Quatre mois n’y auront rien fait : la Competition and Markets Authority (CMA) confirme les résultats de son enquête sur le marché des navigateurs mobiles et accuse Apple de « limiter la concurrence » en imposant son moteur de rendu WebKit sur iOS. Même si la firme de Cupertino permet depuis quelques semaines de changer le navigateur par défaut, le régulateur britannique estime que cette concession « ne résout pas tous les problèmes » et empêche les utilisateurs de véritablement « choisir le navigateur qu’ils souhaitent utiliser ».

Cette conclusion n’est pas une surprise, puisque la CMA reprend l’essentiel du rapport prévisionnel qu’elle avait publié en novembre dernier. Le régulateur britannique s’inquiète encore et toujours du renfermement des écosystèmes mobiles : Safari est utilisé par 88 % des propriétaires d’iPhone et Chrome par 77 % des propriétaires d’appareils Android. Chrome (11 % sur iOS) et Samsung Internet (13 % sur Android) ne sont pas vraiment une alternative, puisque le premier utilise le moteur WebKit de Safari et le deuxième utilise le moteur Blink de Chrome.
Mais il y a une différence de taille : Google doit utiliser WebKit sur iOS, alors que Samsung pourrait utiliser un autre moteur de rendu sur Android, comme le prouve d’ailleurs Mozilla avec son navigateur Firefox basé sur Gecko (3 % sur Android). Peu importe le navigateur que vous utilisez sur votre iPhone, vous finissez par utiliser le moteur de rendu d’Apple. Or « Safari a ou a eu accès plus rapidement ou plus profondément à des fonctionnalités du système » que les autres navigateurs basés sur WebKit.
La CMA dénonce ainsi la gourmandise d’Apple, qui veut le beurre (imposer son moteur de rendu aux concurrents) et l’argent du beurre (castrer la version du moteur de rendu imposée aux concurrents). Seul Safari peut bénéficier du catalogue des extensions distribuées dans l’App Store, et les navigateurs tiers ont dû attendre deux ans avant de profiter des mesures de protection contre le pistage et quatre ans avant de pouvoir afficher des vidéos en plein écran.
Sous la pression du régulateur européen, Apple a certes dû accepter que les navigateurs tiers puissent utiliser leur propre moteur de rendu, mais cette possibilité n’a pas fait d’émules. Pour la CMA, il ne fait aucun doute que « l’accord de partage des revenus entre Apple et Google » sur le placement préférentiel du moteur de recherche dans Safari « diminue l’intérêt financier d’une compétition entre les deux navigateurs ». Cela changera peut-être si le régulateur américain finit par interdire cet accord.
Le constat posé, la CMA doit agir… mais ne peut pas encore le faire. Le régulateur britannique doit encore décider si Apple et Google peuvent être considérés comme des opérateurs ayant un « statut de marché stratégique ». Si tel était le cas, les deux entreprises pourraient être forcées de changer leurs pratiques ou risquer des amendes atteignait jusqu’à 10 % de leur chiffre d’affaires annuel.

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