De Bobo-Dioulasso (Burkina Faso) — Acte II de la stratégie de développement d'Orange en Afrique. Après avoir multiplié les acquisitions et les prises de participation, l'opérateur français impose maintenant sa marque. Ses filiales marocaines et égyptiennes ont pris son nom, les filiales libériennes et sierraléonaises le feront prochainement — et sa filiale burkinabé vient de le faire. Dans les rues de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso, et partout dans le pays, le « A » de Airtel laisse place au carré d'Orange.
Le groupe indien Bharti Airtel a décidé de se désengager de la Sierra Leone et du Burkina Faso : Orange, qui cherche au contraire à renforcer sa présence en Afrique, s'est portée acquéreur de ses filiales locales. À travers son réseau cellulaire et surtout ses services de paiement, l'opérateur français ambitionne d'être un « moteur de la transformation numérique » du continent. Et compte bien profiter de l'explosion du marché africain du mobile, au moment où le marché européen commence à ralentir.
« L’Afrique vit en décalé, mais en accéléré, les mutations que l’on a connu ailleurs », explique Bruno Mettling à La Croix. « En Europe, nous avons mis dix ans pour passer de la 3G à la 4G. En Afrique, cela s’est passé en 3 ou 4 ans » ajoute le directeur d’Orange pour l’Afrique et le Moyen-Orient. Les investissements de l'opérateur français, qui souhaite prendre une stature internationale du calibre de celle d'Airtel ou de Vodafone, apparaissent donc comme stratégiques.
Avec 4,6 millions de clients, Airtel est le deuxième opérateur du Burkina Faso qui compte 18 millions d'habitants, dont 80 % sont équipés d'un téléphone mobile. Outre son réseau « 3,75 G », déployé dans les principales villes et près de 100 localités, l'opérateur possède des services financiers qui étaient déjà connectés « avec Orange Money dans les pays avoisinants ».
Mais les clients Airtel font désormais partie de la « grande famille » d'Orange, pour reprendre les mots de la campagne de publicité lancée le 19 mars par l'opérateur français. Depuis, les vendeurs sont affairés à repeindre leurs échoppes Airtel : bientôt, le paysage burkinabé ne sera plus ponctué de ces petits points rouges qui proposaient téléphones, recharges, et transferts financiers.
« Orange et noir, ce n'est pas très joli », dit un chauffeur de taxi, et « cela coûte beaucoup d'argent », ajoute un vendeur. Les clients se plaignent de problèmes de connexion, sans qu'il soit possible de faire la part des choses entre de réelles instabilités dues au transfert, et une mauvaise foi à peine voilée. Mais ils ont raison de craindre une montée des prix, comme le prouve le cas guinéen. Au moins ne paieront-ils plus de frais d'itinérance, puisqu'ils ont été abolis entre le Burkina Faso et la Côte d’ivoire (où réside une importante diaspora), la Guinée, le Mali, le Sénégal, la Sierra Leone, et le Togo.