L’iPad Pro et ses accessoires étaient présentés aujourd’hui à la presse française. L’occasion de voir d’un peu plus près l'Apple Pencil et le Smart Keyboard que nous allons maintenant pouvoir tester plus avant. Des deux, c’est le stylet qui intriguait le plus, car Apple n’a jamais réalisé de nouvel accessoire de ce type depuis les Newton et eMate.
Apple Pencil
Par sa seule forme, cet accessoire mérite son nom de “crayon”. Un œil distrait pourrait l’ignorer s’il était mélangé au milieu d’autres de ses pairs de type traditionnel. Aucune fioriture, sa seule coquetterie est son anneau en métal sur lequel est gravé son nom. Il n’y a pas de volonté de moderniser la forme ancestrale du crayon en prenant le prétexte de cette création pleine d’électronique. Il n’a pas de bouton d’action (ni de gomme), ce n’est pas un crayon multifonction. Il fait ce que fait un crayon : il dessine en tenant compte, du mieux possible, de l’orientation de sa pointe et de la pression qu’on y exerce.
Fait d’un polycarbonate blanc, lisse mais pas trop glissant, il a un design soigné mais presque banal voire médical. Il est assez passe-partout. C’est très certainement l’objectif : se faire oublier par le dessinateur, en n’imposant pas de tenue en main particulière, à l’inverse d’autres stylets aux formes plus élaborées. Il se tient aussi naturellement que se tient un crayon de bois… et risque d’être distraitement machouillé sans que l’on n'y prenne garde. C’est probablement le meilleur hommage qu’on pourrait lui rendre !
Le bouchon supérieur qui protège la prise Lightning est aimanté au corps, tandis que la pointe se dévisse en un tournemain. Une seconde pointe est fournie. Faite d’un silicone dur — on n’enfonce pas l’ongle dedans et elle ne s’écrase pas sous la pression — elle s’abîmera toutefois irrémédiablement à force d’être utilisée.
Combien de temps avant de devoir changer de pointe ? Apple n’en a officiellement aucune idée. On se dit tout de même que le fabricant a forcément mené quelques tests de résistance moyenne, mais le démonstrateur n’a pas su nous fournir d’estimation. De même que l’on ne sait pas encore combien coûteront les pointes vendues séparement.
Cette pointe en soi n’a rien de très sophistiqué. C’est un embout en silicone, évidé, avec une minuscule tête d’épingle métallique tout au fond. Elle fait contact avec la tige située dans le Pencil pour renseigner ses capteurs de position. Le Pencil travaille de concert avec une couche particulière située dans le sandwich qui compose l’écran de l’iPad Pro. Le Pencil ne fonctionne qu’avec cet iPad mais on peut utiliser d’autres stylets avec la tablette.
L'Apple Pencil est bien équilibré, il n’est pas plus lourd d’un côté que de l’autre. En résumé, on le tient en main comme n’importe quel crayon et on est amené à l’utiliser tout aussi simplement. C’est immédiat, sans apprentissage aucun. Pourquoi ne pas avoir proposé un moyen d'attacher le Pencil (par aimantation ?) contre un bord de l'iPad ? Comme on le faisait pour d'anciennes télécommandes qui se collaient sur la tranche des iMac blanc. La tablette est toutefois fine et effilée et se prêterait peut-être mal à cette fonction. Apple ne nous a pas donné de réponse, elle laisse le soin aux accessoiristes de proposer des solutions.
Nous allons pouvoir tester plus avant sa précision. Disons juste qu’après cette première prise en main, il s’est avéré agréable à utiliser et qu’il paraît apte à produire des dessins aux nuances de traits assez subtiles. Un bon signe avec ce genre d’accessoire, c’est lorsqu’on s’échine en vain à le prendre en défaut. À voir s’il arrive à reproduire un trait fin puis à l’épaisseur progressive ; ou une ligne torturée que l’on trace à vitesse variable ou s’il prend des raccourcis et bâcle le trait. Pendant le court temps qu’il nous a été donné pour l’essayer, il est apparu prometteur.
Smart Keyboard
En photo, ce clavier — qui sert aussi de support et de protection pour l’écran — m’avait donné l’impression d’être fait de touches molassonnes. Une sorte de lointain cousin et de mélange des claviers des TO7/MO5. En réalité, les touches sont plus fermes qu’elles peuvent le laisser paraître.
Elles ont une course bien perceptible, à mi-chemin entre celle — extrêmement faible — du MacBook Retina et celle des autres portables d’Apple. Elles produisent un petit claquement sonore en s’enfonçant, mais moins sec que sur le MacBook. Elles ne sont pas rétro-éclairées, ce qui peut être un défaut.
Il est trop tôt pour se faire une opinion arrêtée, mais ce clavier obligera probablement à un temps d’adaptation parce que ses touches sont plus petites et plus espacées que sur les portables et claviers des Mac. Toutefois, n’étant aujourd’hui vendu qu’avec une distribution des touches Qwerty, ce n’est pas l’accessoire qui va intéresser grand monde en l’état.
Pourquoi Apple a-t-elle subitement décidé de ne pas vendre un clavier en plusieurs langues dès le premier jour ? Pas d’explication particulière, c’est comme ça. D’autres versions sont prévues mais sans date de disponibilité.
Cependant, il faut s’attendre à ce que le choix augmente dans les prochains mois. L’iPad Pro est doté de trois petits contacts sur l’une de ses tranches qui forment le Smart Connector. Ce clavier se branche dessus et tire de la tablette son alimentation (pas de batterie, donc pas de recharge nécessaire) et la transmission des données (pas de Bluetooth). Ce connecteur étant normalisé MFI (Made for iPad), il est utilisable par les accessoiristes. Logitech a tiré le premier avec un clavier de facture plus classique (reposoir en métal, touches en plastique et des touches de fonctions comme celles de son Mac) qui est aussi disponible en français à 149,95 €. Mais d’autres marques vont sans nul doute se ranger dans sa roue.
Touch ID et "Dis Siri"
Pourquoi cet iPad qui a été amélioré et dopé à de multiples niveaux, qui représente maintenant le nec plus ultra de cette famille, n’est-il pas équipé de la même génération de Touch ID que sur les iPhone 6s ?
Deux justifications, assez recevables, ont été avancées. D’une, c'est que l’on déverrouille certainement bien moins souvent son iPad que son iPhone. Le téléphone va être sollicité à tout bout de champ, la tablette moins.
Et de deux, que le Touch ID “d’ancienne génération”, celui que l’on trouve sur les iPhone 5s et 6, marche déjà plutôt pas mal et vite. À la sortie des nouveaux iPhone 6s, on en a même vu qui trouvaient que le nouveau Touch ID fonctionnait trop vite. En clair, l’expérience utilisateur sur cet iPad Pro ne souffre pas d’avoir un Touch ID seulement véloce au lieu d’être fulgurant. Reste que cette omission est surprenante.
Quant à l’absence d’un “Dis Siri” qui sache fonctionner sans que l’iPad Pro soit alimenté, pas d’explication. Notre question a même laissé nos interlocuteurs passablement interdits. Pourtant c’est bien le cas, malgré la présence d’un coprocesseur M9 sur l’iPad Pro et les iPhone 6s, il n’y a que les téléphones qui savent s’en servir à cet effet. Là aussi ça ne rend pas cet iPad moins compétent, mais on aurait trouvé logique qu’il soit au diapason d’autres appareils proches de son univers logiciel et annoncés en même temps que lui.
L’iPad Pro et les PC
A l’issue de cette réunion, il y avait une absente dans la présentation qui avait été déroulée : la comparaison avec les PC, la suggestion que l’iPad Pro était en mesure de les écarter du chemin ou du moins d’en remplacer certains. Le propos aujourd’hui était moins tranchant que celui de Tim Cook cette semaine.
Le discours qui a été tenu tournait autour de deux classes de produits qui ne s’excluent pas mutuellement : l’iPad et le Mac. Cet iPad est “Pro” tout comme certains MacBook sont “Pro”. En cela que chacun est au sommet de sa catégorie et peut quasiment tout faire, même si leurs utilisateurs ne sont pas expressément rangés dans la catégorie des professionnels.
Dès lors, tout est question de besoins. La puissance de l’iPad Pro et la taille de son écran placent la catégorie tablette à un niveau encore jamais atteint. Cet iPad saura répondre présent pour tout ce dont on a besoin de faire avec.
Pour autant, les portables sur OS X gardent des attraits fonctionnels. Il en est un qui saute aux yeux lorsqu’on utilise Split View, l’une des grandes nouveautés d’iOS 9. Cette fonction est formidable sur ce grand écran d’iPad, mais elle souffre d’une limitation complètement saugrenue à ce stade de l’évolution des systèmes d’exploitation.
Alors qu’on peut manipuler directement avec les doigts les contenus de deux apps affichées côte à côte à l’écran, il est rigoureusement impossible de faire un glisser-déposer entre les deux. Par exemple, prendre une image ou une sélection de texte dans une fenêtre et la faire glisser dans le document de la fenêtre à côté.
La ligne de pixels qui sépare ces deux applications forme une muraille infranchissable. En 2015, sur un appareil aussi sophistiqué et puissant que cet iPad Pro, c’est aussi déroutant que l’était l’absence de copier-coller sur le premier iPhone de 2007.
Autre chose dans le même registre, il est impossible d'avoir deux vues d'un même document en Split View. Le seul moyen par exemple d'avoir deux pages web simultanément à l'écran est d'ouvrir… deux navigateurs, comme Safari et Firefox ici. Sur un Mac on détachera un onglet pour en faire une fenêtre séparée. Sur iOS, non.
Gageons que ces contraintes, qui ne sont que logicielles, seront gommées dans une future version d’iOS. Il ne s'agit pas de faire d'iOS la réplique exacte d'OS X en tout. Mais ces détails montrent que le système des iPad doit encore progresser sur des choses devenues communes depuis des décennies sur les ordinateurs classiques et qui sont pratiquées par des utilisateurs lambda.