À la faveur des débats sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014, les députés écologistes ont une nouvelle fois déposé un amendement visant à réserver la TVA à taux réduit aux seuls livres numériques « ouverts ». Il reprend, avec les mêmes défauts conceptuels, le texte de l’amendement qui avait été repoussé sous la pression de la Commission européenne l’an dernier.
La logique des auteurs de cet amendement n’a donc pas changé : « nous proposons », disent-ils, « que seuls les livres électroniques vendus en format électronique ouvert puissent bénéficier de la TVA à taux réduit [NdR : à 5,5 %] ». Par « ouvert », il faut entendre « tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d’accès ni de mise en œuvre », selon la définition donnée par l'article 4 de la LCEN.
« Les principaux acteurs ont profité de leur avance pour constituer des écosystèmes fermés » : stricto sensu, Apple et Amazon ne vendent pas des livres, mais concèdent des licences d’utilisation. Si vous n’avez pas téléchargé votre « achat », il peut être modifié voire supprimé sans préavis et sans recours. Et même si vous l’avez téléchargé, il ne peut pas forcément être partagé librement ou être transféré sur un autre appareil que celui du distributeur, mais peut être effacé à distance.
Mais il est trop facile de rejeter la faute sur des distributeurs, en assurant que les éditeurs « appellent à un plus grand respect des droits des lecteurs ». Apple et Amazon n’imposent pas leurs DRM, elles les proposent — les éditeurs disposent, et la plupart choisissent d’enfermer leurs lecteurs dans les écosystèmes propriétaires de leurs distributeurs. Cet amendement cède à la facilité en ne soulignant pas le rôle des éditeurs-électeurs dans la constitution de ces systèmes fermés.
S’il est adopté, il permettra cependant d’imposer par la fiscalité les idées que certains défendent par conviction. L’April, Framasoft, La Quadrature du Net, SavoirsCom1 et Vecam appellent donc logiquement à le soutenir en contactant les députés, qui devront se prononcer à son sujet dans les prochains jours. La mesure entrerait en vigueur le 1er janvier 2015, date à laquelle la TVA ne sera plus payée dans le pays de domiciliation du vendeur, mais dans celui du client. À condition que la Commission européenne ne revienne pas à la charge, elle qui estime que tous les livres devraient être taxés de la même manière, qu’ils soient imprimés (5,5 %) ou électroniques (7 %).
Source : [Via Next Inpact]