L'iPad Pro sera disponible pour tous à partir de ce vendredi, mais si on le souhaite, il est possible de le commander dès maintenant. Les heureux testeurs « amis » d'Apple ont reçu un exemplaire depuis quelques jours et ont pu jouer avec la grande tablette suffisamment longtemps pour nous livrer leurs impressions. Alors cet iPad Pro, peut-il remplacer un ordinateur portable classique ?
La réponse courte est : « Pas tout à fait ». Mais avant d'en arriver à cette conclusion, les testeurs ont pu s'extasier sur la taille de l'iPad Pro. « C'est gros », écrit assez justement David Pogue pour Yahoo Tech. « Au moins, Apple a fait en sorte que les bordures soient très petites » (mais c'est sans doute dû au fait que l'écran soit si grand…).
Surprise : l'iPad Pro est un grand iPad
« L'iPad Pro est la plus grande — littéralement — et la plus importante tentative d'Apple pour réinventer ce que l'iPad est fondamentalement, et ce qu'il peut devenir », commence Scott Stein de Cnet. Walt Mossberg écrit lui pour The Verge que « comme à son habitude, Apple s'est arrangée pour concevoir quelque chose de fin et de joli, mais aussi de très fonctionnel. Malgré sa taille "jumbo", [l'iPad Pro] est en fait plus fin (sans l'étui-clavier) que mon iPad Air de 2013 et pèse quasiment le même poids que l'iPad original, beaucoup plus petit, de 2010. »
Passées les présentations, Matthew Panzarino de TechCrunch s'extasie lui sur la puissance du processeur A9X : « Ce que peut faire ce produit est sacrément impressionnant. Il affiche 5,5 millions de pixels à tout moment, mais il ne lague jamais. [L'iPad Pro] rafraîchit son écran 30 fois par secondes quand il est statique et que vous ne le touchez pas. C'est la moitié des 60 Hz standard des autres iPad. Mais toutes les 4 millisecondes, il vérifie s'il se passe une activité sur l'écran. S'il en repère une, l'écran bascule en 60 Hz et les animations deviennent fluides. » Tout cela permet à la tablette de conserver son autonomie.
Le même Panzarino précise que l'iPad Pro est capable de prendre en charge cinq flux vidéo 4K pour les monter en temps réel. Joanna Stern pour le Wall Street Journal reprend la balle au bond en expliquant que le processeur A9X et les 4 Go de RAM permettent à toutes les applications de fonctionner rapidement. « Le plus impressionnant ? Quand j'ai exporté la même vidéo 4K dans iMovie sur un iPad Pro et mon MacBook Air Core i5 et 8 Go de RAM. L'iPad a exporté le fichier une minute et demie plus rapidement que le MacBook ».
Des applications et iOS 9 mal adaptés
De la puissance, donc. Mais pour faire quoi ? Là est le nœud du problème : iOS 9 et les applications optimisées. Walt Mossberg trouve qu'il y a bien peu de logiciels qui tirent parti de l'espace disponible sur le grand écran de l'iPad Pro. « Un des grands avantages de l'iPad sur les autres tablettes est qu'il y a 850 000 apps optimisées pour le produit d'Apple. Mais peu d'entre elles se servent du grand écran de l'iPad Pro ».
Lauren Goode note que cet écran n'intègre pas la technologie 3D Touch lancée avec l'iPhone 6s. Une technologie qui « aurait pu être pratique sur une tablette pour le multitâches, plus que sur un téléphone de plus petite taille ». De plus, « je ne peux pas manipuler plus de deux fenêtres d'applications en même temps sur l'iPad Pro », pointe-t-elle. « Je ne peux pas contrôler les choses avec un trackpad. Je ne peux pas utiliser Final Cut Pro. Entrer des données dans les cellules de Google Feuilles de calcul est pénible. Il n'y a aucune manière de prêter l'iPad à quelqu'un et le laisser s'en servir en tant qu'invité ».
L'absence de trackpad est également un point soulevé par Scott Stein. « Je réaliserais des choses plus rapidement si j'avais un trackpad, ou des applications qui échangeraient mieux entre elles […] L'iPad est encore assez rigide dans sa configuration ». Il poursuit : la tablette « commence à fonctionner comme un ordinateur complet. Mais les configurations limitées des apps "split view", et le fait que beaucoup d'applications pour iPad ne puissent pas fonctionner dans ce mode, rend [la tablette] moins enthousiasmante qu'elle devrait être ».
Le journaliste de Cnet se plaint également de la place « perdue » sur l'écran. Il n'est pas possible de glisser dans le dock plus de six icônes. « J'en voudrais plus, comme dans le dock de mon MacBook. Et je veux que les notifications et les widgets […] s'affichent sur le côté de mon écran si je veux. Je veux accéder à plus de choses en même temps. Je veux plus d'applications côte à côte, et des widgets. Pourquoi est-ce que je ne peux pas personnaliser tout cela ? Cet iPad est capable de le faire. »
Joanna Stern en rajoute une couche : « L'absence d'un vrai système de gestion des fichiers peut rendre fou. Pour la Surface Pro, Microsoft propose Windows, un système d'exploitation de bureau complet, alors que l'iPad Pro est toujours trop proche d'un iPhone ».
Smart Keyboard et Apple Pencil
Une bonne partie des testeurs ont concentré leurs efforts non pas sur l'iPad Pro en lui-même, mais… sur les accessoires conçus par Apple. Le Smart Keyboard ne reçoit pas autant d'éloges qu'Apple le désirerait sans doute.
Matthew Panzarino explique que les touches donnent une sensation de « mollesse » et que ce clavier « n'est pas aussi bon que le clavier d'un MacBook. Le design "hermétique" du clavier est bienvenu pour les projections, et il n’est pas mauvais. Mais il n'est pas génial. ». Walt Mossberg est lui aussi déçu par ce périphérique. « C'est essentiellement un clavier Mac peu profond, avec des touches comme Command qui n’ont de sens que sous OS X. Mais on ne trouve aucun raccourci lié aux fonctions de l'iPad, comme Accueil ou Spotlight. Il n'est pas non plus rétroéclairé, et il n'y a qu'un seul angle pour maintenir l'écran ».
Vous en voulez un peu plus ? En voici : « De plus, [le clavier] est si léger et petit comparé à l'écran que je trouve difficile de le mettre correctement en équilibre sur mes genoux pour taper. C'est aussi très cher. » (179 € en France)
David Pogue est un peu plus enthousiaste, même s'il souligne en liminaire que « le clavier de l'iPad Pro n'est pas compatible avec d'autres modèles d'iPad ». Le périphérique n'a « ni batterie, ni bouton d'allumage, et ne requiert pas de jumelage. C'est un chef-d'œuvre d'origami. Vous pouvez le plier dans un sens pour dévoiler le clavier, dans un autre sens pour le transformer en socle pour regarder des vidéos, et d'une troisième manière pour qu'il devienne une protection pour l'écran ». L'objet est aussi suffisamment rigide, ajoute-t-il, pour utiliser l'iPad Pro sur des genoux.
L'Apple Pencil rafle lui beaucoup plus de suffrages. David Pogue toujours : « Vous n'avez jamais utilisé de stylet aussi réactif que celui-ci : l'"encre" ne traîne jamais derrière votre mouvement ». Scott Stein se montre lui aussi très emballé : le Pencil a été « spécifiquement conçu pour fonctionner avec l'iPad Pro, et il explose tous les autres stylets que j'ai pu utiliser, y compris le Surface Pen de Microsoft. Il est rapide, précis, sensible à la pression, confortable, et pour les apps compatibles, magnifique ».
Par contre, s'il aime véritablement le stylet, Stein déplore qu'il ne soit pas fourni avec un iPad Pro « déjà cher ». « C'est aussi étrange qu'il n'y ait nulle part pour l'attacher à l'iPad, avec une attache ou un aimant. Et je n'aime pas le capuchon qui cache le connecteur Lightning » (qui empêche par ailleurs l'autre bout du stylet de jouer un rôle de gomme) « et que le stylet doive être entiché sur le côté de l'iPad pour se recharger, comme un doigt bizarre ». Le stylet peut également se charger sur un iPhone si vous avez besoin d'en vider la batterie ; il est aussi fourni avec un adaptateur pour le connecter à un câble Lightning.
Joanna Stern a laissé un de ses collègues dessinateur jouer avec le Pencil, et il lui a été « plus naturel pour dessiner et créer des formes sur l'iPad Pro que sur une tablette Wacom » Lauren Goode trouve que la meilleure fonction du stylet est « sa précision ». Durant son test, « il n'y avait aucune latence entre le Pencil et l'écran ; j'avais la sensation d'utiliser un stylet ou un stylo ».
Pour conclure (en attendant notre test de l'iPad Pro)
Walt Mossberg sonne la charge. « L'iPad Pro va sans aucun doute rendre beaucoup d'utilisateurs Apple heureux, tout particulièrement ceux qui vont l'utiliser pour dessiner. Mais je n'en achèterai pas, et je ne le recommanderai pas à l'utilisateur moyen non plus ». On a connu le journaliste, vieux compagnon de route d'Apple, plus enthousiaste.
Joanna Stern, plus emballée par le produit, note tout de même que l'iPad Pro a besoin de 5 heures pour charger complètement sa batterie. Mais pas question encore de parler de remplacer un ordinateur traditionnel par un iPad. « Pour le moment, il est plus simple de se retenir et de voir l'iPad Pro comme… un vraiment bon, vraiment grand iPad ». Mais « comme la Surface de Microsoft », l'iPad Pro « nous montre un futur où un écran unique pourrait être notre ordinateur de tous les jours ».
Matthew Panzarino conclut lui en filant la métaphore de Steve Jobs sur les « camions » (les PC) et les « voitures » (l'iPad). Pour le testeur de TechCrunch, celle-ci n'a plus lieu d'être. « Il y a des gradations » (entre les camions et les voitures), « et l'iPad Pro peut, absolument, à 100%, être l'ordinateur central de la maison ». Pour Scott Stein, « actuellement, l'iPad ne peut pas complètement remplacer mon ordinateur portable. Et il ne peut sans doute pas remplacer le vôtre non plus. »