Mi-juin, Apple annonçait officiellement — chose rare — l’embauche de deux anciens dirigeants de Sony pour diriger la programmation vidéo d’Apple. Ils travailleront sous la houlette d’Eddy Cue, le grand manitou des contenus qui se fait tailler un petit costard par plusieurs anciens employés d’Apple Music dans Business Insider. Eddy Cue est « extrêmement malin », nuance l’un deux, mais il se montre aussi « très agressif » dans les négociations avec de potentiels partenaires. Sans doute un peu trop.
Dans le secteur de la vidéo, « Eddy négocie comme si [l’industrie de la vidéo] avait besoin d’Apple. Mais tout le monde n’a pas besoin d’Apple ». Si le constructeur pèse de tout son poids dans l’industrie de la musique, la situation est loin d’être identique dans le domaine de la production et de la distribution vidéo. Un autre ex-employé raconte que si tout le monde à Apple Music a beaucoup de respect pour Eddy Cue, ils sont nombreux à dénoncer sa manière de gérer les négociations (il négocie « comme un dictateur », explique-t-il).
C’est peut-être ce qui explique pourquoi, malgré les efforts de ces dernières années, assez peu de contenus vidéo exclusifs ou de prestige ait été proposé aux utilisateurs de services Apple ou aux abonnés Apple Music, en dehors des vidéos promotionnelles d’artistes et autres docus musicaux. Planet of the Apps, dont la diffusion se poursuit dans une certaine discrétion, n’a pas été spécialement bien accueilli par la critique. Carpool Karaoke sera en ligne le 8 août après plusieurs mois de retard.
« L’idée selon laquelle Apple chasserait [sur les terres de] Netflix, ce n’est pas la bonne manière de voir les choses », raconte un autre insider. « Ce n’est pas ce que fait Apple, chez qui personne n’en a rien à f#@&. Je pense que ce qui se passe, c’est que Jimmy Iovine voit un chemin pour connecter le contenu, et pas seulement la musique, avec la marque Apple ». Depuis des années, Iovine cherche effectivement à marier la technologie avec la culture pop, et chez Apple il a finalement les moyens d’y parvenir (lire : Jimmy Iovine : un supplément d'âme pour Apple Music).
Si Iovine est un patron grande taille dans le monde de la musique, il n’est pas producteur TV. C’est pourtant lui qui a initié les discussions pour les deux premiers programmes exclusifs d’Apple. La venue des deux cadres de Sony devrait permettre de mettre un peu d’huile dans les relations entre Apple et l’industrie de la production.
Comme on l’a vu, la production « made in Apple » rencontre des soucis synthétisés, en quelque sorte, par la mini-série Vital Signs consacrée aux états d’âme de Dr Dre. Le tournage a débuté en février 2016 et malgré la présence au générique de plusieurs stars, cette série n’a toujours pas vu le jour en ligne.
Ian McShane, qui a impressionné dans la première saison d’American Gods, a donné quelques informations pendant un Late Night Show. Il a notamment indiqué de quoi il était question (il joue la « vengeance » de Dr Dre, Sam Rockwell est l’égo et Michael K. Williams de The Wire est la négativité), et surtout il lève un coin du voile sur le rôle joué par Apple dans la production : « pratiquement aucun ».
Une inertie qui n’est pas sans provoquer des retards à répétition, ce d’autant que Vital Signs est le bébé de Dr Dre : insatisfait du résultat, l’artiste a réclamé des reshoots, provoquant de nouveaux délais. Selon McShane, la série devrait finalement voir le jour en août sur Apple Music, mais la Pomme n’a rien confirmé. Les deux anciens de Sony ont du pain sur la planche pour mettre la stratégie d’Apple à plat, et engager des négociations sur de meilleures bases (lire : La stratégie "contenus vidéos" est toujours aussi confuse chez Apple).