La chronologie des médias permet de financer le cinéma en France ; sans cet outil, qui implique toute la filière (des salles de cinéma aux chaînes de télé), la production hexagonale serait tout simplement réduite à peau de chagrin. Mais voilà, dans un monde où le piratage se rit des délais et où Netflix recrute chaque mois des millions de nouveaux abonnés, cette chronologie des médias à la gestion complexe est devenue incompréhensible pour le commun des mortels.
Preuve en est l’acquisition par Netflix des droits de distribution de Divines, un film français que le monde entier a pu voir sur le service de sVOD, tout le monde… sauf les utilisateurs français ! Le film étant sorti en salles, il a dû emprunter le circuit classique et contraignant de la chronologie des médias. Même si à l’occasion d’un bug, Netflix a diffusé en France pendant quelques heures le métrage de Houda Benyamina !
Bref, il est temps de dépoussiérer cette bonne vieille chronologie. L’industrie en est consciente, mais les solutions communes ne sont pas encore au rendez-vous, chacun tirant la couverture à soi. Les Echos rapportent que le CNC (Centre national du cinéma) tente de réaliser une synthèse avec difficulté. La dernière proposition est la suivante : les salles de cinéma verraient leur fenêtre d’exploitation se réduire de quatre à trois mois ; le film serait ensuite disponible à l’achat en VoD puis, passé un mois supplémentaire, à l’achat et à la location pour toujours.
Cette notion de durée illimitée serait le changement le plus significatif pour le consommateur, la carrière des films étant ballottée au rythme des ouvertures et fermetures des fenêtres d’exploitation successives (lire encadré ci-dessous). Quant aux services de vidéo sur abonnement comme Netflix, leur fenêtre reste toujours très éloignée de la sortie en salles, mais le délai pourrait passer de 36 mois actuellement à 25 mois s’ils acceptent de verser leur écot à la création. Pas sûr que cela réduise le piratage, mais enfin ce serait déjà beaucoup plus intéressant pour l’abonné.
Cette proposition est encore loin de faire l’unanimité. Les exploitants de salles de cinéma ne sont pas particulièrement partants pour voir leur fenêtre d’exploitation se réduire au profit de la VoD concurrente. Les chaînes de télévision, et en particulier Canal+ le « soutier » du cinéma français, proposent de leur côté des fenêtres « coulissantes » modifiant le délai de diffusion sur les chaînes suivant leur financement des films. De quoi complexifier encore plus un système déjà indigeste…
Il reste donc encore beaucoup à discuter et à trancher entre le CNC et les différents acteurs de la filière. Il est vrai que l’équilibre de la chronologie des médias est particulièrement sensible et que modifier telle ou telle fenêtre peut peser lourdement sur un d’entre eux.