La SNEP (Syndicat national de l'édition phonographique) a livré le bilan de l'industrie musicale en France pour 2014. Globalement, ce marché a reculé de manière assez prononcée, puisque le chiffre d'affaires généré par les ventes de musique physique et en ligne a été de 570,6 millions d'euros, soit -5,3% sur un an. Le téléchargement à la pièce a largement contribué à cette chute, puisque d'une année sur l'autre, il a fléchi de 14%, ce qui est au passage une première; c'est guère mieux du côté des ventes de CD, qui ont reculé de 11,5% (seul le vinyle s'en tire mieux avec une croissance impressionnante de 42% !). Le secteur de la musique physique représente toujours la part du lion du marché avec 71%.
La tendance à la baisse du téléchargement de musique est compensée par le streaming : les revenus tirés de cette activité ont ainsi augmenté de 34%; mieux encore, en représentant 55% du numérique, le streaming en est devenu le premier revenu (c'est 12 points de plus qu'en 2013). Grâce à cette performance, la croissance du marché numérique a finalement augmenté de 6%. En tout, la diffusion en streaming compte pour 16% des revenus totaux du marché de la musique.
Cet appétit pour le streaming s'incarne au travers des titres écoutés par cette méthode, soit 12 milliards de morceaux (+40% sur l'année). Plus impressionnant encore, 16% de la population française s'adonne désormais aux joies du streaming audio, 2 millions de personnes sont abonnées à un tel service. Les ventes de titres et d'albums en ligne ont baissé de 19% environ, les sonneries de 41%. En revanche, les abonnements audio ont grimpé de 38%. Ces chiffres permettent de mesurer à quel point le modèle économique de l'iTunes Store prend l'eau et qu'il est grand temps pour Apple de se réinventer en tant que distributeur de musique.
Un bémol cependant : les abonnements à des services de streaming audio sont bien souvent couplés avec des abonnements de téléphonie mobile. Deezer avec Orange, Spotify avec Bouygues, Napster avec SFR… Le SNEP rapporte que le marché de la musique a perdu près de 65% de sa valeur depuis 2002. Une valeur que le marché du numérique n'a certes pas permis de compenser, même si ce dernier représente 29% des revenus (+3,5 points).
Le rapport 2014 donne aussi l'occasion d'en savoir un peu plus sur l'économie des services de streaming, comme la répartition des 9,99 euros d'un abonnement : l'artiste-interprète empoche ainsi 0,68 euro seulement, 1 euro de plus s'il est aussi l'auteur et le compositeur.
Sur un plan plus général, le Syndicat a noté que les productions francophones tenaient le haut du pavé : les productions du cru réalisent 74% du chiffre d'affaires variété, soit 8 points de plus. 242 albums francophones ont été lancés l'an dernier, soit 17% de plus qu'en 2013, et 109 nouvelles signatures sont apparues (+31%). Corollaire, les investissements marketing pour ces artistes ont augmenté de 9% pour atteindre les 44 millions d'euros (dont 30% pour les nouveaux talents).
Le gros point noir pointé par le SNEP est la concentration abusive des morceaux dans les programmations des radios. Une tendance qualifiés de « double peine » pour les artistes francophones : « Moins d'exposition et moins de diversité ». Une nouveauté sur dix est francophone, contre une sur quatre en 2007; les rotations des mêmes chansons sont de plus en plus élevées : sur Fun Radio par exemple, une nouveauté francophone peut être diffusée cent fois par semaine, contre 64 en 2003. En moyenne, les rotations ont augmenté de 30% en dix ans… Pourtant, le nombre de nouveautés francophones envoyées aux radios a augmenté de 7%. En tout, regrette le Syndicat, « près des deux tiers de la diffusion francophone des 4 principaux réseaux jeunes concentrés sur 10 titres, ce n’est pas une situation acceptable pour les producteurs ». Une solution pourrait être d'imposer une limite : dix titres francophones ne pourraient pas excéder 50% des diffusions francophones.