Cernée de toutes parts sur une gestion de l'App Store jugée anticoncurrentielle, Apple va très bientôt lâcher du lest en réduisant sa commission à 15 % pour les petites entreprises (qui n'oublieront pas d'en faire la demande). Apple va-t-elle également assouplir ses conditions autour d'Apple Pay ? La question se pose sérieusement, car la technologie de paiement est elle aussi dans le viseur de régulateurs.
Au début du mois, l'autorité de la concurrence des Pays-Bas a lancé une enquête concernant l'accès des apps bancaires aux puces NFC des smartphones. Autrement dit, il s'agit d'une enquête sur Apple Pay, la Pomme conditionnant l'utilisation de la NFC de l'iPhone à la signature d'un contrat qui stipule notamment qu'une commission lui revient pour chaque transaction réalisée avec Apple Pay.
Le directeur de la banque centrale australienne a récemment déclaré que la stratégie d'Apple « soulevait des problèmes de concurrence », rapporte le Financial Times. Et puis il y a d'ores et déjà cette enquête lancée en juin dernier par la Commission européenne qui porte sur trois points : les conditions imposées pour l'intégration d'Apple Pay dans les apps et sites web sur iPhone/iPad ; la limitation de l'utilisation de la NFC de l'iPhone pour les paiements mobiles ; et des refus allégués d'accès à Apple Pay.
C'est dans ce contexte très tendu que Jennifer Bailey a défendu Apple Pay à l'occasion d'une table ronde organisée par Bruxelles le 7 décembre. La responsable de l'activité a joué un numéro d'équilibriste. D'une part, elle a affirmé qu'Apple Pay contribuait à la concurrence du secteur bancaire en faisant cohabiter au sein d'une même app, Wallet, de grandes banques comme de petits établissements.
D'autre part, tout en reconnaissant que le paiement mobile avait le vent en poupe, en particulier durant cette crise sanitaire, elle a tenté de minimiser l'importance d'Apple Pay sur le marché européen. Elle a notamment argué que 70 % des consommateurs européens achètent des smartphones Android incompatibles avec Apple Pay, qu'il est possible d'utiliser d'autres méthodes de paiement que la NFC sur iPhone et que le paiement mobile reste très largement minoritaire.
Est-ce que son argumentaire fera mouche ? Rien n'est moins sûr. À bien y regarder, ce sont des arguments similaires à ceux exposés pour défendre le modèle de l'App Store, à savoir que l'iPhone est minoritaire en part de marché et que les éditeurs peuvent éviter les contraintes de la boutique en passant par le web. Or, ce discours n'a pas dissipé les critiques sur l'App Store et Apple s'est résignée à faire un geste.
C'est en tout cas une partie importante qui est en train de se jouer pour Cupertino, car Apple Pay est une poule aux œufs d'or dans sa forme actuelle. En plus de la commission prélevée sur chaque transaction (de 0,05 % à 0,20 % selon le type de carte et de paiement, d'après nos informations), Apple gagne aussi de l'argent sur chaque carte bancaire enregistrée dans Wallet.
Les recettes d'Apple Pay ne sont pas détaillées, elles sont mises dans le pot commun des services (14,55 milliards de dollars au T4 2020, + 16,3 % sur un an), mais « Apple Pay se porte exceptionnellement bien », a confirmé en octobre Tim Cook, qui compte poursuivre sur cette lancée.