Voici donc venue la saison des liseuses tactiles à écran éclairé : Barnes & Noble a son Nook GlowLight, Amazon son Kindle Paperwhite, et Kobo a maintenant son Glo. Distribué en France par la Fnac, le Kobo Glo est d'ores et déjà extrêmement mis en avant. Faut-il craquer pour cette liseuse ? La réponse dans notre test.
Une liseuse élégante
Comme la plupart des liseuses, le Kobo Glo arbore un design discret, pour ne pas dire inexistant, et c'est tant mieux : la liseuse est un outil au service du texte, pas l'inverse. Rectangle de 11,4 sur 15,7 cm, le Kobo Glo est construit en deux parties, le corps d'une part, la face arrière de l'autre.
La face arrière du Glo est marquée du motif en losanges traditionnel chez Kobo et qui n'a aucune autre fonction que de relever un peu le design de cette liseuse. Il n'améliore en rien la préhension, qui doit tout au revêtement gommé et à la légèreté de l'appareil. Pesant 185 grammes, le Glo est en effet sensiblement moins lourd que le Kindle Paperwhite, mais aussi légèrement plus épais (1 cm) : l'ensemble est particulièrement agréable à tenir, un peu plus même que la liseuse d'Amazon.
On trouve au sommet du Glo l'interrupteur de l'éclairage et une glissière de mise en veille : il est impossible de l'activer par accident, mais il est aussi parfois difficile de l'activer tout court. À l'opposé sont situés le port microUSB (le câble est fourni, mais pas le chargeur) et un bouton de remise à zéro digne des calculatrices, mais malheureusement pas inutile.
Kobo a doté son Glo d'un emplacement microSD, qui permet d'ajouter jusqu'à 32 Go. Simple trou sur le côté gauche de l'appareil sans protection, il risque de devenir une entrée à poussière et de compromettre la durée de vie de l'appareil. On peut évidemment le boucher avec une carte microSD, mais… un bogue empêche pour le moment leur utilisation ! L'espace de stockage interne de 2 Go (1,2 Go utile) permet néanmoins de stocker environ 1 200 livres, de quoi voir venir.
On regrette de ne pas trouver de boutons en façade : comme Amazon, Kobo a supprimé le bouton d'accueil pour se reposer sur une solution logicielle qui oblige à multiplier les manipulations pour simplement revenir à l'accueil. On regrette tout autant l'absence d'une prise casque et de haut-parleurs qui limitent le potentiel du Glo et oblige les déficients visuels à se tourner vers des solutions plus chères comme le Kobo Arc (une tablette Android 7" à l'interface spécifique).
Premier démarrage, premières frustrations
La première mise en route est extrêmement longue et a été l'occasion de quelques frustrations. Chez Amazon, il suffit d'allumer un Kindle et il est prêt : votre compte est préenregistré et un mot de passe Wi-Fi plus tard, vous récupérez votre environnement de lecture. Avant de pouvoir lire sur le Kobo Glo, il a fallu attendre le long démarrage, paramétrer l'heure et la date, se connecter au Wi-Fi, subir une mise à jour système, redémarrer, ré-entrer la date et l'heure et le mot de passe Wi-Fi, pester contre ce système qui ne veut pas reconnaître un compte Fnac pourtant valide, finir par créer un compte Kobo (car un Kobo ne peut fonctionner sans compte, du moins sans manipulations infinies), et, enfin, arriver sur l'écran d'accueil. Au bout de vingt minutes.
NDLA : Au démarrage, Kobo donne un excellent conseil, celui de remplir la batterie avant la première utilisation, de quoi bien démarrer avec une batterie Li-Ion.
À vrai dire, on exagère un peu : on peut considérablement accélérer le premier démarrage en utilisant l'application Mac. Mais un peu seulement : une bonne liseuse devrait être totalement indépendante.
Il ne s'agissait là que du début des hostilités. Premier livre chargé, premier blocage total de la liseuse : il faut alors maintenir la glissière de mise en veille pour redémarrer. Premier réglage de la taille de la police, deuxième blocage total : rebelote. Quelques pages de lues et à nouveau, plus rien. Et si on sortait un trombone pour appuyer sur le petit bouton de remise à zéro ? Miracle, depuis, le Kobo Glo s'est montré d'une stabilité à toute épreuve. Mais la première impression laisse un goût amer : le Glo est la première liseuse que nous avons vu planter en plusieurs années.
Il faut aussi passer un certain temps dans les réglages pour dégager tout ce qui peut gêner la lecture. Reading Life n'est pas une mauvaise idée : ce système offre des statistiques sur vos habitudes de lecture et vous pousse à lire davantage par un procédé de ludification. On est plus réservé sur la nécessité de l'imposer par des notifications intrusives, d'autant que le système n'est pas tout à fait au point (on a obtenu une récompense pour avoir lu deux heures de suite… au bout de deux minutes). On peut heureusement désactiver ces notifications voire Reading Life dans les réglages.
Comme Amazon, Kobo offre la possibilité de faire correspondre les pages « virtuelles » avec les pages « réelles », ce qui peut être utile lors de l'extraction de citations. Malheureusement, un bogue empêche la présence de marge avec tous les ePub que nous avons lus qui n'ont pas spécifiquement été créés pour Kobo. Résultat : le numéro des pages dans la marge cache du texte, et il faut désactiver cette fonction.
Une interface intuitive
Au-delà de ces défauts tout de même assez importants, il faut avouer que le système du Kobo est d'une clarté remarquable : le fabricant canadien a trouvé un bon équilibre entre impérative promotion de son magasin et discrétion de cette promotion, équilibre précisément rompu par Amazon dans son Paperwhite. L'écran d'accueil est ainsi entièrement dédié à la lecture… ou entièrement dédié au magasin.
Par défaut, seules les cinq dernières lectures sont affichées, mais l'on accède en deux taps à l'intégralité de la liste — une présentation un peu plus graphique qu'ailleurs qui n'est pas désagréable. À vouloir en faire trop, la section « Découvrir », façade du magasin, est au contraire ratée : on ne propose pas un carrousel s'il ne fonctionne pas comme un carrousel (et comment le pourrait-il sur un écran eInk ?).
On applaudit par contre les réglages rapides, qui permettent d'activer ou désactiver le Wi-Fi en un tap, de vérifier l'état de la synchronisation et si besoin de la lancer, ou encore d'obtenir le niveau précis de la batterie. Un tap de plus et l'on entre dans les paramètres, largement illustrés et d'une clarté remarquable.
En lecture, on apprécie pouvoir personnaliser l'interface pour tourner les pages (écran partagé par moitié ou par tiers), on déteste au contraire qu'il faille maintenir l'appui sur l'écran pour entrer dans un mode où l'on peut obtenir une définition ou surligner. Sur ce point, Amazon est plus efficace et plus rapide — et il est bien rare de surligner par accident sur Kindle pour justifier ce comportement.
Lecture : une Rolls de liseuse
De manière générale néanmoins, l'interface de lecture est agréable. Il faut d'ailleurs louer les efforts de Kobo en matière de mise en page et de typographie, qui ne font qu'un peu plus enfoncer Amazon qui fournit le service minimum en la matière. Kobo fournit dix polices différentes, dont Caecilia, réputée pour son adaptation aux écrans eInk, ou OpenDyslexic, une police libre censée faciliter la lecture aux dyslexiques. De quoi faire son choix donc, mais on peut aller encore plus loin.
En plus de pouvoir régler la taille de la police, de l'interligne ou des marges, on peut pour certaines polices entrer dans un mode Typegenius qui permet d'agir sur la graisse (« épaisseur ») et sur l'intensité du gris typographique (« finesse »). On peut donc influer directement sur l'impression générale du texte, et donc le confort général de lecture, à l'échelle du caractère comme à celle du paragraphe.
Cerise sur le gâteau, Kobo permet de paramétrer la justification du texte. On peut désactiver la justification, ce qui a la plupart du temps pour effet de ferrer le texte à gauche — il existe pourtant un réglage « fer à gauche », qui est donc pour ainsi dire redondant. On peut sinon activer le fer à gauche avec justification forcée, ce que l'on appelle communément du « texte justifié ». Malheureusement, le changement de justification est lent, au point que l'on a parfois l'impression que la liseuse est plantée.
L'écran 6" est de bonne qualité : il utilise la même technologie Pearl que les Kindle d'Amazon ou la plupart des liseuses concurrentes. Il adopte une résolution de plus de 200 ppp désormais commune pour une définition de 1024x758 pixels (sic). On peut seulement faire la fine bouche sur la rémanence inhérente à l'eInk qui semble ici plus présente qu'ailleurs. Mais Kobo a prévu un réglage très fin de la fréquence de rafraîchissement de l'écran, on peut donc la régler à sa convenance (toutes les 4 pages semble être un bon chiffre).
Seul défaut, le système d'éclairage, baptisé LightLuxe. Dirigeant la lumière vers l'écran et non vers vos yeux, il aussi doux que les systèmes concurrents et permet d'augmenter le contraste en « blanchissant » le fond de la page — mais la comparaison s'arrête là. Il est plus lent à activer que le Paperwhite d'Amazon et est surtout moins blanc (il prend une teinte bleutée assez prononcée). Il laisse aussi une ombre beaucoup plus prononcée : le bas de l'écran est sensiblement plus noir que le reste sur un bon centimètre.
Le système LightLuxe n'en demeure pas moins efficace, mais il est moins abouti que son grand concurrent. Kobo se rattrape néanmoins par l'autonomie, sensiblement meilleure que celle du Paperwhite grâce à une gestion plus économe du Wi-Fi (au prix d'une synchronisation automatique un peu moins immédiate).
Un Kobo by Fnac, mais pas sectaire
Kobo souffre aussi de la comparaison avec Amazon en matière de catalogue. On y retrouve les grands classiques et la plupart des dernières nouveautés sur la boutique officielle, mais Amazon a su diversifier son offre avec des productions autoéditées parfois de bonne facture et des formats courts signés de grandes plumes. Sur ce point, Kobo n'est pas encore à la hauteur, malgré ses efforts indéniables.
La facette « Découvrir » du Kobo Glo est même d'une pauvreté affligeante : sur 20 suggestions par défaut, on trouve pas moins de neuf ouvrages issus de la série S.A.S., deux pavés vaguement érotiques, et quelques livres de la saison passée. On peut heureusement déclarer son manque d'intérêt, mais quitte à servir une liste par défaut, Kobo aurait au moins pu aligner la rentrée littéraire, et celle de 2012 de préférence.
Le fabricant canadien s'est heureusement allié dans chaque pays où il est présent ou presque avec un partenaire local : en France, il s'agit bien évidemment de la Fnac. On peut lier son compte Kobo à un compte Fnac ou utiliser un compte Fnac seul : dans les deux cas, l'offre est alors un peu plus vaste, mais surtout plus pertinente. Lors de nos essais néanmoins, un compte Fnac utilisé depuis des années n'a pas été reconnu et il nous a fallu créer un nouveau compte.
Kobo comme la Fnac proposent des livres numériques protégés par une DRM Adobe, mais la force du Kobo Glo réside ailleurs : il lit les ePub directement, sans la moindre conversion, alors qu'Amazon oblige à passer au format Mobi. Il est ainsi plus facile d'utiliser cette liseuse pour lire les ouvrages sans DRM issus de l'iBookstore ou d'autres librairies comme Immatériel. On remarque quelques bogues, notamment l'impossibilité de régler les marges, mais on peut au moins s'éviter le passage par Calibre. Un avantage compensé par un inconvénient, l'absence de services annexes comme le très pratique Send to Kindle, mais qui sera sans doute plus important pour ceux qui veulent se tenir à l'écart de l'écosystème d'Amazon.
Conclusion
Si l'on avait dû écrire ce test quelques heures après la réception du Kobo Glo, il aurait été assassin. Il faut néanmoins concéder à Kobo sa grande réactivité : durant notre test, pas moins de deux mises à jour du Glo ont été publiées, dont une accélérant sensiblement les défilements. Et les bogues de la première heure semblent avoir définitivement disparu.
Ces quelques réserves envolées, on peut juger le Kobo Glo sur pièces. Son système d'éclairage est moins abouti que le Paperwhite, que l'on préférera donc si on lit souvent dans le noir. Quelques points de l'interface mériteraient d'être revus, mais celle du Kindle Paperwhite n'est pas non plus exempte de défauts. Au final, il s'agit d'une très bonne liseuse, secondée par une offre un peu moins fournie qu'Amazon certes, mais qui peut lire l'ePub sans conversion et est compatible avec la DRM Adobe somme toute très courante.
À l'heure du choix et au même prix (129 €), on pourra donc simplement se décider selon que l'on ait déjà investi dans l'écosystème Amazon ou au contraire dans celui de Kobo ou de la Fnac. Le Kobo Glo ayant un léger avantage supplémentaire : il est plus facile de le tester en boutique. On trouve la gamme Kindle dans quelques Casino Géant et dans les Virgin Mégastore, mais le Kobo Glo figure lui dans toutes les Fnac.