Avec la mise en application du DMA le 7 mars prochain, Apple est contrainte d’autoriser les moteurs de rendu tiers pour les autres navigateurs que le sien. Une victoire pour Mozilla, qui s’était longtemps tenu à l’écart d’iOS à cause de l’obligation d’utiliser WebKit ? Pas totalement.
« Nous examinons encore les détails techniques, mais nous sommes extrêmement déçus du plan proposé par Apple consistant à restreindre BrowserEngineKit [le nouveau framework permettant d’intégrer un moteur de rendu tiers, ndlr] aux applications spécifiques à l'Union européenne », a déclaré une porte-parole de Mozilla à The Verge.
Si elle venait à créer un Firefox iOS basé sur son moteur maison Gecko, la fondation serait amenée à maintenir deux versions différentes de son navigateur : un Firefox Gecko pour l’Europe et un Firefox WebKit pour le reste du monde. Apple n’a en effet pas l’intention de rendre WebKit optionnel là où elle n’y est pas contrainte.
« Les propositions d’Apple ne donnent pas aux consommateurs de choix viables en rendant aussi difficile que possible pour les autres de créer des alternatives compétitives à Safari », déplore Mozilla. Google, qui est autrement plus dangereux pour la domination de WebKit sur iOS en Europe, n’a pas encore réagi aux annonces d’Apple, mais on sait qu’une version de Chrome basée sur Blink est déjà en chantier.
Chez Spotify aussi, c’est l’exaspération qui prime. « [Apple] pense que les règles ne s’appliquent pas à elle », écrit le service de streaming qui milite depuis des années pour un bouleversement des règles de l’App Store. L’objet du courroux de Spotify ? Trois nouvelles règles édictées par Apple.
La première, c’est le prélèvement de 0,50 € pour chaque installation au-delà du premier million. « C’est de l’extorsion pure et simple », enrage Spotify, qui fait partie des gros poissons qui ont plus à perdre qu’à gagner de cette nouvelle ponction. La deuxième règle, c’est la commission de 17 % (ou 20 % avec son système de facturation) qu’Apple prend sur les apps distribuées dans l’App Store. Et la troisième, en fait liée à la première, est que même si Spotify quitte l’App Store au profit d’une boutique tierce, le service devra toujours payer à Apple 0,50 € par installation.
« Avec notre parc Apple dans l’UE qui s’élève à 100 millions d’utilisateurs, cette nouvelle taxe sur les téléchargements et les mises à jour pourrait faire grimper en flèche nos coûts d'acquisition de clients, en les multipliant jusqu'à dix », calcule le service de streaming. Cela lui fait dire au bout du compte que le plan d’Apple « annule complètement l’objectif du DMA ».
Apple se défend en déclarant que les développeurs ont le choix entre rester sur les anciennes conditions (commission fixe de 30 %, distribution exclusive sur l’App Store) ou bien adopter les nouvelles (commission de 17 ou 20 % sur l’App Store, prélèvement de 0,50 € passé le premier million d’installation, distribution possible sur les boutiques tierces), et en affirmant que sous les nouvelles conditions 99 % des développeurs paieront autant ou moins qu’avant. Or, Cupertino a conçu son nouveau système de telle sorte que Spotify fasse partie du 1 % désavantagé.
« Le "plan" d'Apple est une insulte flagrante à la Commission européenne et aux millions de consommateurs européens qu'elle représente, tempête de son côté la Coalition for App Fairness, le groupement qui fédère Epic, Spotify, Deezer, Tile ou encore Match Group contre les règles actuelles de l’App Store. Il ne doit pas être accepté et devrait être rejeté par la Commission. » Le plan annoncé par Apple n’est en effet pas immuable, la Commission européenne peut demander à l’entreprise de revoir sa copie si elle juge qu’elle ne respecte pas le DMA.
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