L'accord d'itinérance entre Free Mobile et Orange lie les deux opérateurs jusqu'en 2018. Ce partenariat permet à Free de basculer sur le réseau 2G et 3G d'Orange dans les zones qui ne sont pas couvertes par son propre réseau. Malgré l'ambiance délétère dans le paysage français des télécoms et l'animosité entre Orange et Free, l'opérateur historique ne s'est jamais plaint de cet accord - et pour cause : il en tire de confortables revenus, 730 millions d’euros rien que pour l’année dernière. Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, a cependant estimé lors de ses voeux à la Fédération française des Télécoms qu'il était temps de négocier la « phase de sortie » de ce contrat.
« Les opérateurs doivent investir » dans le développement de leurs réseaux, estime le ministre. Free doit notamment « prévoir l'extension de la [sa] couverture [réseau] », après avoir profité de cette « facilité ». L'opérateur trublion a promis une couverture de 75% du territoire en 2015, et de 90% en 2018. Le ministre ne réclame toutefois pas de date de sortie ferme mais une anticipation des discussions.
Contrairement à l'Autorité de la concurrence qui estime que la fin du contrat pourrait intervenir dès 2016, le ministre ne s'est pas prononcé sur un arrêt prématuré du contrat d'itinérance. Cet accord peut « perturber ou déséquilibrer le marché », avait prévenu en mars dernier Bruno Lasserre, le président de l'Autorité. De fait, le contrat a largement participé du succès de Free Mobile, qui deux ans après son lancement, compte plus de 7,5 millions de clients. Alors que l’ARCEP et le ministre sont rarement sur la même longueur d’onde, ils sont au moins d’accord sur un point : ils n’imaginent pas une seconde une extension du contrat d’itinérance au-delà de 2018.
Mais c’est vraiment le seul point d’accord entre les deux parties. A cette occasion, le ministre n’a pas manqué de tacler l’ARCEP en déclarant « ce ne sont pas aux autorités indépendantes de dire ce qui est bon dans le secteur des télécoms ». Arnaud Montebourg n’a pas caché sa volonté de réformer l’ARCEP afin de réduire ses pouvoirs.
D’autre part, Arnaud Montebourg a fait part de sa vision de la concurrence et de l’organiser comme bon lui semble : « Nous pensons qu'il est nécessaire qu'il y ait un certain nombre d'ententes, pas dans le sens condamnable du terme mais dans le sens utile » et d’enfoncer le clou en ajoutant « quand je reçois l'Autorité de la Concurrence, je lui dis : vous êtes contre les ententes. Moi, je les organise ! Qui a raison ? Vous êtes nommé, je suis élu, donc c'est forcément moi ! »
Pour le moment, il semble que les « ententes » prônées par le ministre n’aient qu’un seul but : affaiblir le vilain petit canard de la téléphonie mobile. Ce dernier se sent mis à l’écart des discussions concernant la mutualisation des réseaux (lire : Quand Free répond à Bouygues Telecom) et ses relations avec l’opérateur historique sont complexes. Mais n’est-ce pas trop tard ? Avec une part de marché de 10 %, Free Mobile a atteint une certaine masse critique. Et contrairement à un ministre, les entreprises n’ont pas vocation à rester le temps d’un mandat.