’ouvrage de son choix et de le faire glisser vers son Kindle. Les heures de lectures virtuelles peuvent alors commencer.

En terme de tarifs de communication, les détails manquent encore, mais il semble que la version « internationale » qui sortira bientôt ne soit pour l’instant qu’un produit AT&T qui obligera donc à payer des frais de « roaming » pour l’utiliser en France. C’était le seul moyen pour Amazon de s’affranchir d’accords spécifiques avec les opérateurs GSM de tous pays – Apple et l’iPhone ont montré comme cela pouvait être fastidieux – mais devrait augmenter le prix de chaque « livre » de quelques dollars supplémentaires.

Comme le Guardian le relevait récemment, Amazon se retranche derrière des coûts de TVA et d’importation plus importants pour justifier cette différence. Un écart qui pourrait atteindre les 40% entre le prix d’achat pour un américain et celui facturé à un client à l’international. Il faudra de toute façon attendre le 20 octobre pour être fixé.

Conclusion : il ne lui manque que le français !

Nous avons lu plus d’une dizaine de romans sur le Kindle. Acheter le dernier livre à la mode sans avoir à se déplacer à la librairie, emporter des milliers de pages entre deux chemises dans une valise bien remplie : on devient vite accro ! Mieux encore, l’application iPhone (lire Le Kindle investit aussi l'iPhone) permet de retrouver ses livres directement dans sur cet appareil et même de poursuivre la lecture là où on l’avait laissée sur le Kindle. À voir si cette application va être maintenant disponible sur l'App Store Français.

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En résumé, pour qui est prêt à faire le choix du livre électronique, les seuls défauts du Kindle résident dans son origine purement américaine : en cette période de rentrée littéraire, on se prend à rêver à un succès international qui augmenterait enfin le choix des lecteurs et résoudrait les soucis de support… En attendant la tablette d’Apple ?


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