Ne pas donner le code de déverrouillage d'un smartphone peut constituer un délit, a jugé la Cour de cassation le 7 novembre. L'article 434-15-2 du code pénal dispose que le refus de donner aux autorités judiciaires la « convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie » (autrement dit le code déverrouillage) susceptible d'avoir été utilisée pour « préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit » est puni de trois ans d'emprisonnement et de 270 000 € d'amende.
La décision est l'épilogue d'une procédure judiciaire contre une personne interpellée en possession de cannabis : lors de sa garde à vue, elle refuse de donner aux policiers les codes de ses deux smartphones qui ont pu être utilisés dans le cadre d'un trafic de stupéfiants. Le suspect n'a pas été condamné pour avoir opposé ce refus aux forces de l'ordre, la cour d'appel ayant considéré que le code n'était pas une « convention de déchiffrement d'un moyen de cryptologie ».
En 2020, le dossier rebondit entre la chambre criminelle de la Cour de cassation (qui censure la décision de la cour d'appel) et la cour d'appel qui rejuge l'affaire, et qui relaxe à nouveau le prévenu. La Cour de cassation a donc réexaminé l'affaire en assemblée plénière, sa formation la plus solennelle.
Il s'agissait de se mettre d'accord une bonne fois pour toute sur cette question : le code de déverrouillage est-il une « convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie » ? Et la réponse est donc oui, le code qui déverrouille l'écran d’accueil d'un téléphone peut constituer une « clé de déchiffrement ».
Autrement dit, si un smartphone est susceptible d'avoir été utilisé pour préparer ou commissionner un crime ou un délit, le détenteur de l'appareil est « tenu de donner aux enquêteurs le code de déverrouillage ». Et s'il refuse, il commet donc l'infraction de refus de remise d'une convention secrète de déchiffrement, avec une possible condamnation à la clé. En ce qui concerne l'affaire originelle, elle va de nouveau être rejugée par une autre cour d'appel.