L’idée de payer avec un bout de papier plutôt qu’avec une pièce en métal qui contient sa propre valeur est très ancienne, elle est sans doute apparue en Chine au VIIe siècle. Mais l’invention du billet de banque moderne, tel qu’on le connaît encore aujourd’hui, date du XVIIe siècle et on la doit à la Suède. Quatre siècles après, ce même pays est peut-être en passe de les éliminer totalement, et avec eux, le concept même de monnaie physique.
La Suède est le pays le plus avancé au monde sur la dématérialisation de la monnaie, comme ce reportage publié par Les Échos le rappelle bien. Il ne reste qu’environ 20 % des achats qui exploitent encore ce mode de paiement dans le pays, et les pièces et billets ne représentent plus que 2 à 3 % du PIB suédois. À titre de comparaison, c’est 10 % du PIB dans la zone euro.
Depuis quelques années, le pays a réduit considérablement son utilisation de la monnaie physique, au profit de solutions mobiles qui se sont généralisées. La Suède compte moins de 10 millions d’habitants, mais ils sont déjà près de 4 millions à utiliser Swish, un service de paiement sur smartphone proposé par toutes les banques. Grâce à lui, les habitants peuvent payer un commerçant, mais aussi n’importe quel autre utilisateur, et il n’y a aucuns frais associés.
La popularité de ces moyens de paiement numériques est telle que de plus en plus de lieux n’acceptent plus la monnaie physique. Le quotidien cite le cas du musée ABBA à Stockholm, mais on peut payer avec son téléphone partout, y compris pour la quête du dimanche à l’église et un magazine a même équipé ses vendeurs de rues, des SDF, avec un lecteur de cartes iZettle. Certains hôpitaux ont aussi refusé la monnaie, mais la justice les a forcés à accepter tous les moyens de paiements.
En effet, tous les Suédois ne sont pas sur la même longueur d’onde sur le sujet. L’usage de la monnaie a beaucoup diminué ces dernières années, mais il reste des résistances, avec plusieurs arguments avancés. Celui de l’accessibilité, déjà : les billets ont des tailles différentes, ce qui permet aux mal-voyants de les distinguer. Et puis même si la monnaie est rejetée pour l’insécurité qu’elle provoque — sans monnaie physique, il n’y a rien à voler —, elle garde des avantages pratiques.
On peut l’utiliser sans électricité, ni réseau, ce qui est une situation relativement courante dans le nord du pays. Sans compter la crainte des hackers et des populations les plus défavorisées, privées de comptes bancaires. Bref, l’arrêt total de la monnaie physique, ce n’est pas pour tout de suite, mais s’il y a un pays qui suit cette voie, c’est bien la Suède.