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C’est quoi, la 5G ?

Anthony Nelzin-Santos

samedi 25 février 2017 à 16:00 • 58

Télécoms

« 5G », c’est le mot qui sera sur toutes les lèvres pendant le Mobile World Congress, qui ouvrira ses portes ce lundi 27 février à Barcelone. Et pour cause : l’Union internationale des télécommunications (UIT) commence à codifier les standards de cinquième génération, les opérateurs et les fabricants commencent à travailler sur les premières démonstrations, et — surtout — la 5G possède désormais un logo. Faisons le point.

C’est quoi, la « cinquième génération » ?

Les standards de réseaux de téléphonie mobile peuvent être regroupés en « générations », qui se succèdent tous les dix ans environ (lire : 3G, H+, 4G LTE : un guide des normes réseau). Si l’on parle depuis longtemps de « 4G », les véritables réseaux de quatrième génération commencent tout juste à être déployés. Si l’on commence tout juste à parler de « 5G », les premiers réseaux de cinquième génération ne seront donc pas déployés avant plusieurs années.

D’autant que la définition exacte d’un réseau de cinquième génération doit encore être écrite. Selon le calendrier établi par l’UIT, l’agence des Nations unies chargée des technologies de l’information et de la communication, l’industrie est encore dans une phase de « préparation du terrain ». Après avoir choisi le nom et le logo de cette nouvelle génération, elle a lancé des pistes de recherche et de premières études, tout en menant un inventaire des ressources en spectre électromagnétique et en mettant en place les cadres techniques et décisionnels nécessaires.

Quand est-ce que la 5G sera définie ?

La phase de « définition » proprement dite n’est pas censée commencer avant 2018 et s’achever avant 2020, mais dans les faits, ce MWC va sans doute marquer un point d’inflexion. Le grand public en a l’image d’un salon où les fabricants en vogue viennent présenter leurs nouveautés, mais il s’agit d’abord et avant tout d’un lieu et d’un moment de discussions et de tractations unique dans l’année, et tout concourt à ce que la 5G soit au centre de ces discussions.

Le calendrier du processus de standardisation des réseaux de cinquième génération (norme IMT-2020). Image UIT.
Le calendrier du processus de standardisation des réseaux de cinquième génération (norme IMT–2020). Image UIT.

Reste qu’il sera toujours prématuré, à l’issue du MWC, de parler de « 5G ». Les expérimentations menées par les fabricants, au premier rang desquels Ericsson, et les opérateurs, notamment Orange et NTT Docomo, ne sont rien d’autre que des expérimentations. Pendant que les départements marketing jouent des effets de manche, allant même jusqu’à promettre que les premiers réseaux 5G seront déployés dès l’année prochaine, les ingénieurs s’éreintent à éprouver les technologies qui pourraient faire partie du standard.

Quelles technologies ?

Les recherches portent essentiellement sur l’emploi des ondes centimétriques et millimétriques. Différentes technologies de communication radioélectrique utilisent différentes fréquences, dont la longueur d’onde sert de base à leur catégorisation en bandes :

  • la radio AM utilise les ondes hectométriques de la bande des « moyennes fréquences » (MF), entre 300 kHz et 3 MHz ;
  • la radio FM utilise les ondes métriques de la bande des « très hautes fréquences » (THF), entre 30 et 300 MHz ;
  • la télévision, les réseaux cellulaires, le Bluetooth, ou encore le GPS utilisent les ondes décimétriques de la bande des « ultra hautes fréquences » (UHF), entre 300 MHz et 3 GHz.

Les ondes centimétriques appartiennent à la bande des « super hautes fréquences » (SHF), entre 3 et 30 GHz, dans laquelle on trouve déjà le Wi-Fi à 5 GHz ou la télévision par satellite. Les ondes millimétriques appartiennent à la bande des « extrêmement hautes fréquences » (EHF), entre 30 et 300 GHz, utilisée de manière très ponctuelle. Or de manière très générale, on peut dire que plus la fréquence d’une onde est grande, plus elle permet de transmettre de données.

Les ondes électromagnétiques. Image Orange.
Les ondes électromagnétiques. Image Orange.

Le passage aux ondes centimétriques, voire millimétriques, ouvre la voie à la conception de réseaux capables de transférer des données à plusieurs (dizaines de) Gbps. Voilà pourquoi l’UIT a d’ores et déjà établi une liste des bandes de fréquences SHF et EHF qui pourraient être utilisées par des réseaux cellulaires, et que la FCC a déjà commencé à attribuer des licences et des autorisations d’exploitation aux opérateurs américains.

Ces ondes n’ont toutefois rien du miracle : leurs immenses qualités sont balancées par d’immenses défauts, qui expliquent qu’elles n’aient pas été utilisées plus tôt. La simple augmentation du taux d’humidité peut faire chuter la portée d’un émetteur EHF — imaginez alors qu’il pleuve ! Or la portée des ondes millimétriques est déjà très faible, de l’ordre de quelques centaines de mètres, là où les ondes hectométriques peuvent porter sur plusieurs centaines de kilomètres.

Un réseau cellulaire utilisant les ondes millimétriques devrait donc comporter un très grand nombre d’antennes, un inconvénient que la recherche compte transformer en avantage. Avec le beam tracking, d’abord, qui permet de « viser » un appareil pour lui offrir une connexion fiable. Avec le massive MIMO, ensuite, qui permet de regrouper un très grand nombre d’antennes pour offrir une connexion rapide. Plus petites et plus efficaces, les antennes devraient être plus faciles à installer.

Donc la 5G, ce sont les ondes millimétriques, en fait ?

Oui… mais non. L’intérêt de l’industrie pour les ondes millimétriques, peu utilisées et peu réglementées, est indéniable : NTT Docomo et Verizon travaillent sur la bande des 28 GHz, tandis que Nokia planche sur la bande des 73 GHz. Mais la recherche sur les ondes centimétriques est beaucoup plus avancée : le spectre sous les 6 GHz est beaucoup plus encombré et entièrement régi par des licences, mais ses applications concrètes sont beaucoup plus immédiates. Qualcomm, notamment, promeut une forte interaction avec la 4G LTE-A (jusqu’à 2,6 GHz) et le Wi-Fi (2,4 et 5 GHz).

Les aires de développement de la 5G. Image Qualcomm.
Les aires de développement de la 5G. Image Qualcomm.

Surtout, il y a fort à parier que les fabricants et les opérateurs n’attendront pas que les standards de cinquième génération soient parfaitement définis pour commercialiser des « réseaux 5G ». Ils avaient refusé de vendre l’EDGE comme un réseau de troisième génération (ce qu’il était), mais ont vendu la LTE comme un réseau de quatrième génération (ce qu’elle n’est pas), leur intérêt commercial l’emportant sur les considérations techniques.

L’UIT a toutefois décidé d’intervenir très en amont pour poser quelques fondations. Son dernier « brouillon », qui doit servir de base à la rédaction d’une spécification définitive d’ici à la fin de l’année, définit ainsi les grands traits des réseaux de cinquième génération :

  • les opérateurs devront posséder des blocs de fréquence de 100 MHz au moins, ce qui est encore possible dans la bande SHF, et passer à 1 GHz le plus rapidement possible, ce qui demandera de passer à la bande EHF ;
  • les relais devront fournir un lien descendant à 20 Gb/s et un lien montant à 10 Gb/s, liens qui seront partagés entre les utilisateurs connectés ;
  • mais chaque utilisateur devra bénéficier d’au moins 100 Mb/s en descendant et 50 Mb/s en montant ;
  • y compris en se déplaçant à 500 km/h ;
  • sachant que le réseau devra être capable de prendre en charge un million d’appareils par kilomètre carré ;
  • grâce à une meilleure efficacité spectrale (30 bits/Hz en descendant et 15 bits/Hz en montant en MIMO 8x4)
  • et une meilleure efficacité énergétique (réponse au changement de conditions en moins de 10 ms).

Ces spécifications montrent que l’UIT ne pense pas seulement aux smartphones et tablettes, mais aussi aux objets connectés, à un moment où l’industrie pense aux passerelles entre Bluetooth, Wi-Fi, et réseau cellulaire.

Au fait, que devient la 4G ?

En attendant que les réseaux de cinquième génération soient standardisés, et a fortiori déployés, les réseaux de quatrième génération devront être perfectionnés. Les fabricants et les opérateurs travaillent à une utilisation plus systématique du MIMO et de l’agrégation de bandes, qui permettent de cumuler les ressources pour améliorer la fiabilité et la rapidité du réseau.

De la 4G à la 5G. Image Qualcomm.
De la 4G à la 5G. Image Qualcomm.

Mais ils planchent aussi sur de nouvelles technologies comme la 4G LTE-U, de la 4G LTE dans les bandes sans licence (unlicensed) notamment utilisées par le Wi-Fi à 5 GHz, et la 4G LTE-A Pro, qui doit enfin dépasser le gigabit. Ces évolutions doivent appuyer le déploiement de la 5G comme les évolutions de la 3G ont soutenu l’installation de la 4G, et surtout permettre la conception de nouveaux réseaux de quatrième génération complémentaires des futurs réseaux de cinquième génération.

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