L’actualité des télécoms n’a jamais été aussi riche que ces derniers mois. Certains en fin d’année dernière pensaient que la guerre des prix entre les opérateurs était sur le point de s’achever. On imagine que Patrick Drahi ne serait pas embêté si cette guerre devait s’estomper. Cela serait éventuellement synonyme de marges supérieures.
Une consolidation nécessaire ?
Mais tant que le marché des télécoms restera à quatre, il est difficile de croire que cette industrie retrouvera son calme. C’est d’ailleurs peut-être cela qui pousse Patrick Drahi à très sérieusement envisager le rachat de Bouygues Telecom. En procédant ainsi, il pourrait prendre son rêve pour des réalités et envisager de concurrencer réellement Orange. Encore faut-il qu’il en ait les moyens (ce n’est peut-être pas le plus difficile vu sa capacité à emprunter) et surtout l’aval des autorités de régulation.
Les choses pourraient aussi très mal tourner pour Patrick Drahi. Les médias ont souvent admiré les « magnats » ayant bâti leur empire à coup d’emprunts. Il est arrivé plus d’une fois que ces empires s'effondrent.
Le second semestre de 2015 devrait être plein de rebondissements. Comme nous l’avons expliqué dans les précédents papiers, il y a deux points qui restent en suspens. Le premier concerne Bouygues Telecom. Quelle est sa stratégie ? Continuer en solo ou mener une politique agressive afin de se valoriser le plus possible pour une vente ?
Autre possibilité peu évoquée : l’arrivée d’un acteur étranger qui pourrait s’intéresser à Bouygues pour entrer sur le marché français. Vu la concurrence extrême de cette industrie, cela parait peu probable. Mais le marché européen commence à aiguiser l’appétit de certains investisseurs, notamment chinois.
Les 700 MHz : la grande bataille de 2015
Dans ce jeu de dupes, les enchères de la bande des 700 MHz constitueront une heure de vérité. Qui a les moyens d’investir plusieurs centaines de millions d’euros dans le but d’améliorer son réseau dans les cinq ou dix ans à venir ? On sait qu’Orange et Iliad sont prêts à mettre la main au pot. Longtemps silencieux sur le sujet, Patrick Drahi a récemment déclaré à la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale son intention d’y prendre part. En ce qui concerne Bouygues, sa participation ou non en dira long sur sa stratégie à long terme. Preuve qu’il s’agit d’un enjeu majeur, la bande des quatre s’écharpe depuis plusieurs semaines sur les conditions de la vente aux enchères (lire : Free : le lot de fréquences 700 Mhz n'est pas garanti).
Outre la guerre des prix, il y a d’autres éléments qui vont entrer en jeu dans les mois à venir. Il y a notamment la fin annoncée du roaming, même si son arrêt définitif pourrait être repoussé à 2018 (lire : Europe : la fin du roaming pourrait être repoussée à 2018). Un enjeu tout sauf anecdotique. D’ailleurs, lors de la publication de ses derniers résultats trimestriels, Orange a mis en avant la baisse des tarifs d’itinérance pour expliquer le recul de son chiffre d’affaires en France.
Apple et Google : les nouveaux concurrents des opérateurs
Si la guerre des télécoms se limitait à une simple guerre entre acteurs du même marché, ce serait beaucoup trop simple. La lutte commence à faire rage entre les opérateurs et les géants de la high-tech. Sur ce point, Free est en pointe. Ces désaccords avec Google ont éclaté au grand jour lorsque ses internautes ont connu toutes les difficultés du monde à utiliser YouTube.
Sous couvert d’innovation, Free et Bouygues Telecom ont ouvert la porte à Google dans leurs box. Il sera bien difficile pour ces deux acteurs de revenir en arrière. Des sociétés comme Apple et Google cherchent à réduire l’influence des opérateurs. La firme de Cupertino a soumis sans succès l’idée de proposer un iPhone sans carte SIM. Face à la fronde des opérateurs, elle a fait marche arrière. Mais l’iPad Air 2 et sa fameuse « Apple SIM », qui permet de changer d'opérateur sans changer de carte SIM, montrent que le Californien n’a pas dit son dernier mot sur le sujet.
De son côté, Google expérimente le métier d’opérateur virtuel (lire : Google opérateur virtuel… mais uniquement pour le Nexus 6) et montrer la marche à suivre pour les opérateurs, à la manière de ce qu’elle fait déjà avec ses Nexus qui servent d’étalon pour les autres appareils Android (lire : L'opérateur Google veut réduire le roaming).
L’une des façons pour les opérateurs d’augmenter leurs marges, c’est de se diversifier en proposant plus de services. SFR communique par exemple de plus en plus autour de son offre domotique Home by SFR. On prête au successeur de la Freebox Revolution un grand avenir dans ce domaine également. Malheureusement pour les opérateurs, ils vont trouver là aussi sur leur chemin des sociétés comme Google et Apple qui rêvent de « connecter » votre maison.
Autre piste : celle du paiement sans contact (lire : Apple SIM et Apple Pay, deux trublions pour les télécoms). Mais à trop tarder, à force de ne pas se mettre d’accord, il est peut-être déjà trop tard. Apple travaille à exporter Apple Pay dans d’autres pays et Google est en train de repasser à l’offensive.
Suite à la présentation de la Freebox Revolution, Xavier Niel avait avoué qu’à chaque fois que ses équipes se lançaient dans la conception d’une box, il se demandait si c’était la dernière. Le jour où les télévisions connectées parviendront à ne plus dépendre des box, ces dernières perdront de leur légitimité. Ce n’est sans doute pas pour tout de suite, mais c’est justement l’un des buts poursuivis par Apple avec son projet de web TV (lire : Télévision : Apple planche désormais sur une web TV).
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