Siri est éminemment sympathique, et quand l'assistant d'iOS comprend ce que l'on lui demande, il se mettra en quatre pour remplir sa tâche, ce qui se limite malheureusement bien trop souvent à proposer une recherche sur internet. C'est surtout le cas pour les versions de Siri qui ne sont pas en anglais et qui ne bénéficient pas de l'intégration avec Wolfram-Alpha. Néanmoins, même aux États-Unis où la liste des services auxquels s'abreuve Siri est bien plus fournie, l'assistant virtuel reste toujours très limité dans ses actions.
Dag Kittlaus, Adam Cheyer et Chris Brigham, tous trois créateurs de Siri, comptent remédier à cette absence de jugeote avec Viv : « Siri n'est que le premier chapitre d'une plus longue et plus importante histoire ». Ce nouveau projet, sur lequel ils planchent depuis deux ans, pourrait bien incarner « l'avenir des assistants intelligents et [le déclencheur d'une] industrie de plusieurs milliards de dollars », d'après un spécialiste de l'intelligence artificielle qui a pu jeter un œil sur Viv. L'idée des fondateurs de la start-up, basée à San José, est de développer une intelligence artificielle qui dispose d'un accès à un « cerveau global » sur lequel se connectent des millions d'applications et de terminaux.
Kittlaus a expliqué pour Wired le principe de Viv, en prenant un exemple simple. Si Google Now est capable de répondre à la question « Quelle est la ville de naissance d'Abraham Lincoln ? » et « Combien y a t-il d'habitants dans telle ville ? », l'assistant est incapable d'apporter une réponse à l'interrogation complexe « Combien y a t-il d'habitants dans la ville de naissance d'Abraham Lincoln ? » — et ce sera le cas tant que les développeurs de Google n'auront pas codé ce type de question. Viv n'a pas besoin d'une petite main humaine derrière son cerveau : il génère son propre code à la volée, en connectant les différents services susceptibles d'apporter une réponse à des questions complexes. En passant, ce type d'intelligence artificielle évoque celle du film « Her » de Spike Jonze :
Viv est un système ouvert qui laisse les développeurs et les entreprises tierces devenir partie intégrante de son « cerveau ». L'assistant n'a besoin que de quelques minutes pour intégrer le jargon d'un sujet spécifique. L'augmentation des connaissances de Viv va de pair avec celle de sa compréhension, et bien entendu, plus il y aura d'utilisateurs, plus Viv se montrera « intelligent ».
En bout de course, Viv a pour vocation d'anticiper les besoins de l'utilisateur, ce qui ne manquera pas de faire froid dans le dos — un peu comme Google Now qui, après avoir fouillé dans Gmail pour repérer les billets d'avion, informe automatiquement l'utilisateur du retard de son vol. Kittlaus donne un exemple intéressant : un utilisateur qui sort d'un bar à 2 heures du matin n'aura qu'à énoncer (comme il peut) à Viv qu'il est fin saoul pour que l'assistant se renseigne sur le service de VTC préféré de l'infortuné, et commande une voiture en précisant les adresses de départ et de destination. L'infographie ci-dessous résume le cheminement de Viv (en un vingtième de seconde) sur la question : « J'ai besoin d'une bouteille de vin pas chère qui irait bien avec des lasagnes sur la route vers mon frère ».
Viv est encore en développement, et la plus grande difficulté n'est sans doute pas technique : le modèle économique de cet assistant est complexe, car il est ardu de monétiser des connexions. À moins évidemment d'envisager un rachat par une grosse entreprise du secteur, comme Apple l'avait fait en 2010 en s'offrant Siri, qui allait faire son apparition dans l'iPhone 4S l'année suivante. Ça n'est cependant pas la volonté des fondateurs du labo… mais l'appel des milliards ne sera t-il pas trop fort ?