Les abonnés comme les associations de consommateurs ont pu s'en rendre compte à de nombreuses reprises : Free Mobile réduit le débit de ses clients en itinérance sur le réseau d'Orange, que l'opérateur loue lorsque son propre réseau 3G ne couvre pas le lieu où se trouve l'abonné. Cela provoque des ralentissements qui transforment l'expérience utilisateur en cauchemar (lire par exemple Mes vacances avec Free Mobile). Une des solutions trouvées par les plus malins est d'en passer par un VPN pour tromper Free, auquel cas les débits redeviennent comme par miracle conformes aux attentes.
Bouygues Telecom a décidé de se lancer dans une nouvelle bataille judiciaire contre Free, en portant plainte contre le trublion du paysage français de la téléphonie pour « pratique commerciale trompeuse », rapportent Les Echos. Bouygues reproche à Free de brider le débit de ses abonnés avant qu'ils aient atteint les 3 Go de données, seuil qui déclenche le bridage effectif du débit. Free mentirait à ses clients en ne respectant pas son engagement.
L'assignation de Bouygues Telecom est très claire : « Il est désormais établi que lorsque Free Mobile utilise le réseau d’Orange, Free Mobile réduit drastiquement le débit de ses clients sur certains services identifiés, alors même que ces derniers n’ont pas atteint le seuil de consommation qui leur est fixé ». Bouygues avance plusieurs preuves pour appuyer son propos, notamment des relevés de performance concernant les plus gros téléchargeurs (de vidéos, par exemple) : une étude Directique explique ainsi que le temps de téléchargement d'une vidéo est supérieur à 12 heures chez Free en itinérance Orange, alors qu'il n'est que de 7 secondes (!) sur le réseau propre de Free.
Ce bridage délibéré serait une manière pour Free de ne pas faire exploser la facture d'Orange : l'accord qui lie les deux entreprises consiste à rémunérer Orange selon le volume de données consommé par les abonnés de Free de son réseau. Plus ces derniers consomment de données sur le réseau d'Orange, plus cela coûte cher à Free. Les sommes évoquées oscillent entre 500 à 700 millions d'euros, reversés chaque année à l'opérateur historique. Mais si Free devait offrir la qualité de service à laquelle il s'est engagé, ce dernier devrait payer bien plus cher à Orange… Il serait donc amené à revoir ses tarifs.
Stéphane Soumier, rédacteur en chef de BFM Business, explique sur Twitter qu'« en off », Free ne dément pas le bridage dénoncé par Bouygues. Par contre, l'opérateur « fait porter la responsabilité sur Orange qui cape son débit ». Une ligne de défense qui pourrait être celle de Free devant le tribunal de commerce, mais tiendra t-elle la route ? Bouygues chiffre son préjudice à 100 millions d'euros.