Les institutions européennes ont frappé un grand coup lorsqu'elles sont tombées d'accord sur le DMA. La législation sur les marchés numériques (Digital Markets Act, DMA) est une bombe à retardement pour les grandes plateformes, qui devront changer leurs pratiques en profondeur. Et les développeurs ne sont pas en reste.
Parmi les « contrôleurs d'accès » (« gatekeepers ») visés par le DMA, Apple trône en bonne place. Plusieurs dispositions visant à casser l'étreinte du constructeur sur l'App Store et sur l'iPhone sont au menu, et pas des moindres. Nous avons voulu savoir ce qu'en pensaient les premiers concernés, à savoir les développeurs, qui voient s'ouvrir de nouvelles opportunités.
Négociations, mise en œuvre, sanctions : le pourquoi du comment du DMA
Ce que le DMA va changer pour l'App Store, l'iPhone et Apple
Le nerf de la guerre
Les sentiments sont partagés, entre espoir, prudence voire incompréhension envers des mesures qui vont aussi obliger Apple à repenser la sécurité de sa plateforme. Un argument « essentiel », selon Clément Sauvage, développeur iOS et business angel, quand on lui parle du choix dans les systèmes de paiement d'achats intégrés. Car « on parle de paiements, de cartes bancaires, de transactions, d’argent, autrement dit le nerf de la guerre aujourd’hui. »
Et puisque Apple contrôle la chaîne de A à Z, l'utilisateur peut être rassuré par le fait que son numéro de carte bancaire n'est pas transmis à l'éditeur de l'application. Selon Clément, de nombreux développeurs voudront s'adosser à Stripe ou Adyen, mais d'autres préfèreront développer leur propre système de paiement qui pourrait présenter des lacunes en termes de sécurité.
Florent Morin, développeur iOS et contributeur régulier à MacGeneration, dresse la comparaison avec ce qui se passait dans les années 2000, « quand seuls les très gros acteurs avaient les moyens de gérer le paiement en ligne et le support pour les apps sur Nokia et BlackBerry. » Distribuer une application et y associer un moyen de paiement, c'est une chose.
Mais « quand il s’agit de gérer le support technique, les différentes devises, les différentes réglementations et tout ce qui s’en suit, c’est un gouffre financier qu’un petit développeur ne peut envisager. » On peut certes passer par une plateforme de paiement établie, néanmoins Florent rappelle que « tout ceci a un prix : c’est pour cela que Epic Store, Steam et autres prennent des commissions ».
Ce ne sera pas un problème pour les grands éditeurs, qui peuvent réduire leurs frais sans passer par des tiers : « ils peuvent vendre moins cher en faisant du volume. Le volume est réalisé par un marketing à outrance et tout ça est financé par les fonds d’investissement par exemple ». Des choses qui ne sont pas accessibles aux développeurs indépendants.
C'est pourquoi il estime que le rôle joué par Apple en tant que tiers de confiance entre les développeurs et les utilisateurs a permis aux « petits acteurs de jouer dans la même cour que les gros acteurs, sans trop subir la concurrence déloyale. »