Avec l'arrivée des enceintes Echo contenant Alexa, c'est une autre forme d'assistance intelligente qui s'offre aux habitués de Siri. Quelles sont les grandes différences entre les solutions d'Apple et d'Amazon, et jusqu'où peut-on intégrer Alexa avec iCloud ?
Depuis une douzaine de jours, Amazon vend en France deux appareils Echo. Un troisième, doté d'un écran, arrivera en juillet. J'ai opté pour le modèle intermédiaire, l'Echo tout court. Il coûtait 50 € en offre de lancement contre 100 € maintenant. C'est une enceinte cylindrique, plus petite et plus trapue que le modèle Echo Plus vendu dans d'autres pays (États-Unis, Allemagne). Il s'agit de la deuxième génération d'Echo, lancée aux États-Unis à l'automne dernier.
Sa connectique est réduite à une prise d'alimentation et une sortie auxiliaire jack 3,5 mm pour la brancher sur un ampli. Pas d'Ethernet, juste du Wi-Fi et du Bluetooth. Si vous avez une enceinte Bluetooth de meilleure tenue sonore, Echo s'y connecte et y envoie le son pendant que ses microphones s'occupent d'attendre vos ordres. Rien à redire, ça fonctionne (dans mon cas c'était avec une UE Megaboom).
Pour envoyer le son en Bluetooth depuis un smartphone vers l'Echo, c'est un peu plus sioux, il faut activer oralement cette possibilité. Dire « Alexa, Bluetooth » ou « Alexa, connecte-toi à mon téléphone » pour que l'enceinte apparaisse dans les réglages Bluetooth d'iOS.
La partie supérieure de l'Echo comprend le bouton pour couper le microphone (le cercle lumineux autour de l'enceinte, qui témoigne de son activité par divers coloris, reste alors éclairé d'un rouge bien voyant). Il y a le bouton « d'action » pour activer Alexa sans utiliser la voix et deux autres pour le volume. L'habillage extérieur imite le tissu dans des tons gris, gris foncé ou noir selon le choix à l'achat. On peut enlever très facilement cette coque pour en acheter d'autres de 16 à 26 €.
La configuration de l'Echo avec l'app Alexa sur l'iPhone n'a rien de sorcier, cependant Apple reste largement devant avec le HomePod en matière de simplicité et de rapidité. C'est l'avantage d'être au four et au moulin et de gérer la chaine de connexion de bout en bout.
Là où Amazon est impardonnable c'est sur la médiocrité de cette app Alexa, qui n'est qu'un mauvais navigateur déguisé en application iOS. L'affichage des vues est souvent lent, les gestes d'iOS pour supprimer des éléments dans les listes sont aux abonnés absents, les icônes de la barre de navigation n'indiquent jamais où l'on se trouve, et ainsi de suite.
Amazon a des moyens financiers considérables et une formidable expertise technique, mais rien n'est mis au service de son client mobile. Ce n'est pas un accident, c'est une culture : l'application Prime Video pour l'Apple TV, aussi indigente, est encore un bras d'honneur fait à l'utilisateur.
« Alexa »
Lorsqu'on a passé des années à lancer des « Dis, Siri », voire des « OK, Google », l'emploi d'un simple « Alexa ! » pour activer l'assistant est une révélation. Ça peut paraître un détail mais employer un simple prénom rend l'échange avec l'enceinte beaucoup plus naturel et spontané. Toutes proportions gardées, on a plus le sentiment de s'adresser à quelqu'un qu'à quelque chose.
Le tout en dépit d'une voix de synthèse qui n'est pas toujours aussi fluide qu'on l'aimerait : elle progresse par à-coup dans les longues phrases, et parait un peu "déprimée". C'est aussi une voix strictement féminine, Amazon n'en propose pas de masculine pour équilibrer le choix.
Après quelques jours d'utilisation, le « Dis, Siri » d'Apple a quelque chose d'un peu nunuche. Lorsque vous voulez interrompre ces assistants, d'un coté vous dites « Alexa, arrête », de l'autre « Dis Siri, arrête ». Le premier, à l'usage, sonne plus naturel que le second.
S'il y a déjà une personne baptisée Alexa dans la famille, trois autres mots d'activation sont proposés : « Ordinateur » (hommage à Star Trek), « Amazon » ou « Echo ». Ce n'est pas folichon, idéalement il faudrait pouvoir utiliser ce que l'on veut (ou un prénom masculin !). D'ailleurs, le système a un bug. L'option « ordinateur » ne marche pas ; elle apparaît bien dans les réglages de l'app mobile mais pas dans ceux de l'interface d'administration sur le web.
Audition et son
Appeler cette intelligence artificielle par son prénom c'est bien, mais encore faut-il qu'elle vous entende. Les sept petits trous sur le dessus de l'enceinte correspondent à autant de microphones. Leur nombre donne à penser que l'audition sera bonne. Dans les faits c'est bien plus discutable et aléatoire.
L'Echo peut vous entendre à plusieurs mètres mais dès qu'elle joue la radio ou de la musique, elle se retrouve dans son cocon sonore et se retrouve à la peine pour remarquer que vous l'appelez. Dans ce cas, il faudra s'y reprendre, s'approcher ou élever la voix. Ça arrive suffisamment souvent pour faire partie de « l'expérience utilisateur ». À portée de bras et sans bruit pour la gêner, un « Alexa » légèrement mal prononcé peut également la prendre en défaut. Les propriétaires de HomePod n'ont pas ce genre de problème, l'enceinte d'Apple a de bien meilleures oreilles en toutes circonstances.
Si ces appareils fonctionnaient sur batterie — on comprend aisément pourquoi ce n'est pas le cas — il y aurait moyen de les positionner au meilleur endroit dans sa pièce, celui autour duquel gravitent le plus souvent les personnes du foyer. Dans mon cas, cette dépendance à une prise électrique m'empêche de la positionner à une position plus centrale de la pièce de vie.
De la même manière que le fait Google avec ses enceintes, Amazon permet de parcourir dans l'app, ou sur le web, l'historique des requêtes faites à Alexa. Une manière de voir pourquoi elle a pu mal comprendre un ordre.
On peut réécouter ces séquences audio captées et enregistrées chez Amazon et les supprimer au besoin. Amazon suggère néanmoins de les conserver pour aider à améliorer son assistant.
L'Echo étant aussi une enceinte, s'en servir pour écouter de la musique n'a rien d'absurde. Disons que l'Echo se situe entre ma UE Boom (qui a moins de basses) et ma Megaboom (qui en développe plus et a plus de coffre aussi). C'est assez simple en définitive : le son de l'Echo vaut grosso modo celui d'une enceinte Bluetooth de même prix et de son gabarit.
L'Echo est parfaite pour remplacer un poste de radio. Elle sera OK en musique pour une chambre ou un studio. Dans un grand salon elle pourra faire son office, mais on en percevra les limites. À partir de 40 ou 50 m2 on entre dans le territoire des Sonos, HomePod et de leurs pairs, bien plus adaptés si l'on passe beaucoup de temps à écouter de la musique.
iCloud : connexion avec Calendrier
Depuis l'année dernière, Amazon prend en charge le calendrier d'iCloud avec Alexa (en plus de ceux de Microsoft et Google). Il faut avoir l'identification à deux facteurs activée sur iCloud et générer un mot de passe spécifique pour les réglages d'ajout dans l'app Alexa, comme on le fait pour les apps tierces de courrier électronique.
Si vous avez plusieurs calendriers — j'en ai un pour moi et un autre de partagé pour la famille — Alexa saura lire le contenu des deux, mais lorsqu'on enregistre des événements, ils iront uniquement dans le calendrier choisi par défaut au moment du réglage (MàJ le 26/06 : au vu des réactions de certains lecteurs, Amazon n'a pas encore activé cette fonction chez tout le monde en France).
La fonction marche très bien et les événements dictés à l'enceinte apparaissent immédiatement dans Calendrier. Il faut veiller à construire sa phrase correctement, sinon il arrive qu'Alexa soit bornée dans son refus de comprendre la requête.
On va lui demander quelque chose du genre : « Ajoute un événement visite du musée, mardi à quinze heures trente » et elle s'obstinera à oublier la partie « du musée » dans le nom du rendez-vous qui apparaitra dans Calendrier. Ou bien, j'ai dû dire l'heure à la fin de la phrase, plutôt qu'au milieu, car elle zappait la partie « trente » dans « quinze heures trente ».
Le plus sûr, d'une façon générale, est d'y aller en deux ou trois temps : lui dire d'ajouter un rendez-vous et éventuellement de préciser l'heure dans la même requête. Alexa vous demandera alors le nom de cet événement (puis l'heure, si vous ne l'avez pas déjà dite). Ça marche plutôt pas mal et on peut continuer à profiter de son calendrier iCloud avec cette enceinte.
Vous voulez savoir de quoi votre début de semaine sera fait ? Dites-lui « Alexa, quels sont mes rendez-vous lundi ? » et elle répondra en listant le nom des événements et les heures de chacun. Ce qui est pas mal quand on y pense puisque le HomePod ne sait pas encore le faire avec le Siri français.
iCloud : connexion avec Rappels
Pour marier Alexa avec Rappels d'iOS c'est plus compliqué et les résultats sont décevants. Contrairement à Calendrier, il n'y a pas d'intégration native. Il faut utiliser un service tiers, celui d'IFTTT et de son app.
Il existe plusieurs recettes IFTTT pour interfacer Alexa avec Rappels d'iOS, les deux seuls qui ont à peu près fonctionné avec moi sont celles conçues par Amazon. Il y a une recette pour transférer des rappels créés par Alexa vers la liste de rappels de son choix dans l'app d'Apple (il n'a pas souvent fonctionné), et une autre recette pour transférer plus particulièrement la liste des courses d'Alexa.
Si vous dites « Alexa, ajoute du pain à la liste des courses », Rappels d'iOS se remplira de cette info (au moment des réglages vous sélectionnez une liste de destination, soit une qui existe, soit une nouvelle). Le temps de transfert de ces rappels peut être de quelques minutes. Il arrive, plus rarement, qu'il faille ouvrir l'app IFTTT sur l'iPhone pour que le transfert s'enclenche.
Autre désagrément, les intitulés de rappels contenant des accents sont mal transférés, ils s'affichent avec des caractères abscons dans l'app d'Apple. À noter que ces enregistrements sont transférés mais pas synchronisés : si vous en effacez côté Rappels ils seront toujours présents côté Alexa.
Il est bien dommage que ce ne soit pas aussi fiable que la partie calendrier. On peut toujours s'en tenir à la fonction de rappels incluse dans Alexa. L'enceinte vous préviendra au moment prévu, de même que sur vos iPhone et Apple Watch via les notifications de l'app d'Amazon.
Question Rappels, Alarmes et Minuteurs, Alexa est parée, on peut en programmer à volonté. Les amateurs de cuisine pourront lancer plusieurs minuteurs en parallèle. Si d'aventure l'un d'entre eux n'est plus nécessaire, on demande à Alexa de le supprimer : sitôt demandé, sitôt fait.
Des Skills pour améliorer Alexa
Plus que les autres points développés plus haut, ce sont les « skills » qui marquent la différence d'approche entre Apple et Amazon. Avec Siri on est tributaire de ce qu'Apple veut bien ajouter comme compétences à son assistant. Avec Amazon, depuis l'app ou le site, on picore dans un catalogue pour activer des skills, comme si Siri avait son propre App Store.
L'ajout de ces compétences se fait manuellement (on se promène dans le catalogue et on active celles que l'on veut, ça ne prend que quelques secondes). Sinon on peut demander à Alexa d'en activer une quand on en connaît le nom. Parfois elle le fait d'elle-même en fonction de la question (il est possible que ce soit le cas uniquement lorsqu'il n'existe qu'une seule skill appropriée parmi l'offre globale).
Demandez à Alexa une recette de cuisine ou votre horoscope et elle va activer d'emblée les skills de Marmiton et de Elle Horoscope sans aucune intervention de votre part (lire aussi : Trois moyens par lesquels Amazon veut rendre Alexa plus futée).
L'avantage de ce dispositif c'est que ce catalogue devrait se remplir rapidement puisqu'Amazon ouvre grande la porte à tous les développeurs et éditeurs de services. On a ainsi les compétences de base d'Alexa qui pourra répondre à des questions de culture générale et qui se musclera les méninges au fil du temps. Siri, toujours aujourd'hui, est incapable de vous donner les conditions de circulation sur les lignes de la RATP, alors que la skill de la régie des transports est déjà au service d'Alexa.
Première réserve à propos de ces skills, dans certains cas il faut les appeler pour les activer. Si vous dites « Alexa, quel est l'horoscope des Gémeaux », elle vous répondra illico. Exemple contraire : un « Alexa, est-ce que la ligne 12 du métro circule ? » lui fera lancer Franceinfo. Dans ce cas il faut dire : « Alexa, demande à RATP si la ligne 12 du métro circule ? ». Appelée par son nom, la skill se lance et répond. On y gagnerait en spontanéité dans l'échange si cette étape devenait chaque fois facultative.
Pour autant, une skill est comme une app, c'est bien d'en avoir plein et c'est encore mieux… si elles fonctionnent. Une skill, tout comme une app, peut être mal programmée. Illustration avec des tables de multiplication. On se dit : chouette, voilà un moyen rigolo de les faire réviser à ma fille.
Vous dites : « Alexa, ouvre les tables de multiplication ». L'assistante active et lance immédiatement la skill Tables de multiplication qui consiste en un jeu de questions-réponses. Sauf que la skill en question affirme parfois qu'une réponse, pourtant juste, est erronée. La tête de votre fille quand elle dit « 8 » à la question « 2 x 4 » et qu'Alexa répond que c'est faux… Comme le confirment des commentaires sur la boutique de skills, il y a du bug dans l'air.
Consolation, toutes ces skills sont automatiquement mises à jour sitôt que les éditeurs les actualisent, elles sont gratuites et se désinstallent aussi vite qu'elles s'installent.
Avec l'arrivée de ses raccourcis dans iOS 12, Siri va aller dans cette direction d'une plus grande ouverture. iOS 12 permettra en outre de créer des séquences pour automatiser plusieurs actions après une seule requête.
Des Routines quotidiennes
Alexa fait déjà ça, d'une manière sommaire. Elle a des « Routines », des raccourcis qui font gagner du temps dans le déclenchement d'une ou de plusieurs opérations au moyen d'une commande vocale que l'on définit.
J'en utilise principalement deux. La première est pour Spotify où je n'ai qu'à dire : « Alexa, mets de la musique » pour qu'elle lance une liste de lecture bien précise parmi celles que j'ai créées. Inconvénient, elle démarre toujours avec le premier morceau de la liste et on ne peut pas demander une lecture aléatoire autrement qu'en relançant Alexa. Pour l'autre, je dis « Alexa, mets la radio » et elle active France Inter avec un réglage du volume sur 5.
Alexa propose par défaut une routine d'exemple prête à l'emploi — rebaptisée ici « Alexa, bonjour » — que l'on peut utiliser chaque matin. Elle va enchainer l'éphéméride, la météo, la circulation et lire un flash d'infos (à noter que ce bulletin de Franceinfo est toujours un peu plus récent que le même fourni par Siri).
Lorsqu'on créé ces routines on définit un événement déclencheur, cela peut être un mot-clef donné après « Alexa » ou une récurrence journalière et horaire. Ensuite on pioche, dans un maigre catalogue thématique, des actions liées à la domotique, la musique, le trafic, la météo, les flash d'actualité et le réglage du volume.
Musique & domotique
Pour l'écoute de musique j'utilise mon compte Spotify, bonne pioche car le choix des services pris en charge est relativement réduit (encore qu'il l'est bien plus sur le HomePod…) : Amazon Music Unlimited, Spotify, Deezer, TuneIn (pour toutes les radios), Kindle et Audible pour les livres audio. Pour avoir Apple Music intégré il faudra aller chez d'autres fabricants : Sonos… ou chez Apple directement.
L'écoute d'un podcast passe également par TuneIn, en demandant une lecture par son nom. Le gros défaut est que le catalogue n'est pas exhaustif. Pour un « Alexa, joue le podcast 'Le Masque et la Plume' » qui marche bien vous aurez un « Alexa, joue le podcast "Europe matin" » qui ne donne rien.
Concernant la domotique, j'ai ajouté mon thermostat Nest sans problème. Pas besoin de l'appeler par son nom, il suffit de demander à Alexa un réglage de température pour que le thermostat s'exécute. Il y a aussi plusieurs skills pour d'autres marques, comme Netatmo, Somfy, IKEA, Legrand, Philips Hue ou Belkin Wemo. On reviendra plus longuement sur la domotique dans un prochain article.
Conclusion
Au bout d'une douzaine de jours d'utilisation, Alexa est comme ses consœurs et confrères : tantôt une source d'étonnement et de satisfaction d'avoir un assistant qui joue parfaitement son rôle. Tantôt de frustration devant son incapacité à comprendre ou de vous obliger à réfléchir à la manière dont il faut tourner sa phrase. L'interaction est plus agréable qu'avec Siri, la voix gagnerait à s'améliorer.
La qualité du son de l'Echo est correcte — au niveau de ce qu'on en attend au vu du prix et des dimensions — mais son système de micros n'est pas très performant, un comble pour une enceinte basée sur des interactions vocales.
L'app est médiocre mais les skills sont un moyen très intéressant d'améliorer régulièrement les compétences de l'assistant. On est toujours dans ce va-et-vient : c'est bien, c'est pas bien.
Au bout du compte, les principales utilisation de l'Echo chez moi ont été d'écouter la radio et Spotify, de mettre des minuteurs et d'obtenir des infos météo. Rien de très compliqué, des choses auxquelles Alexa se plie sans problème… quand l'Echo n'est pas dur de la feuille. On peut aussi faire des achats en ligne mais je préfère avoir un écran devant moi afin de passer des produits en revue et de comparer les prix.
Chez MacG, à Lyon, un Echo nous sert régulièrement pour des conférences audio avec l'un d'entre nous basé en Bretagne. C'est une autre fonction de ces enceintes : vous pouvez appeler quelqu'un qui possède un Echo, et ça marche bien.
Ai-je besoin d'Alexa pour ces quelques usages… ? À voir, mais pas sûr. Chacun voit midi à sa porte, il n'y a pas une seule utilisation possible de ces assistants, c'est ce qui en fait leur intérêt, et encore plus chez Amazon avec ces skills. Si la question vous taraude de savoir si cet Echo et son assistant pourrait vous être utile, sachez qu'Amazon autorise un retour jusqu'à un mois après la réception de son produit. C'est bien assez pour s'en faire une bonne idée.