En octobre 2005, Apple met le développement de l’iPhone sur pause — l’appareil allait sortir deux ans plus tard — pour que les ingénieurs planchent sur des concepts de claviers virtuels. Cet élément parait aujourd’hui évident, mais à l’époque il s’agissait de trouver la martingale logicielle qui ferait oublier les claviers physiques.
Et concevoir ce clavier n’avait rien d’évident, selon Ken Kocienda, un des principaux ingénieurs ayant planché sur le logiciel de l’iPhone. Ken a travaillé chez Apple de 2001 à 2016, où il a participé de près au développement du smartphone. Il a tiré de cette expérience un bouquin, Creative Selection, qui sera disponible le 4 septembre (on peut le précommander sur l’iBooks Store).
9to5Mac publie les premières bonnes feuilles de l’ouvrage, qui reviennent précisément sur le développement du clavier virtuel de l’iPhone. En 2005, les ingénieurs travaillaient sur des prototypes d’iPhone au design non finalisé, baptisés « Wallabies », que l’on peut voir ci-dessus.
À l’automne 2005, c’est Scott Forstall qui, insatisfait des claviers proposés jusqu’à présent, décide de stopper le développement de l’appareil jusqu’à dénicher une méthode de saisie bien fichue. À partir de là, Ken Kocienda couche sur le papier plusieurs designs exotiques pour nos yeux habitués à dix ans de clavier iOS.
Si le coup du ruban n’a pas pris, Forstall a tout de même sélectionné l’idée du clavier suggérant des mots. Voici à quoi il ressemblait dans ce mock-up réalisé par Ken :
C’est là que les déboires de l’ingénieur ont démarré. Quelques jours après avoir sélectionné son concept, Forstall programme une démo avec Phil Schiller. C’était la première fois que Ken Kocienda rencontrait le patron du marketing d’Apple et bien évidemment, il était nerveux ; sa démo était en tout cas fin prête.
« [Phil] a pris le Wallaby et il a commencé à taper du texte. Je ne voyais pas ce qu’il tapait. Phil m’a demandé pourquoi j’avais mis plus qu’une lettre sur chaque touche. Phil était agréable, mais direct. Il pensait que mon clavier était bizarre, et il demandait une explication ».
Ken lui expliqua alors que décision avait été prise de faire de grosses touches pour faciliter la saisie, puis d’y joindre des suggestions. Ça n’a pas convaincu Phil, pour lequel la démo avait duré deux minutes. Forstall a aussi présenté ce concept à Tony Fadell, mais sans plus de succès. C’en était terminé de cette idée.
Retour à la feuille blanche donc. L’anecdote s’arrête là, mais Ken Kocienda a fini par mettre au point le clavier tel qu’on le connait : une lettre par touche, comme un clavier normal, mais avec un système prédictif pour éviter (autant que possible) les fautes de frappe.