C'est vertigineux quand on y pense : s'il n'y avait pas eu l'iPhone, le Marvel Cinematic Universe aurait peut-être été complètement différent ! Le MCU, autrement dit l'univers partagé des aventures des super-héros des comics Marvel, cartonne dans les salles obscures, entre Black Panther et le troisième volet des Avengers.
Le MCU est né il y a dix ans pile, avec la sortie au cinéma d'Iron Man. Le film de Jon Favreau a posé, un peu malgré lui d'ailleurs1, les bases d'un monde alternatif protégé des menaces de toutes sortes par des super-héros aux caractères bien trempés. Et l'iPhone y a joué un rôle de premier plan !
Le journaliste Ian Failes raconte dans un long et passionnant article le développement de l'interface de J.A.R.V.I.S, l'intelligence artificielle créée par Tony Stark, l'homme dans l'armure d'Iron Man (oups, désolé pour le spoiler). Plusieurs des artistes ayant participé à la création des effets spéciaux du film, John Nelson, Wesley Sewell, Dav Rauch, Jonathan Rothbart et Kent Seki, y décrivent notamment les tâtonnements et les doutes qui ont émaillé la conception de cette interface.
« Le public devait accepter qu'en plein milieu de l'action, le montage montre des images "high concept" de Tony [Stark] à l'intérieur de l'armure », explique Kent Seki qui a supervisé les effets du HUD. « On s'inquiétait de savoir si cela allait marcher », ajoute Wesley Sewell, superviseur des effets visuels additionnels.
Voir la tête de Tony Stark avec des objets 3D flottant devant le visage n'avait en effet rien d'évident à l'époque. « La question qui se posait, c'était : comment entrer dans le casque [d'Iron Man] et faire en sorte que l'environnement virtuel ait un aspect organique », indique John Nelson, superviseur des effets visuels.
Une des solutions imaginées par l'équipe de pré-production a été de suivre les yeux de l'acteur et imaginer les actions qui en découleraient, en se basant sur l'endroit regardé, raconte Jonathan Rothbart, lui aussi superviseur des effets visuels. « C'est ce qu'on a fait pour montrer comment le HUD obéissait aux commandes vocales et aux yeux ». Des tests ont été tournés pour voir si l'idée pouvait fonctionner.
Ce principe d'une interface qui suit le regard de l'acteur donne une dynamique telle à ces séquences que les spectateurs n'ont pas besoin d'informations supplémentaires pour comprendre ce qui se passe.
« L'hypothèse de départ, c'est que nous allions avoir besoin d'un "curseur d'œil" pour comprendre que l'acteur regardait des choses et contrôlait le HUD avec ses yeux », décrit Dav Rauch, superviseur des effets visuels pour l'interface. Mais en regardant les tests, Jon Favreau a réalisé que ce qui se passait à l'écran était évident et qu'un curseur comme on peut le voir ci-dessus n'était pas nécessaire.
Les grands principes étant posés, il a ensuite fallu tourner les séquences avec Robert Downey Jr., puis travailler sur l'interface en elle-même. Et c'est là que les problèmes ont commencé… Les premières versions du HUD étaient « très rudimentaires », commente Wesley Sewell, mais elles étaient considérées comme « temporaires », des espaces qui restaient à peaufiner.
Sauf que les mois passent et les choses n'évoluent pas beaucoup. « Nous n'avions aucune idée de ce que nous étions en train de concevoir », explique Dav Rauch. L'iPhone entre alors en scène. Une semaine ou deux après le lancement de l'iPhone en 2007, le réalisateur Jon Favreau sort son smartphone pendant une réunion sur les difficultés du HUD.
« Je ne veux pas vous dire comment faire des graphismes spécifiques pour le HUD, mais je veux que ce soit aussi intuitif que l'iPhone », explique Favreau. Dav Rauch possédant lui aussi un iPhone, les deux hommes se mettent à discuter de l'appareil, de ce qu'ils aiment, dont une chose en particulier. Le smartphone fait ce qu'on lui demande, il est très simple et très intuitif, dit alors le réalisateur d'après les souvenirs de Rauch.
Le spécialiste des effets visuels loue en particulier les transitions. Elles sont « si simples, ce sont comme des transitions de zoom ou de balayage. Il n'y a rien d'exubérant dans ce téléphone, mais ce qui est génial avec cet appareil c'est qu'il fonctionne et il fonctionne vraiment bien ».
De retour dans leur studio après cette réunion, les artistes décident de s'inspirer de la philosophie derrière le smartphone d'Apple. « Nous avions essayé de faire des trucs pour rendre [le HUD] futuriste et fantaisiste », se rappelle Rauch, « mais en fait ce dont nous avions besoin c'était de faire en sorte qu'il fonctionne, et si c'était le cas, alors on allait pouvoir y croire ».
Le HUD d'Iron Man ne devait pas être un accessoire ou un « truc d'effets spéciaux », pointait Favreau qui voulait que ses équipes créent un « personnage ». L'acteur Paul Bettany, qui allait incarner plus tard Vision, était la voix de J.A.R.V.I.S, un « personnage que personne ne voit ». Un sacré défi ! « La seule image que l'on a de ce personnage, c'est ce que vous allez créer ». Sans l'inspiration de l'iPhone, ce « personnage » n'aurait pas été pareil !
À proprement parler, on ne retrouve pas l'influence de l'interface de l'iPhone dans le HUD d'Iron Man. Mais le smartphone d'Apple a permis de débloquer le processus créatif autour de cet élément très important du film, qui a inspiré le langage visuel du MCU dans son ensemble.
L'article au complet mérite un coup d'œil car si l'histoire autour de l'iPhone s'arrête là, la description du processus de création du HUD se poursuit avec les différentes armures de Tony Stark et de son premier ennemi, Iron Monger. On en apprend aussi davantage sur les outils utilisés par les artistes pour le développement de l'interface.
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Ce n'est qu'à la toute fin du film, dans une scène post-générique tournée un peu à la blague, que Nick Fury apparait : le patron du S.H.I.E.L.D, qui apprend à Tony Stark qu'il fait partie d'un plus grand univers, veut lui toucher deux mots des Vengeurs. ↩︎