Si elle veut suivre les futures règles européennes, Apple devra autoriser le téléchargement d'apps sur l'iPhone et l'iPad en dehors de sa boutique d'ici 2024. Le créateur d'AltStore, un système de distribution d'apps qui utilise le "sideloading" pèse le pour et le contre de cette situation qui conserve encore ses zones d'ombre.
Apple travaille à se conformer au Digital Markets Act européen (DMA) et les premiers résultats pourraient apparaître dans iOS 17, avec le retrait du verrou qui empêche les acteurs tiers de proposer leur propre boutique d'apps sur iOS, ou de mettre à disposition leurs titres en dehors de l'App Store.
Apple va bel et bien autoriser l'installation d'apps en dehors de l'App Store, selon Bloomberg
Riley Testut a créé AltStore, avec lequel on peut installer des apps en passant par son Mac branché à l'iPhone/iPad. Et cela, sans jailbreak. C'est le principe de ce que l'on appelle le « sideloading ». On installe des apps grâce à un appareil tiers au lieu de les télécharger directement depuis internet ou d'une app de boutique déjà installée.
Ça n'est pas spécialement simple d'emploi et cela s'adresse à des utilisateurs motivés qui veulent à tout prix utiliser des apps refusées par Apple. Mais cette dernière ayant bien verrouillé les choses, il faut en passer par ces contorsions.
Le jailbreak en 2020, aussi rigolo et frustrant qu'en 2007
Pour Riley Testut, la perspective de pouvoir installer des app stores concurrents sur son iPhone n'est pas forcément le scénario idéal, bien qu'il soit un farouche supporter de ce désenclavement. Il déroule sa réflexion dans un fil de tweets.
Si vous aimez l'idée de souscrire à 3 ou 4 services de streaming vidéo pour voir les séries et films qui vous passionnent, alors c'est peut-être ce qui risque d'arriver dans deux ans sur iPhone. Pour utiliser une analogie avec ses propos.
On pourra être en effet forcé d'installer plusieurs apps de boutiques pour conserver l'usage de ses apps et les tenir à jour.
AltStore, l'app qui facilite le sideloading, n'aime pas trop le sideloading voulu par l'Europe
Pourquoi s'imposer cette contrainte alors qu'il suffirait de continuer à utiliser l'App Store comme avant ? Parce que ces nouveaux concurrents pourraient bien essayer de se constituer un catalogue d'apps 4 étoiles à coups d'exclusivités pour gagner du temps, argue Riley Testut :
Si, par exemple, Meta créait une boutique d'applications, ils voudraient des applications exclusives. Malheureusement, ces applications n'existent pas encore, alors que peuvent-ils faire en attendant ? Payer les développeurs de l'App Store pour qu'ils quittent l'App Store bien sûr !
Et ce ne serait pas seulement Meta — chaque magasin d'applications voudrait ses applications exclusives pour être plus attractif. Et parce que toutes les applications iOS — littéralement — sont actuellement dans l'App Store, il n'y a tout simplement aucun moyen de constituer une bibliothèque d'applications compétitive suffisamment rapidement sans aller braconner les applications de l'App Store.
Instagram ? Ils auront déménagé dans la boutique de Meta pour des raisons évidentes, vous ne pouvez donc plus recevoir de mises à jour à moins que vous n'installiez également la boutique de Meta.
Cette application de prise de notes que vous utilisez depuis des années ? Ils en ont assez de payer 30 % à Apple, alors ils sont maintenant dans la boutique d'Epic !
Pour éviter cette fragmentation, Testut avance l'idée qu'Apple propose uniquement du sideloading. Cela aurait comme avantage pour elle de réduire les risques de voir des éditeurs débaucher des apps de l'App Store, tandis que les utilisateurs les plus avancés techniquement, ou les plus motivés, auraient enfin un moyen encadré et officiel d'installer les apps refusées par Apple.
Ce serait une manière d'ouvrir le robinet comme l'impose Bruxelles, mais en ne permettant qu'à un mince filet d'eau de s'échapper. D'autant que rien dans la formulation du DMA n'interdit de procéder ainsi et seulement ainsi. Apple pourrait estimer qu'elle a respecté les termes et elle réduirait les risques par la même occasion.
Tout est question d'interprétation, mais Apple n'a pas encore communiqué sur la manière dont elle entend s'y prendre et jusqu'où ira son ouverture…