La sortie d'iOS 14.5 ne sera pas différée à cause d'une décision administrative. Dans la bataille qui se joue entre l'industrie publicitaire et Apple autour du prochain encadrement du pistage, la Pomme vient de remporter une manche en France.
Saisie cet automne par des acteurs de la publicité en ligne1, l'Autorité de la concurrence a décidé de ne pas prononcer de mesure conservatoire à l'encontre d'Apple. Les publicitaires contestaient la mise en place prochaine du dispositif (App Tracking Transparency) qui les obligera à faire apparaître une notification demandant le consentement explicite de l'utilisateur en vue de le pister. L'Autorité de la concurrence estime que l'introduction de cet encadrement du suivi publicitaire « n’apparait pas comme une pratique abusive. »
L'autorité justifie sa décision en donnant deux raisons. D'une part, « une entreprise, même si elle est en situation de position dominante ou peut être regardée comme une plateforme structurante, dispose d’une liberté de principe pour fixer des règles d’accès à ses services », tant que celles-ci ne sont pas anticoncurrentielles. D'autre part,« la réglementation applicable (RGPD et ePrivacy) ne s’oppose pas à la mise en place d’une telle obligation. »
L'autorité administrative note à ce sujet que « la formulation retenue n’apparaît pas comme induisant un biais défavorable aux procédés de suivi sur sites tiers […] et qu’une telle mesure peut faciliter, pour l’utilisateur, la maîtrise de l’utilisation qui est faite de ses données personnelles. » Elle relève par exemple qu'Apple ménage certaines possibilités d’adaptation pour les développeurs, qui peuvent personnaliser le message sur la notification et faire précéder celle-ci d'une fenêtre d'explication. C'est d'ailleurs ce que va faire Facebook afin d'inciter les utilisateurs à autoriser le suivi publicitaire.
« Nous sommes reconnaissants vis-à-vis de l'Autorité de la concurrence de reconnaitre que l'App Tracking Transparency (ATT) d'iOS 14 est dans l'intérêt des utilisateurs français. ATT sera très bénéfique pour la confidentialité en obligeant les développeurs à demander la permission aux utilisateurs de partager leurs données à des tiers à des fins publicitaires », déclare Apple dans un communiqué transmis à la presse.
L'affaire n'est toutefois pas terminée. L'Autorité de la concurrence va poursuivre son instruction sur le fond, afin de vérifier que la mise en place de l'App Tracking Transparency n'est pas une forme de discrimination, ce qui serait le cas si Apple appliquait sans justification des règles plus contraignantes aux opérateurs tiers qu'à elle-même.
Cette question recoupe l'autre litige en cours pour Apple en France : l'association France Digitale accuse l'entreprise, auprès de la CNIL, de violer la réglementation sur les données personnelles en activant par défaut les publicités personnalisées pour ses propres services.
À mesure que la sortie d'iOS 14.5 en version finale se rapproche (c'est pour les semaines à venir), la fronde des publicitaires contre l'App Tracking Transparency prend une ampleur inédite : Facebook a lancé une campagne publicitaire contre Apple et des éditeurs chinois planchent sur une nouvelle méthode de pistage. On n'a pas fini d'en entendre parler.
Mise à jour à 14 h 24 : ajout de la déclaration d'Apple.
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Interactive Advertising Bureau, Mobile Marketing Association France, Union des entreprises de conseil et achat media, Syndicat des Régies Internet ↩︎