Microsoft était manifestement prêt à faire beaucoup de concessions pour que le Xbox Cloud Gaming — la composante « jeu en streaming » du Game Pass — puisse être distribué sur l'App Store. Selon des correspondances (déterrées par The Verge) issues de la masse de documents versée dans le cadre du procès entre Epic et Apple, Microsoft avait planché sur la possibilité de distribuer chaque jeu en solo, comme le désirait la Pomme.
Autrement dit, il aurait été possible de télécharger une app Forza Horizon 5 et une autre app Halo Infinite dans la boutique d'Apple et d'y jouer en streaming depuis les fermes de serveurs de Microsoft. Mieux encore, l'éditeur avait même accepté d'offrir aux utilisateurs iOS des jeux AAA normalement exclusifs à la plateforme Xbox. Mais finalement, le deal n'a pas eu lieu et à la place, Microsoft propose une web app depuis Safari — à laquelle il n'y a pas grand chose à reprocher, mais elle est moins bien intégrée qu'une app native.
Aperçu du Xbox Cloud Gaming sur iOS et macOS
C'est en février 2020 que Microsoft prend le problème iOS à bras le corps. L'idée de distribuer autant d'apps qu'il y a de jeux compatibles avec le Xbox Cloud Gaming effraie : ce sont potentiellement des centaines d'applications qu'il va falloir gérer et mettre à jour. Un cauchemar logistique et technique ! Il se pose aussi un souci ergonomique pour les utilisateurs. Tori Wright, responsable du développement de l'activité Xbox, écrit qu'une telle proposition provoquera « de la frustration et de la confusion pour les consommateurs », conséquence d'une « expérience dégradée ».
Un mois plus tard, changement de pied : finalement, Microsoft se dit partant pour multiplier les applications, pour autant que celles-ci soient des raccourcis, des coquilles vides qui fonctionnent avec le moteur de streaming présent dans la seule application Game Pass. L'intérêt, c'est que l'app Game Pass pèserait 150 Mo, et chaque app supplémentaire 30 Mo seulement. S'il faut intégrer la pile streaming dans les apps de jeu, leur poids sera de 150 Mo chacune.
Autre avantage : il suffit de mettre à jour une seule app (Game Pass) pour que tous les jeux en profitent. Sur le papier, ça peut marcher et sur le principe, c'est ce que réclame Apple : une app par jeu. Mais en septembre dernier, lorsque la Pomme pose ses conditions pour accepter les services de jeux en streaming, patatras, Microsoft déclare qu'il s'agit d'une « mauvaise expérience pour les joueurs » et que les utilisateurs ne devraient pas être forcés de télécharger plus de 100 jeux.
Apple autorise les services de jeux vidéo en streaming, à ses conditions 🆕
Que s'est-il passé ? C'est un peu confus. Apple a exigé que chaque jeu du Xbox Cloud Gaming intègre la pile streaming au complet. Cette exigence s'est avérée « irréaliste » pour le support et l'ingénierie, et l'expérience pour les joueurs aurait été « incroyablement négative » pour les clients, explique Kareem Choudhry, vice-président Xbox Cloud Gaming, à The Verge.
Toutefois, en avril, Microsoft a semblé prêt à céder au caprice d'Apple, en lançant le développement d'une solution pour intégrer le moteur de streaming dans chaque app. Restait le problème des achats intégrés : les jeux du Xbox Cloud Gaming sont aussi des boutiques qui vendent du contenu supplémentaire. L'éditeur voulait gérer ces in-apps avec son propre système, en s'arrangeant avec Apple pour que ce dernier y trouve son compte.
L'idée n'était pas d'empêcher Apple de recevoir sa part des achats intégrés, c'était d'éviter l'intégration redondante d'API, a expliqué Mark Grimm, le responsable jeux de l'App Store. Mais rien à faire, Apple est resté droit dans les bottes de ses guidelines. L'entreprise confirme au site que la proposition de Microsoft ne respectait pas l'exigence d'utiliser le système de paiement de l'App Store.
Le son de cloche est cependant différent du côté de Microsoft, qui précise que le rejet par l'App Store du streaming du Game Pass n'est pas lié aux gros sous. « Nous proposons Xbox Cloud Gaming via une application unique sur le Play Store d'Android, sans les achats intégrés », déclare Kareem Choudhry, « et nous ferions pareil sur l'App Store si nous le pouvions ».
Tout n'est cependant pas perdu, car si Microsoft s'est rabattu sur la solution en ligne via Safari, l'éditeur continue de chercher une « résolution viable » qui lui permettrait d'accéder à l'App Store.