Lors de son « Twitter town hall », sorte de causerie au coin du feu du XXIe siècle, le président américain Barack Obama a répondu aux questions des 18 utilisateurs Twitter, souvent autour de problèmes économiques (réduction de la dette, emploi, crédits immobilier et étudiant, etc.). Une de ses réponses a concerné directement Apple et la production des appareils iOS, dans le cadre du débat général sur la relocalisation.
Barack Obama utilisait un MacBook Pro, comme il en a l'habitude.
Ces dernières années, les pays sud-américains ont progressivement fermé leurs frontières, obligeant les grandes entreprises américaines à produire localement si elles veulent échapper à la pression fiscale. Le Brésil, qui affronte les États-Unis depuis près d'une décennie au sujet des importations et des exportations de coton, taxe ainsi fortement de nombreux produits étrangers : les produits Apple y sont vendus deux fois plus chers qu'aux États-Unis. Foxconn a ainsi décidé d'ouvrir une usine à Jundiaí : produits localement, d'abord avec des pièces importées, ensuite avec des composants eux aussi fabriqués au Brésil, les iPad échapperont à ces taxes (lire : iPad : le Brésil en produira dès la rentrée).
L'Argentine prend le même chemin : le gouvernement Kirchner a mis en place un système de « certificat d'origine » interdisant la commercialisation de tout produit n'ayant pas été fabriqué localement. Ainsi, l'iPhone ne peut désormais plus être vendu (ni réparé) légalement en Argentine (lire : iPhone et BlackBerry boutés hors d'Argentine).
Ce mouvement de repli protectionniste, favorisé par la crise économique, est global : il revient parfois dans le débat politique américain. À une question opposant, dans le domaine des nouvelles technologies, les emplois de recherche et développement (souvent aux États-Unis) et les emplois de production industrielle (souvent délocalisés), Obama a fait montre de velléités de relocalisation.
Nous voulons nous concentrer sur l'industrie de pointe, qui combine nouvelles technologies, recherche et développement pour comprendre comment créer le prochain Twitter, comment créer le prochain Google, comment créer le prochain truc à la mode — tout en assurant que la production se fera [aux États-Unis]. C'est très bien qu'Apple crée l'iPod, l'iPad, qu'elle les conçoive et qu'elle développe leur logiciel, mais ce serait mieux qu'elle les fabrique aux États-Unis […].Ce discours n'est évidemment pas nouveau, et revient périodiquement sur la table, notamment à l'approche des élections : Barack Obama est d'ores et déjà en campagne pour sa réélection en 2012. Ce thème est traditionnellement manipulé par les franges les plus conservatrices, sous l'angle de la préférence nationale, mais est aujourd'hui plus commun chez les libéraux, sur cette thématique de la redynamisation du tissu économique américain. L'exemple d'Apple prend cependant cette fois une tonalité toute particulière à la lumière des exemples brésiliens et argentins. Obama vise ici une relocalisation ponctuelle, limitée aux secteurs de pointe, c'est-à-dire à une main-d'œuvre qualifiée dont les États-Unis ne manquent pas.
La Maison Blanche a publié, comme elle le doit, un transcript complet de cette intervention.
De nombreux organismes lient cette question à celle de l'amélioration des conditions de vie dans les lieux de production. Alors que la Chine ne veut plus forcément être l'« atelier du monde », certains se demandent si l'augmentation des coûts de production ne serait pas l'occasion d'une relocalisation. Dans les années 1980 et au début des années 1990, Apple concevait, fabriquait et assemblait ses ordinateurs aux États-Unis, dans son usine de Fremont (Californie).
Apple est ensuite passé à un système mixte : l'usine de Elk Grove en Californie a notamment produit l'iMac, tandis que l'assemblage des cartes-mères et le conditionnement de certains Mac avaient lieu dans une Apple Factory en Irlande. À partir de 2003, la part de la Chine dans la production d'Apple n'a cessé d'augmenter, pour des raisons de coût, mais aussi d'échelle. Aujourd'hui, la quasi-totalité des machines est produite en Asie. Alors que les barrières protectionnistes forcent Apple à s'implanter au plus près des marchés qu'elle vise, va-t-elle devoir penser à relocaliser aux États-Unis ?
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