Si la consolidation du marché des télécoms est à l'arrêt en France, les rapprochements et les fusions ont débuté à l'échelle européenne. Et les acteurs hexagonaux sont gourmands, à l'image d'Iliad et de son remuant fondateur, Xavier Niel, qui a tenté un coup en Italie avec une offre pour la filiale locale de Vodafone — c'est finalement tombé à l'eau. Pas de quoi décourager le milliardaire, qui se dit « à l'affût de tout » dans Capital.
« Chez Free, on a fait une carte d’Europe avec tous les pays où on est et ceux dans lesquels on veut s’implanter », explique-t-il encore. L'opérateur et Xavier Niel à titre personnel sont présents d'une manière ou d'une autre en Suisse avec Salt, en Irlande avec Eir, en Pologne avec Play, à Monaco avec Monaco Telecom, et bien sûr en Italie sous la marque Iliad. L'homme d'affaires lorgne maintenant l'Allemagne, où O2 pourrait être cédé par Telefonica dont l'opérateur détient 60 % du capital. Le marché espagnol intéresse également Xavier Niel, mais il n'est pas le seul Français à faire preuve d'appétit.
Patrick Drahi, le propriétaire de SFR (et de Portugal Telecom), a aussi des vues sur le marché européen au sens large, puisqu'il possède 18 % du capital de British Telecom. Il lui faudrait 20 milliards d'euros pour obtenir le contrôle à 100 % du géant britannique, ce qui n'est pas pour lui faire peur. Après tout, son groupe Altice est endetté à hauteur de 50 milliards, alors un peu plus, un peu moins… Même si les conditions de marché sont moins favorables avec la remontée des taux.
De son côté, Vincent Bolloré joue les mouches du coche avec sa participation de 24 % dans TIM (Telecom Italia), en concurrence directe avec Iliad. L'industriel breton, qui a investi dans l'opérateur en 2015, voulait se rapprocher de Telefonica, voire d'Orange en France, et créer ainsi un poids lourd européen. Pour le moment, ça n'a rien donné.
Quant à Martin Bouygues, il reste persuadé qu'il y a un coup à jouer en France, en rapprochant Bouygues Telecom d'Orange. L'opérateur historique avait failli acquérir l'activité télécoms du groupe de BTP en 2016 (ce qui aurait permis à Martin Bouygues de devenir actionnaire de référence), mais là aussi l'affaire a capoté.
Enfin, n'oublions pas Orange qui a cherché, à deux reprises, une fusion avec des opérateurs européens : Deutsche Telekom en Allemagne, puis Vodafone au Royaume-Uni. À chaque fois, l'État — majoritaire au capital de l'entreprise — a fait échouer ces projets. Mais qui sait, peut-être qu'avec la nouvelle direction qui va remplacer Stéphane Richard, les choses vont évoluer.
Arthur Dreyfuss, le directeur général d'Altice, l'affirme en tout cas : « D’ici cinq à dix ans, les 85 opérateurs européens seront détenus par cinq à huit grands groupes ». Combien d'entre eux seront français ?