C’est aujourd'hui que le projet de réforme de la chronologie des médias a été présenté au ministre de la culture et aux professionnels du cinéma et de l’audiovisuel. Ce projet n’a pas été publié encore, mais Le Monde s’est procuré une copie et le quotidien en dévoile le contenu. Au programme, une réforme encore moins significative que ce qui avait fuité au début du mois : dans les grandes lignes, rien ne change, mais certains délais pourraient être raccourcis.
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Pour mémoire, la chronologie des médias est une règle spécifique à la France qui impose un calendrier très strict à suivre pour les longs-métrage qui sortent au cinéma. Chaque acteur doit respecter ce calendrier, qui implique notamment qu’il n’y a aucun film à la vente avant six mois, ou encore que les services de streaming comme Netflix doivent attendre trois ans pour diffuser les œuvres. Cette organisation date de 2009 et elle essaie de protéger les financements du cinéma qui sont en place en France, mais elle a l’effet pervers de favoriser le piratage. La chronologie ne correspond plus du tout aux usages modernes et une réforme est en chantier depuis plus d’un an.
L’objectif de cette réforme est de contenter tout le monde, ce qui explique son retard… et le peu de changements à l’arrivée. C’est d’ailleurs un « scénario de compromis », de l’aveu même de leurs deux auteurs. Il faut dire qu’aucun compromis n’a été trouvé depuis 2009 et on imagine qu’ils cherchent à avancer, même s’il ne s’agit que d’une avancée très réduite. Voici les changements prévus par la proposition du jour.
Pour commencer, l’exploitation en salles reste bloquée à quatre mois comme aujourd'hui, mais elle pourra être réduite à trois mois pour les films qui n’ont pas connu un grand succès. Cette période d’exclusivité réduite d’un mois se répercute ensuite sur les films en vente, que ce soit en DVD et Blu-ray, ou bien en VOD. La plus grosse nouveauté les concernant toutefois, c’est qu’ils pourront rester en vente sur internet sans limite de temps, alors qu’il y avait jusque-là une fenêtre qui se refermait après quelques mois.
Grand gagnant, Canal+ pourra désormais diffuser les films dès le septième mois qui suit la sortie en salles, contre dix mois aujourd'hui. Pour les films moins populaires, la fenêtre peut même être réduite à six mois seulement. La seule contrepartie, c’est que la chaîne privée sera en concurrence avec la VOD, alors qu’auparavant, elle était seule avec les ventes physiques. Puisque l’on parle de télévision à l’ancienne, les chaînes obtiendraient aussi des délais légèrement réduits : 19 mois au lieu de 22 pour les premières (TF1, France Télévisions et M6), 27 mois au lieu de 30 pour la TNT.
https://www.youtube.com/watch?v=r0uJsVgt7yEC’est au contraire le grand perdant : le streaming reste par défaut à trois ans… enfin non, à 35 mois. Netflix, Prime Video et les autres gagneraient en effet un mois sur le calendrier actuel… autant dire que c’est comme s’il n’y avait pas eu de changement (on pourrait même dire que c’est pire). Les films qui ont eu peu de succès pourront être proposés au bout de 31 mois, mais dans les grandes lignes, absolument rien ne devrait changer pour eux.
Dans le précédent article, on évoquait la notion de services « vertueux » qui bénéficieraient d’une fenêtre réduite en échange d’une participation directe au financement du cinéma. Ce principe n’a pas été abandonné dans la version finale de la réforme, mais ces services ne pourraient pas diffuser de films avant… 15 mois (13 pour les films qui ont peu de succès), au lieu de six comme la première version l’envisageait. Déjà qu’on imaginait mal les entreprises américaines verser les 3,5 € par mois et par abonné réclamés pour devenir vertueuses, voilà qui devrait finir de les convaincre de ne rien faire du tout.
Cette réforme doit encore être approuvée par tous les acteurs concernés, ce qui va des exploitants de salle aux chaînes de télévisions, en passant par les distributeurs et les services en ligne. Ils ont dix jours pour se décider et en cas de majorité, la nouvelle chronologie des médias pourra entrer en vigueur dès le mois d’avril. Sinon, le gouvernement pourrait légiférer, mais cette réforme a minima devrait facilement obtenir la majorité nécessaire. Adoptée, elle sera alors valable pour trois ans.