Les iPad Pro de 2018 intègrent une nouvelle puce (SoC) encore plus puissante que les iPhone sortis quelques semaines avant. L’Apple A12X Bionic est une variante musclée de l’Apple A12 des iPhone XS et XR et elle offre des performances encore plus élevées. Ars Technica a pu en discuter avec Phil Schiller et Anand Shimpi, ancien journaliste d’AnandTech qui travaille désormais chez Apple, sur la conception de ces puces.
Malheureusement, l’interview n’entre jamais dans les détails techniques et les deux employés d’Apple se contentent largement de livrer les points-clés marketing déjà entendus pendant le keynote. L’Apple A12X est la première puce de tablette gravée à 7 nm ; son processeur (CPU) est équipé de huit cœurs qui peuvent fonctionner en même temps pour des performances jusqu’à 90 % supérieures ; sa puce graphique (GPU) en contient sept et elle est deux fois plus rapide qu’avant ; le moteur neuronal réalise 5 000 milliards d’opération à la seconde. Et à l’arrivée, les iPad Pro offrent des performances graphiques au niveau d’une Xbox One S, tandis que le processeur est plus puissant que 92 % des ordinateurs portables sur le marché.
Tout ceci, on le savait déjà et ArsTechnica a pu le vérifier en confrontant un iPad Pro 12,9 pouces de 2018 à ses prédécesseurs, à des iPhone et à des Mac et PC portables. En exploitant tous les cœurs, l’iPad Pro fait mieux que les MacBook Pro de 2016 et 2017, et il faut un 15 pouces de 2018 équipé du processeur le plus puissant (Core i9 six cœurs à 2,9 GHz) pour dépasser la tablette. C’est impressionnant pour une tablette nettement plus fine et sans refroidissement actif, mais ça l’est d’autant plus que ce Mac haut de gamme coûte plus de trois fois plus cher.
Comment Apple a-t-elle obtenu de tels résultats ? Pas un mot, mais on le sait assez bien, grâce aux études réalisés sur l’Apple A12 des iPhone (lire : Apple A12, une puce qui cache bien son jeu). Il faudra attendre les démontages de la tablette et surtout l’analyse au microscope de son SoC par les spécialistes pour savoir si Apple a fait des choses différemment pour l’A12X.
Naturellement, l’écart entre les deux versions de la puce s’explique par les cœurs supplémentaires, deux pour le processeur, trois en plus pour la puce graphique. Côté CPU, la possibilité d’utiliser les huit cœurs en même temps — quatre performants et quatre efficients — apporte un gros coup de boost, notamment par rapport à l’A10X qui équipait les anciens iPad Pro. À ce sujet, Apple se contente d’indiquer que le contrôleur de performances créé en interne a été modifié pour permettre cette utilisation simultanée.
Du côté de la puce graphique, Anand Shimpi a donné une petite explication technique pour justifier les progrès réalisés, au-delà de l’augmentation du nombre de cœurs. Par rapport à l’A12 classique, l’A12X utilise la même implémentation de la mémoire, mais la bande passante de cette dernière est plus élevée. Ce qui devrait apporter un avantage aux tablettes par rapport aux smartphones, même si on n’en sait pas plus.
Pour évaluer le GPU de l’iPad Pro, Apple a utilisé des ordinateurs portables et de bureau, et non pas d’autres tablettes et smartphones. Le constructeur est manifestement fier de sa comparaison avec la Xbox One S, répétée plusieurs fois pendant l’entretien. Ars Technica note judicieusement que c’est l’une des consoles fixes les moins puissantes du moment, elle est techniquement moins calée que les PS4 ou que la Xbox One X de Microsoft. Mais c’est bien mieux que la Switch de Nintendo, même si ce n’est pas difficile de faire mieux que cette console portable…
L’Apple A12X Bionic partage un point commun avec la Xbox One S en tout cas : sa mémoire est partagée. Traditionnellement, il y a de la mémoire vive pour le CPU et de la mémoire dédiée au GPU. Comme Anand Shimpi l’a souligné pendant l’entretien, c’est un problème pour les tâches qui exploitent les deux composants, les données doivent alors transiter d’une mémoire à l’autre, ce qui ralentit les tâches. Résultat, la plupart des apps n’utilisent qu’un seul élément, soit le processeur, soit la carte graphique, mais pas les deux en même temps.
Apple opte pour une stratégie différente avec tous ses SoC : « Nous avons une architecture unifiée, le CPU, le GPU, l’ISP1 et le moteur neuronal — tout cela fonctionne derrière la même interface mémoire, et vous n’avez qu’une seule réserve de mémoire ». Par ailleurs, iOS a été optimisé pour cette configuration et le système mobile n’a pas à gérer un fonctionnement différent, comme les Mac. Ce qui apporte des gains de performance, souligne le constructeur.
À défaut d’apporter des explications techniques détaillées, Phil Schiller s’est lancé dans une longue explication pour justifier la motivation d’Apple dans le domaine. D’après le SVP en charge du marketing, l’objectif n’est pas de faire mieux que tel ou tel concurrent, d’ailleurs la firme de Cupertino ne regarde jamais ce que fait la concurrence et l’objectif est toujours de faire mieux que précédemment.
Faire encore mieux que l’année précédente, voilà la véritable « passion » de l’équipe en charge des puces Apple. Faire mieux que la concurrence n’a aucun intérêt, parce que leur travail est fait « au service de l’utilisateur, pas de la compétition ». Phil Schiller revient aussi sur le travail effectué en interne, et souligne que cette équipe travaille main dans la main avec toutes les autres. Plusieurs fois par semaine, des réunions sont organisées pour connaître les besoins précis de chaque équipe et ajuster les futures puces d’Apple en fonction. Il a d’ailleurs rappelé que chaque génération nécessitait plusieurs années de travail.
C’est ce qui justifie la présence d’un moteur neuronal bien plus puissant, par exemple, il était nécessaire pour la réalité augmentée ou encore la photographie informatisée qui prend toujours plus d’ampleur. Plus dans le détail, cela explique aussi certains choix d’Apple, notamment en termes de gestion de la mémoire.
Au-delà des appareils iOS, est-ce qu’Apple compte exploiter toutes ses connaissances en matière de processeur et puce graphique pour le Mac ? Pas un mot de la part d’Apple, comme vous pouviez vous en douter…
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Le processeur d’images, une puce dédiée aux traitements automatiques de l’appareil photo. ↩︎