L'application Health n'est que la vitrine d'une ambition beaucoup plus grande pour Apple. Le logiciel conservera les données physiologiques de l'utilisateur (calories brûlées, qualité du sommeil, pouls…), des constantes provenant de bracelets connectés ou rentrés « à la main » par les propriétaires d'iPhone… dans un premier temps. Derrière cette façade, se profile une plateforme, HealthKit, qui se destine aux concepteurs de périphériques santé et aux développeurs. Au delà de ces outils, Apple a pris langue avec plusieurs institutions de santé américaines, comme la clinique Mayo dans le Minnesota, celle de Cleveland, les établissements Johns Hopkins, les hôpitaux Mont-Sinaï, ainsi qu'avec Epic, qui fournit la solution Allscripts qui gère les dossiers médicaux.
Ces institutions et ces fournisseurs de services auront un accès direct à HealthKit, rapporte Reuters, et leurs données pourront alimenter Health qui a pour vocation de se transformer en carnet de santé. À terme, les médecins pourront alimenter la base de données Health de leurs patients, en consulter l'historique et prendre des décisions médicales suivant les informations de l'application. Autant dire qu'on dépasse là le strict cadre du logiciel de mesure de distance parcourue et qu'on rentre de plain-pied dans le domaine médical qui ne souffre pas de l'à peu près. C'est là que le bât commence à blesser pour Apple, car le secteur de la santé est particulièrement réglementé aux États-Unis.
Le constructeur de Cupertino a commencé à préparer le terrain auprès de plusieurs autorités de régulation comme la FDA (Food & drug administration), avec qui Apple s'est dit dans « l'obligation morale » d'en faire plus pour la santé. Mais elles sont nombreuses les instances administratives à contacter et à faire travailler ensemble pour faire évoluer un système de santé dérégulé et aux multiples (et parfois incompatibles) systèmes de surveillance des patients. Google s'y était cassé les dents avec Google Health, qui avait également la volonté d'archiver les informations de santé des patients. Le service a fermé au début de l'année dernière faute de participants. Plus globalement, les start-up de la Silicon Valley se bousculent au portillon pour remettre à plat et simplifier le healthcare américain — sans avoir les moyens d'y parvenir.
Apple a une carte à jouer : non seulement l'entreprise fait preuve d'une volonté réelle de devenir un intervenant majeur dans ce secteur (le constructeur a embauché plusieurs spécialistes du domaine, avocats comme experts de la santé), mais encore l'entreprise a de profondes poches qui lui permettront de faire valoir son point de vue auprès des autorités du pays. Les États-Unis étant un énorme morceau et un sacré casse-tête, il n'est pas certain qu'Apple fasse des efforts identiques pour s'adapter à d'autres pays, du moins pas à court terme.