Sonos veut entrer en bourse. La rumeur était dans l’air depuis le mois d’avril, elle est aujourd’hui confirmée par la publication du « formulaire S-1 » du fabricant d’enceintes connectées, préalable à l’introduction en bourse proprement dite (initial public offering ou IPO en anglais). À l’issue de ce processus, Sonos sera cotée au Nasdaq sous le mnémo SONO.
L’offre d’introduction est encore incomplète, et ne fait apparaître ni le nombre d’actions proposées ni la fourchette de prix envisagée, même si l’on sait par ailleurs que Sonos voudrait être valorisée à 3 milliards de dollars. De manière plus immédiate et peut-être plus accessible, la publication du formulaire S-1 oblige Sonos à fournir certaines informations comptables, et offre donc le premier aperçu complet de l’activité de la société.
L’occasion d’apprendre qu’au 31 mars 2018, un peu plus de 19 millions de produits Sonos étaient utilisés dans 6,9 millions de foyers, le chiffre précis des ventes restant secret. Les clients de Sonos écoutent 80 % plus de musique après avoir acheté leur premier produit, pour une moyenne de 70 heures « de contenu sonore » par mois, ou cinq milliards d’heures cumulées au courant de l’année 2017.
Depuis la commercialisation de son premier produit en 2005, Sonos a connu douze années consécutives de croissance, et frôle désormais le milliard de dollars de chiffre d’affaires annuel. Ainsi en 2017, Sonos a réalisé un chiffre d’affaires de 992,5 millions de dollars, contre 901,3 millions de dollars en 2016. Cela dit, la société perd de l’argent, mais de moins en moins : 68,8 millions de dollars en 2015, 38,2 millions en 2016, et 14,2 millions en 2017.
Sonos prévient : elle compte continuer à investir dans la R&D, elle qui possède déjà 630 brevets, et dans le marketing. La société peut se targuer d’avoir séduit une clientèle loyale : 38 % des activations de nouveaux produits ont été réalisées par des clients existants en 2017, 93 % des produits enregistrés depuis 2005 ont reçu une mise à jour logicielle dans les 12 derniers mois. Sonos vend ses produits chez plus de 10 000 distributeurs dans plus de 50 pays, et réalise 55 % de son chiffre d’affaires hors des États-Unis.
La stratégie du fabricant n’est pas secrète : continuer à se développer dans le monde, continuer à développer de nouveaux produits, et surtout se placer dans une position centrale et neutre dans la guerre des écosystèmes. Sonos prend en charge Apple Music comme Spotify ou Qobuz, elle intègre déjà Amazon Alexa, Google Assistant est promis pour cette année, elle utilise aussi bien son protocole propriétaire de diffusion que celui d'Apple, AirPlay 2 (il arrive ces tout prochains jours, avec Siri).
Pour autant, Sonos n’est pas naïve : elle évolue dans un marché extrêmement concurrentiel, dont les acteurs établis sont bousculés par de nouveaux entrants venus du monde de l’informatique. Google ou Apple pourraient fermer leurs protocoles de diffusion, Amazon pourrait refuser de distribuer les produits Sonos, et la société pourrait ainsi être prise en étau par des géants.
La société craint aussi que le contexte économique actuel, et notamment l’imposition de barrières douanières et les premières escarmouches d’une guerre commerciale mondiale, n’affecte ses capacités de développement à l’international, véritable enjeu dans les prochaines années. Sonos veut pourtant croire dans ses chances : « 60 % de nos clients sont des clients récurrents », dit Patrick Spence.
« Cela signifie qu’un produit Sonos peut devenir […] le nœud d’un réseau de produits Sonos, et le devient souvent. » Le CEO de Sonos veut repousser les investisseurs à court terme : « vous ne pouvez pas créer une nouvelle catégorie de produits […] avec une vision à trois mois. […] Les investisseurs devraient attendre la même chose de notre société. ».