Sans crier gare, Apple a commencé hier à demander à des bêta-testeurs d'iOS 15 leur consentement pour personnaliser les publicités présentes dans l'App Store. Jusqu'alors, ces publicités étaient personnalisées par défaut, il fallait désactiver soi-même le ciblage dans les réglages. Ce revirement satisfait France Digitale, une association qui avait justement attaqué Apple devant la CNIL sur ce sujet au printemps.
« Si cela se confirme, il est clair que l’introduction de ce consentement spécifique par Apple est le résultat de l’instruction de la plainte principale pendante devant l’autorité de régulation irlandaise, ainsi que d’autres plaintes déposées par ailleurs, dont celle de France Digitale », réagit Benoist Grossmann, co-président de l'association qui représente des start-ups françaises, interrogé par nos soins.
Apple n'a pas confirmé à ce stade le déploiement de cette demande de consentement pour tous les utilisateurs lors du passage à iOS 15 et iPadOS 15. Cette mesure est apparue pour l'heure de manière sporadique chez des bêta-testeurs dans plusieurs pays. Au départ, Apple s'était vigoureusement défendue en affirmant que « les allégations de la plainte [étaient] notoirement fausses » et que ses publicités personnalisées respectaient la loi. Jusqu'à ce retournement de situation.
« La violation du RGPD était en effet tellement manifeste que la partie était perdue d’avance pour Apple. Pour France Digitale, c'est le spectre de la condamnation qui planait sur Apple qui l’a très probablement amenée à modifier d’elle-même son comportement. On s'en félicite ! », ajoute Benoist Grossmann.
Pour autant, aucun jugement n'a encore été rendu. La CNIL a transmis le dossier à son homologue irlandaise (pays où est basé le siège européen d'Apple), déjà saisie d'une plainte similaire, en vertu du mécanisme de « guichet unique » qui vise à harmoniser au niveau européen les décisions des autorités de protection des données.
En s'attaquant aux publicités personnalisées d'Apple, France Digitale veut en fait dénoncer « l’inégalité de traitement que produit l’App Tracking Transparency (ATT). » Ce système mis en place dans iOS 14.5 oblige les éditeurs d'apps à obtenir le consentement explicite des utilisateurs pour activer le ciblage publicitaire.
Margrethe Vestager, la vice-présidente de la Commission européenne chargée de la concurrence, s'en est récemment mêlée en avertissant Apple que la confidentialité ne devait pas être instrumentalisée pour limiter la concurrence. Encore un dossier très épineux pour Tim Cook.