Numericable-SFR a bel et bien l’intention de s’offrir Bouygues Telecom. La rumeur d’hier — étayée par des sources du JDD — se confirme par le biais d’un communiqué de presse laconique d’Iliad : la maison-mère de Free Mobile annonce être entrée en « négociations exclusives » avec Numericable-SFR pour l’acquisition d’un « portefeuille d’actifs » lié à « l’offre remise par Altice en vue de l’acquisition de Bouygues Telecom par Numericable-SFR ». On ne saurait être plus clair : les grandes manœuvres ont donc débuté dans le secteur de la téléphonie en France avec comme horizon, un retour à trois opérateurs. Bouygues a aussi confirmé avoir reçu l’offre d’Altice une offre « non sollicitée d'entrée en négociations pour la cession de Bouygues Telecom ». Le communiqué de l’opérateur explique aussi qu’« aucune négociation n’est en cours ».
Iliad précise que l’opération de cession reste « subordonnée à la négociation des accords définitifs et à l’acceptation par Bouygues de l’offre d'acquisition ». Le conseil d’administration de Bouygues doit se réunir ce mardi pour faire le point sur cette proposition.
Free Mobile pourrait, par le biais de cette acquisition, récupérer des antennes, des fréquences et des boutiques : de quoi muscler sérieusement un réseau qui reste toujours en retrait malgré de gros efforts ces derniers mois pour activer des antennes 4G (lire : Free : l’opérateur qui monte, qui monte…). Ces actifs font partie des contreparties d’Altice pour s’attirer les faveurs du régulateur : l’entité Numericable-SFR et Bouygues Telecom deviendrait certes le premier opérateur en France (ce qui serait conforme avec la volonté de Patrick Drahi), mais au prix de plusieurs concessions d’importance. L’an dernier, alors que Bouygues Telecom voulait empocher SFR, la cession de certains actifs à Free Mobile aurait coûté 1,8 milliard d’euros au trublion. Il est possible que la somme demandée par Numericable-SFR soit dans ces eaux-là même si la rumeur annonce un montant plus important. Quoi qu’il en soit, cela reste une très bonne affaire pour Free.
Le volet social sera particulièrement important pour faire plier le gouvernement. Orange aurait ainsi accepté de prendre sous son aile plusieurs centaines de salariés de Bouygues (pour quelles contreparties ?), mais la crainte de casse sociale est très présente. Emmanuel Macron, le ministre de l’Économie, a déclaré hier qu’il ne voulait pas d’une consolidation sur le secteur : « L’emploi, l’investissement et le meilleur service aux consommateurs sont les priorités. Or les conséquences d’une consolidation sont à ces égards négatives, comme l’ont prouvé les cas récents en Europe ».
Toutefois, le gouvernement ne pourra sans doute pas grand chose pour freiner Patrick Drahi dans sa quête effrénée des parts de marché. Tout comme il n’avait pas su pousser SFR dans les bras de Bouygues l’an dernier… Le Meccano du marché des télécoms se poursuit donc, chacun espérant qu’il ne s’agit pas d’un jeu de dupes.