« Restaurer la liberté de choix du consommateur en matière de paiements mobile sans contact », c'est l'objectif d'une proposition de loi déposée en novembre dernier qui vise spécifiquement Apple. Le député LREM Pierre-Alain Raphan veut mettre fin à la domination d'Apple Pay sur iPhone.
« Le but n'est pas de faire de l'anti-GAFA par principe mais d'avoir le choix dans les outils qu'on utilise, assure le député au JDN. Quand je veux payer, je dois pouvoir choisir mon opérateur de paiement sans contact. Il existe plusieurs acteurs en France et en Europe. »
La proposition de loi prévoit par exemple que « le terminal mobile ne contient, lors de sa première vente au consommateur, aucune application de paiement préinstallée liée au groupe du fournisseur de système d'exploitation. » Or, l'application Wallet est installée par défaut sur iPhone et Apple pousse même à enregistrer une carte bancaire lors de la configuration initiale.
Si elle était adoptée telle quelle, cette loi ne s'appliquerait qu'aux systèmes qui comptent plus de deux millions d'utilisateurs en Europe. Pierre-Alain Raphan voit dans cette disposition un moyen de mettre carte sur table. « Comme on veut jouer avec les mêmes règles du jeu, cela forcerait les GAFA à être transparents », explique-t-il, alors qu'Apple ne communique pas le nombre d'utilisateurs d'Apple Pay, mais qu'il ne fait aucun doute qu'il est supérieur à deux millions sur le Vieux Continent.
L'Union européenne s'est pourtant déjà emparée du sujet avec le Digital Services Act (DSA) et le Digital Market Act, deux textes visant à réguler les grands acteurs du numérique, notamment en matière de concurrence, qui doivent être adoptés début 2022. À quoi sert alors une proposition de loi franco-française ? « On a commencé à discuter de ces sujets-là il y a environ 9 mois, nous n'avions pas le DSA en tête, indique le député au JDN, alors que ce texte est pourtant prévu depuis plus longtemps. Nous aimerions profiter de la transcription en droit français du DSA pour appliquer toutes ces dispositions. Si je sens que dans le trimestre, il n'y a pas les garanties nécessaires au niveau européen, on profitera d'une niche parlementaire dans le semestre.» Pierre-Alain Raphan affirme que sa proposition est « aboutie » et qu'il n'y a pas de risque politique, car « cela va dans le sens de l'histoire. »
Loi franco-française ou non, Apple Pay est sous le coup d'une enquête de la Commission européenne pour abus de position dominante. Bruxelles s'intéresse à trois points : les conditions imposées pour l'intégration d'Apple Pay dans les apps et sites web sur iPhone/iPad ; la limitation de l'utilisation de la NFC de l'iPhone pour les paiements mobiles ; et des refus allégués d'accès à Apple Pay.
Apple s'est défendue début décembre lors d'une table ronde en soutenant que son service contribuait à la concurrence du secteur bancaire et en minimisant son importance sur le marché européen. Jennifer Bailey, la responsable du service, a également rappelé que des méthodes de paiement étaient exploitables librement sur iPhone, notamment les codes QR. Mais pour tirer parti de la NFC de l'iPhone, Apple Pay est un passage obligé. En Allemagne, une loi votée fin 2019 contraint Apple à ouvrir la NFC de l'iPhone. Après son adoption, les banques ont fait volte-face en adoptant finalement Apple Pay.