Une technologie est vide de sens si elle n'est pas accompagnée par des usages, Google l'a appris à ses dépens. Le Nexus S et Wallet devaient représenter une percée dans le domaine de la NFC, mais ils se sont fracassés sur les boucliers levés des opérateurs et des acteurs traditionnels du paiement. Google reconnaît désormais qu'il faudra « trois à cinq ans » à la NFC pour véritablement décoller.
Osama Bedier, vice-président de Google en charge du paiement mobile, n'arrive néanmoins pas tout à fait à reconnaître son échec : « nous ne pensions pas que la NFC décollerait en un an seulement ». En un an peut-être pas, mais Google n'imaginait sans doute pas rencontrer une telle résistance, comme le prouve d'ailleurs la communication ambitieuse et enjouée de l'époque. La firme de Mountain View a il est vrai dû faire face aux résistances des acteurs traditionnels, qu'elle aurait peut-être pu mieux accompagner.
L'opérateur Verizon a par exemple désactivé Wallet, qui n'est aujourd'hui plus disponible aux États-Unis que chez des opérateurs de second rang (Sprint et Virgin Mobile). On peut bien sûr l'installer sur un smartphone Android rooté, ce qui n'est sans certains risques de sécurité. Wallet gère certes plus de cartes bancaires que par le passé, mais il reste incompatible avec des systèmes déjà largement déployés comme celui de Visa (au moins 50 000 points de vente en France).
Ces déclarations de Google mettent en perspective l'absence de NFC dans l'iPhone 5. Apple réfléchit pourtant aux usages, comme le montre son important portefeuille de brevets sur la question, mais se pose aussi la question de l'utilité de cette technologie précise dans le cadre de ces usages. Pour la billetterie ou les cartes de fidélité, elle met en avant Passbook : les QR Code ne sont pas moins compliqués à utiliser que la NFC, et se basent sur une technologie infiniment plus répandue (les codes-barre).
Si Apple traîne volontairement des pieds en matière de NFC, c'est parce qu'elle a le temps de mettre au point sa proposition… comme le dit son principal concurrent. De récents brevets montrent qu'Apple explore par exemple la mesure de champs magnétiques avec le magnétomètre de l'iPhone pour détecter des réseaux sans-fil à proximité, ce qui pourrait aboutir à un protocole alternatif de communication en champ proche. Passbook permet de répondre à une partie des besoins, pendant que la firme de Cupertino cherche aussi comment résoudre l'épineuse question de la sécurisation des paiements sans contact — l'acquisition récente d'Authentec n'étant certainement pas anodine.
Au-delà des technologies et des usages présumés, il faudra surtout convaincre les opérateurs, dont la carte SIM est incontournable dans le processus de sécurisation des transactions. Ce sera peut-être le plus difficile pour Apple, qui n'est pas connue pour ses bonnes relations avec les AT&T, Orange et consors…