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Antidote Mobile : Le Petit Robert dans votre poche ?

Nicolas Furno

lundi 13 octobre 2008 à 11:31 • 10

Logiciel

Édité par Druide informatique, une compagnie canadienne, Antidote RX s’est imposé comme un correcteur orthographique de qualité disponible à la fois sur Mac, sur Windows et sur Linux. Druide propose maintenant Antidote Mobile qui se veut un équivalent sur iPhone et iPod Touch pour 15,99 euros. La déclinaison mobile tient-elle la promesse d’être « La plus grande référence du français » sur iPhone et iPod Touch ?

Présentation générale

Il faut préciser d’emblée que la version mobile d’Antidote ne propose pas de correcteur orthographique et grammatical comme pour la version ordinateur, mais se contente des dictionnaires et guides proposés dans Antidote RX. Il ne s’agit nullement d’un oubli, volontaire ou involontaire, de la part des développeurs, mais d’une limitation imposée par Apple aux développeurs iPhone : les applications ne peuvent pas tourner en tâche de fond ni interagir les unes avec les autres, ce qui serait nécessaire pour offrir un vrai correcteur.

Ainsi, Antidote Mobile propose uniquement du contenu divisé en deux groupes comme le présente l’écran d’accueil : Dictionnaires et Guides.

D’après la fiche de l’AppStore, Antidote Mobile contient en fait dix dictionnaires et dix guides différents. Les dictionnaires proposent 118 000 définitions (dont quelques noms propres), 33 000 locutions, un million de synonymes, 100 000 antonymes, 800 000 cooccurrences, 9 000 verbes totalement conjugués, 900 000 analogies, 15 000 familles de mots, 160 000 citations et des anagrammes. Antidote offre aussi un guide de conjugaison, d’orthographe, de ponctuation, de style, de rédaction, de typographie de syntaxe, un lexique, un guide de rectifications et enfin des « points de langue ». Ces dix dictionnaires et dix guides sont la copie exacte des dictionnaires et guides de l’application ordinateur.

Cette impressionnante liste tient entièrement dans les 88 Mo de l’application. Une fois téléchargée, l’application est donc entièrement autonome et ne nécessite plus de connexion Internet.

Avant de nous pencher plus en détail sur le contenu, étudions d’abord l’interface du logiciel.

L’interface

Antidote Mobile vous propose d’abord de choisir entre les dictionnaires et les guides. Si vous choisissez dictionnaire, une nouvelle fenêtre se présente avec les dix dictionnaires et un champ de recherche en haut. Tapez le mot recherché et une liste de propositions apparaît alors immédiatement.

Quand vous avez trouvé le mot recherché, cliquez simplement dessus. La liste des dictionnaires apparaît alors à nouveau, mais cette fois avec des numéros à côté de chaque dictionnaire. Ces numéros indiquent la présence ou l’absence du terme dans un dictionnaire en particulier et le nombre de mots ou définition le cas échéant. Dans cet exemple, le dictionnaire «Conjugaison» est bien sûr vide puisqu’il s’agit d’un nom commun et non d’un verbe.

Cliquez sur le dictionnaire choisi pour en voir le contenu. Par exemple, les définitions de « mot » sont présentées comme suit. Une pastille verte distingue les différents sens. En gris sont donnés quelques exemples, mais il ne s’agit pas de citations, regroupées dans le dictionnaire des citations.

Pour chaque mot du dictionnaire, un encadré jaune en haut à droite présente quelques informations supplémentaires : les différentes flexions du terme, un indice de fréquence et d’éventuelles remarques (anglicismes, homophones, etc.).

À tout moment, dans n’importe quel dictionnaire, on peut revenir à la liste en cliquant sur l’icône représentant des livres en haut à gauche. Pour passer d’un dictionnaire à un autre, on peut glisser le doigt vers la droite ou vers la gauche, comme avec les photos. On peut aussi lancer une nouvelle recherche en tapant dans la zone de recherche. Les deux flèches en haut à droite permettent de naviguer dans l’historique de recherche. Par ailleurs, tous les écrans sont orientables en paysage et l’on peut zoomer en utilisant la technique habituelle des deux doigts ou en double tapant l’écran comme pour Safari.

Tous les mots des dictionnaires peuvent être cliqués pour en avoir une définition. Par exemple, si l’on choisit le terme « groupe », une nouvelle fenêtre apparaît avec la définition. On pourrait alors cliquer sur un nouveau mot et ainsi de suite, sans limite.

Les guides se présentent un peu différemment. L’idée n’est pas ici de faire une recherche, mais de naviguer dans les différents guides. Quand vous ouvrez la partie guides, une fenêtre vous présente les dix guides, comme pour les dictionnaires.

Si vous savez quel guide vous voulez consulter, vous pouvez alors choisir le guide correspondant. Par exemple, si je cherche une explication sur l’accord du participe passé avec l’auxiliaire « avoir » : je choisis « Grammaire » puis « Participe passé » et enfin « Auxiliaire avoir ». La fiche s’ouvre alors. Vous pouvez zoomer/dézoomer et orienter l’écran dans les deux sens comme pour les dictionnaires, mais vous ne pouvez pas cliquer un terme pour accéder à son sens. Par contre, à tout moment, vous pouvez accéder aux dictionnaires en cliquant sur les livres, en haut. L’interface est sinon identique à celle des dictionnaires.

Mais si vous ne savez pas où se trouve l’information recherchée, il existe un index de toutes les fiches des guides. Cet index se présente comme pour la musique : une liste des fiches et à gauche la liste des lettres pour vous permettre d’accéder plus rapidement à une fiche en particulier. Notons que Druide a bien fait les choses en ne choisissant pas forcément le premier mot comme lettre de référence. Les fiches ayant souvent des titres longs, il se peut que le titre soit coupé en orientation verticale. Il suffit alors de tourner l’écran pour avoir les titres complets.

On peut cependant regretter qu’il n’y ait pas de recherche possible sur cet index. Il arrive que les informations recherchées se cachent dans une ou plusieurs fiches dont le titre n’indique pas clairement son contenu. Peut-être que cette fonction sera ajoutée dans une mise à jour ultérieure.

Les développeurs ont ajouté une fonction spécifique aux iPhone et iPod Touch  : secouez-le et Antidote vous proposera un nom propre choisi aléatoirement parmi les pays, les villes ou les personnages du dictionnaire. Un peu gadget, cette fonction est cependant assez amusante et donne lieu à quelques découvertes intéressantes.

Le contenu

La question que l’on est en droit de se poser avant d’acheter un dictionnaire, c’est celle de la richesse du contenu. Pour avoir une idée un peu plus précise sur le sujet, nous allons choisir quelques termes et comparer ce qu’offre Antidote par rapport à un dictionnaire de référence, Le Petit Robert (édition 2006). Mais avant cela, notons que Le Petit Robert ne propose « que » 60 000 mots contre 118 000 entrées pour Antidote. Cette importante différence doit être relativisée : les deux éditeurs comptent différemment (quand un mot peut être à la fois un nom commun ou un adjectif par exemple, Antidote compte deux entrées là où Le Petit Robert n’en compte qu’une).

Ceci étant, Antidote semble n’avoir pas à rougir face à son concurrent. Penchons-nous plus avant sur la question avec l’étude comparée de quelques mots. Nous étudierons d’abord en détail un mot courant « crise » et la conjugaison d’un verbe courant (« manger ») puis un mot plus rare et vieilli (« nonobstant ») et enfin un mot technique, spécifique à la géographie (« cuesta »).

Les dictionnaires

Antidote Mobile a beaucoup à dire sur le mot crise : 5 définitions, 85 synonymes, 476 cooccurrences, etc. Le Petit Robert propose de son côté une trentaine de lignes sur le même mot et trois sens différents, identifiés par un numéro. Les deux dictionnaires commencent par le sens médical et proposent une définition très proche où seul l’ordre des mots change vraiment. Vient ensuite le second sens du mot crise, au sens de « crise de nerfs » par exemple. Cette fois, la définition d’Antidote est un petit peu plus complète en précisant que la crise est provoquée par un « état nerveux ou psychologique » ou un « sentiment ». Enfin, le troisième sens donné par Le Petit Robert comme par Antidote est celui très courant aujourd’hui de « crise de société » ou « crise économique ». Là où Antidote sépare ces deux variantes en deux sens différents, Le Petit Robert les rassemble et fait de la crise économique une variante de la crise de la société, mais les deux sont très proches et ne diffèrent que par l’ordre des mots.

Mais Antidote ne s’arrête pas là et propose de compléter ces cinq définitions par d’autres dictionnaires. Le dictionnaire des locutions apporte trois sens (« crise de nerfs », « crise de foie » et « crise ministérielle ») avec à chaque fois une petite définition. Le Petit Robert n’ignore pas ses variantes, mais ne donne de définition que pour la dernière d’entre elles. Le dictionnaire des synonymes propose 85 entrées organisées selon des sens généraux (« gravité », « phase difficile », etc.). Le Petit Robert propose des synonymes pour chaque sens, mais pas autant qu’Antidote. Les deux dictionnaires proposent huit antonymes, mais pas les mêmes. Avec ses 476 cooccurrences, Antidote triomphe sans difficulté du Petit Robert qui n’en propose que quelques-uns. Antidote rend la recherche dans cette masse relativement simple par un classement selon la nature du mot qui accompagne le terme recherché (« Avec épithète », « Avec complément nominal », etc.). Le dictionnaire des familles propose six mots, tant des verbes (« criser ») que des noms ou adjectifs formés sur « crise » comme « épicrise » ou « criseux ». Le Petit Robert n’évoque que « criser » comme synonyme. Le dictionnaire des analogies d’Antidote est très intéressant et n’a pas d’équivalent dans Le Petit Robert : il s’agit en fait d’une liste de mots dont la définition contient « crise ». Nous sont ainsi proposés « dictateur », « de Gaulle », « épilepsie », etc. Antidote propose 15 citations là où Le Petit Robert n’en propose que trois, mais trois différentes de celles d’Antidote qui sont tirées tant de la littérature française que de la presse.

À chaque fois, un lien permet de se rendre sur la source de la citation via Safari, ce qui serait vraiment pratique si les liens renvoyaient effectivement à la citation et pas seulement à la source. Enfin, Antidote propose 13 anagrammes formées à partir des lettres du mot « crise ».

Ce long examen révèle deux choses : d’une part, le dictionnaire d’Antidote n’a pas à rougir face à son concurrent bien connu. Toutes les définitions y sont et ne changent en général que par l’ordre des mots. D'autre part, Le Petit Robert a une présentation plus synthétique (trois sens contre cinq pour Antidote ou encore intégration des synonymes juste après les sens) mais aussi moins claire. Ainsi, la majeure partie de ce que propose Antidote peut être retrouvée dans Le Petit Robert mais le contenu est alors un peu noyé dans la masse. Revers de la médaille pour le dictionnaire numérisé  : il faut naviguer entre les dictionnaires pour avoir une vision complète du mot.

Regardons maintenant ce que propose Antidote pour la conjugaison du verbe du premier groupe « manger ». Le tableau de conjugaison proposé par Antidote est des plus classiques : les temps sont regroupés par mode (indicatif, subjonctif, conditionnel impératif, participe) et à chaque fois, toutes les formes sont proposées. Le Petit Robert propose aussi, à la fin, des conjugaisons pour chaque grand type de verbes. Dans notre exemple, regardons le verbe « bouger » qui se conjugue de la même façon que « manger ». On retrouve la division selon les modes, mais contrairement à Antidote, tous les temps y sont, même les temps composés (plus-que-parfait, conditionnel passé, etc.) : seul change alors la conjugaison de l’auxiliaire être ou avoir selon le verbe.

Antidote fait cette économie-là et demande donc à consulter deux voire trois conjugaisons différentes si l’on souhaite avoir l’équivalent complet du Petit Robert. Mais en contrepartie, on n’a plus à se demander dans quel groupe appartient le verbe que l’on cherche à conjuguer : c’est une source d’erreur en moins.

Sur le terme « nonobstant », là où Le Petit Robert rassemble la définition de la préposition et de l’adverbe, Antidote propose deux fiches différentes. De ce fait, on doit naviguer entre les deux, sauf, bien sûr, à savoir d’emblée si l’on souhaite l’un ou l’autre. Les deux dictionnaires proposent plutôt des synonymes que de vraies définitions. Pour l’adverbe, les deux mêmes mots (« cependant » et « néanmoins ») sont proposés, par contre pour la préposition, Antidote se contente d’un synonyme (« malgré ») alors que Le Petit Robert propose une vraie définition et un second synonyme (« dépit »). Antidote se rattrape sur le nombre de synonymes proposés dans le dictionnaire ad-hoc : neuf pour la préposition, onze pour l’adverbe. Antidote est moins bon sur les citations : trois sont proposées pour l’adverbe, mais de la même source journalistique, et aucune pour les prépositions alors que Le Petit Robert en propose une pour chaque. Par ailleurs, il manque à Antidote l’origine étymologique du terme, ce que propose Le Petit Robert.

Le terme « cuesta » est un terme technique de la géographie physique. Les deux dictionnaires, généralistes, donnent très peu d’éléments sur ce terme, ce qui est normal. Tous deux proposent une définition : celle du Petit Robert est plus précise que celle d’Antidote, très approximative. Par contre, Antidote renvoie au mot « front » par les analogies, ce qui est très intéressant (on parle de « front de cuesta »). Étonnamment, Antidote ne fait aucun renvoi au terme « côte » (« cuesta » signifie « côte » en espagnol), alors que Le Petit Robert le signale comme synonyme.

Les guides

Les guides d’Antidote Mobile n’ont pas vraiment d’équivalents dans Le Petit Robert. Comparons donc, sur un exemple, Antidote avec une référence en matière de guide de français, Le français correct par Grevisse (cinquième édition, 1998).

Regardons par exemple le problème de l’accord du participe passé. Dans Antidote, soit vous connaissez l’emplacement des informations et vous vous y rendez directement, soit vous pouvez utiliser l’index. À la lettre « P » se trouvent bien les articles autour du participe passé, mais la présentation n’est pas des plus évidentes. Dans le Grevisse, il faut aussi utiliser l’index qui indique les articles concernant le participe passé. Ils sont tous rassemblés ce qui facilite les choses.

Sur le contenu des deux guides, notons qu’Antidote a une démarche plus généraliste en offrant des règles générales avec leurs exceptions, alors que le Grevisse cherche plutôt à donner une réponse directe à un problème précis. Ainsi, des articles concernent exclusivement deux ou trois participes passés (« Fini » ou « Étant donné » par exemple). Antidote propose aussi quelques fiches de ce genre, mais privilégie une vision plus générale.

Dans l’ensemble, les mêmes thèmes sont abordés par les deux : les deux guides commencent par une règle générale, tous deux traitent des grandes exceptions et donnent de nombreux exemples. Le Grevisse est sans doute un petit peu plus complet, surtout sur quelques points bien précis (l’imparfait du subjonctif par exemple) mais les guides d’Antidote n’ont vraiment pas à rougir et apportent une aide précieuse pour qui veut rédiger du français correct.

Antidote propose également quelques fiches pratiques sur divers sujets : les homophones (ai/ait/est, ce/se, voir/voire, etc.), mais aussi quelques points de langue parfois très utiles, mais encore des aides à la rédaction (formules de politesse, etc.). Tout ceci peut être très utile, que ce soit pour vérifier un point précis ou pour apprendre.

Conclusions

Antidote Mobile est un excellent dictionnaire de français, le meilleur sur iPhone et iPod Touch mais ça n’est pas difficile étant donné qu’il est le seul à ce jour. Face à la concurrence des dictionnaires généralistes, comme Le Petit Robert, il ne perd pas de son intérêt, bien au contraire. Sur des termes courants, Antidote fait souvent mieux que Le Petit Robert en apportant plus de citations, plus de synonymes et par le système très ingénieux des cooccurrences. Le Petit Robert ne reprend l’avantage que sur des termes plus rares, parce que vieillis ou techniques. La division d’Antidote en dix dictionnaires permet d’offrir un contenu dense tout en conservant une grande lisibilité, mais contraint aussi à beaucoup de manipulations là où Le Petit Robert rassemble toutes ses données.

Si Antidote Mobile ne peut concurrencer des dictionnaires spécialisés (Grand Robert, dictionnaire des synonymes, des citations, etc.), il concurrence sans conteste un dictionnaire généraliste.

Dictionnaire numérique, Antidote Mobile en a les avantages (tous les mots sont des liens ce qui permet une passionnante exploration de la langue) mais pas les inconvénients  : on peut ainsi très facilement utiliser Antidote en parallèle avec une autre application sans avoir à passer de l’une à l’autre sur son Mac ou PC. Dictionnaire de poche, Antidote est disponible en permanence et vous permet de vérifier rapidement un sens ou un élément de la langue française. Son prix peut sembler élevé pour une application iPhone/iPod Touch, mais au regard de ce qu’elle offre, ce prix semble finalement raisonnable (les versions papiers et numériques du Petit Robert sont bien plus coûteuses par exemple).

Antidote Mobile donne une nouvelle dimension aux iPhone et iPod Touch en leur permettant de devenir de véritables dictionnaires de poches. L’application n’est certes pas parfaite : elle connaît notamment quelques lenteurs qui, sans rendre l’application désagréable au quotidien, gagneraient à être effacées, dans une future mise à jour peut-être. Mais elle est suffisamment performante et confortable pour permettre une utilisation poussée de ses dictionnaires et guides à n’importe quel moment.

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